Il est à présumer que pendant longtemps encore on n'enverra sur Vénus que des stations automatiques. Il faudra de sérieux progrès technologiques avant qu'un engin habité puisse séjourner sur un sol dont la température n'est pas éloignée de celle du plomb en fusion. Pour la même raison, l'existence de la vie sur Vénus est fort improbable, à moins d'imaginer des organismes encore plus résistants à la chaleur que nos bactéries thermophiles, ou bien flottant dans une atmosphère lourde en carbone, à 10 ou 15 km d'altitude.

Les recherches dans l'Antarctique

Les travaux scientifiques se sont poursuivis, comme chaque année depuis 1956, dans les bases établies sur le continent antarctique et dans plusieurs îles subantarctiques.

Onze nations (États-Unis, URSS, France, Grande-Bretagne, Australie, Nouvelle-Zélande, Argentine, Chili, Belgique, Afrique du Sud et Japon) ont été présentes en Antarctique, de façon permanente du 1er juillet 1967 au 30 juin 1968 ou seulement pour la campagne d'été 1967-68.

Le plus gros effort — et de beaucoup — est supporté par les États-Unis, qui entretiennent à eux seuls trois des quatre bases existant actuellement loin des côtes, dans l'intérieur du continent : Byrd, Amundsen-Scott (pôle Sud) et Plateau. La participation soviétique est également fort importante avec Vostok, la quatrième base continentale.

Depuis plus de dix ans que des scientifiques viennent régulièrement dans le milieu hostile que constitue l'Antarctique, on peut presque parler de travail de routine, sans donner à ce mot un sens péjoratif : dans la plupart des disciplines, seule la poursuite systématique des mesures et des observations sur de nombreuses années permet l'interprétation et la compréhension des phénomènes étudiés.

Le 6e continent

L'une des tâches qui s'offrent dans l'Antarctique est, bien sûr, l'exploration. Ce continent, de pénétration difficile, est grand comme les États-Unis auxquels on ajouterait l'Europe (sans l'URSS). Raids terrestres et aériens permettent d'en préciser peu à peu la physionomie.

Les études glaciologiques s'imposent également : le sixième continent renferme, à lui seul, plus des trois quarts des réserves d'eau douce du monde entier, immobilisées, bloquées dans l'énorme carapace de glace qui recouvre tout ou presque. Divers procédés permettent de déterminer depuis la surface, ou même d'avion, l'épaisseur de la couche de glace, et, partant, l'altitude — positive ou négative par rapport au niveau actuel de la mer — du socle rocheux.

On prélève des échantillons, des carottes, qui à l'analyse peuvent révéler les climats anciens. On essaie de calculer la vitesse d'accumulation et d'écoulement de la glace. Là où la roche apparaît on étudie la géologie. Peu d'organismes vivants, animaux ou végétaux, vivent loin des côtes sur ce continent vide. En revanche, la mer qui l'entoure est d'une extraordinaire richesse. C'est là matière de recherche pour les biologistes. Enfin, avec des climats aussi froids on ne peut négliger les études de météorologie.

Le plus important demeure la géophysique. En effet, les particularités du champ magnétique terrestre donnent toute leur valeur aux régions polaires. La disposition des lignes de force est telle que, près des pôles, les particules solaires ou cosmiques peuvent parvenir jusqu'au sol plus facilement que dans les régions de moyenne ou de basse latitude. L'activité solaire règle largement les émissions de particules, qui à leur tour retentissent sur de multiples phénomènes terrestres.

Il y a donc, dans les stations antarctiques et subantarctiques, des appareils qui surveillent le Soleil, mesurent l'intensité des aurores polaires et l'éclat du ciel nocturne, comptent les particules, enregistrent les variations lentes ou rapides des composantes du champ magnétique terrestre, auscultent l'ionosphère... Enfin, parmi les disciplines représentées en Antarctique, figurent d'autres branches de la géophysique, telles que la séismologie ou la gravimétrie.

Réveil d'un volcan

Ces douze mois ne se sont pas uniquement écoulés dans la grisaille du travail de routine. La saison d'été a débuté par un coup de tonnerre : le 6 décembre 1967 le volcan de l'île de la Déception se réveillait pour la première fois depuis 1842. L'île de la Déception est petite : un fer à cheval d'une douzaine de kilomètres de diamètre environ. Mais trois bases, britannique, argentine et chilienne, y étaient installées. Les occupants ont pu être évacués à temps.