moment
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin momentum pour « contraction », et movimentum, « mouvement ».
Philosophie Générale, Histoire des Sciences, Philosophie des Sciences
Au sens général, courte période de temps ; en mécanique, grandeur de la tendance d'un corps à se mouvoir vers le bas lorsqu'il est lié à une machine simple.
La notion de moment a une très grande proximité de sens avec la notion d'instant, mais, à la différence de l'instant, qui désigne une détermination ponctuelle du temps, la notion de moment peut désigner un intervalle de temps, une petite partie de la durée. Si l'instant coupe le temps en un point, le moment dure et passe comme une partie de temps. Le terme de moment a une signification plus étendue que celle d'instant. Par extension, le moment désigne une période, on dit couramment qu'on a vécu des moments heureux ou que c'est un mauvais moment à passer. Mais il est un autre usage du terme qui lui redonne de l'« instantanéité » : c'est celui qui en fait un synonyme d'occasion, de bonne conjoncture. Le terme de « moment » est alors introduit par un article défini : c'est « le » moment, au sens de moment opportun, de l'occasion qu'il faut saisir pour agir.
Aux xviie et xviiie s., la notion de moment acquiert un sens scientifique d'abord en statique, puis en mécanique. Galilée désigne par le terme de « moment » le pouvoir qu'a la gravité, dans une situation statique donnée, d'engendrer un mouvement vers le bas(1). De l'usage que fait Galilée de cette notion, on peut distinguer trois acceptions principales : 1) le moment exprime la puissance d'un corps (d'un grave), évaluée d'après sa distance vis-à-vis du centre de rotation d'un système (P × L, où P représente le poids et L la distance vis-à-vis du centre de rotation), c'est la notion de moment statique ; 2) le moment renvoie au point de vue dynamique, et correspond au produit du poids P par la vitesse de son mouvement virtuel V (P × V) ; 3) dans l'analyse du plan incliné, la notion de moment cessant d'être associée à une distance ou à une vitesse virtuelle désigne l'augmentation ou la diminution d'intensité que subit, sur un plan incliné, la tendance d'un grave à se mouvoir vers le bas (moment de descente).
La notion de centre de gravité complète celle de moment statique : par centre de gravité, on désigne le point par rapport auquel, dans un corps quelconque, sont disposées des parties possédant des moments égaux, ce qui revient à dire que, si l'on suspend le corps par ce point, il restera parfaitement immobile. Dans les deux premières acceptions, statique et dynamique, du terme, le moment reste inséparable d'une liaison fixe, et sa valeur, dans tous les cas, est commandée directement par le point du système auquel le corps est attaché. En revanche, le moment de descente sur un plan incliné est identique en tous les points du plan, il a un sens aussi bien statique que dynamique, puisque, si un corps se met en mouvement le long du plan incliné, le moment mesure alors la force dont dépend ce mouvement, d'où son exceptionnelle importance.
En même temps que Newton, Varignon(2) énonce le principe du parallélogramme des forces : lorsque, d'un point m quelconque du plan d'un parallélogramme, on abaisse des perpendiculaires u, v, w sur ses côtés et sur sa diagonale r, on a : pu + qv = rw. Si le point m est situé sur la diagonale r, la longueur de la perpendiculaire w est nulle, et l'on a : pu – qv = 0 et pu = qv. Supposons maintenant que, dans le parallélogramme, p et q soient les forces simultanées qui agissent sur le point m, et r, la force résultante qui puisse leur être substituée, les produits pu, qv, rw sont appelés moments des forces p, q, r par rapport au point m. Lorsque le point m est situé sur la ligne d'action de la résultante (sur la diagonale), les moments pu et qv sont égaux. Par ce principe, Varignon a pu donner la théorie des machines de manière très simple en ne considérant que les poids et les lignes de traction par rapport à l'axe.
Véronique Le Ru
Notes bibliographiques
