externalisme / internalisme
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Calque de l'anglais externalism et internalism.
Philosophie de l'Esprit, Psychologie, Sémantique
On appelle externalisme la thèse selon laquelle on ne peut caractériser le contenu des pensées sans faire référence à l'environnement, et internalisme la thèse contraire selon laquelle le contenu des pensées d'un individu est interne et subjectif, et peut être caractérisé indépendamment des relations de celui-ci au monde qui l'entoure.
L'externalisme affirme que le monde joue un rôle constitutif dans l'individuation des pensées. Il prend appui sur le fait que certaines pensées ont une composante indexicale et que leur contenu dépend pour partie du contexte de l'épisode de pensée(1). Ainsi la pensée « ceci est une pipe » implique une référence à un objet particulier et dépend de l'existence réelle de son objet intentionnel. Certains externalistes, tels T. Burge(2) ou H. Putnam(3), soutiennent en outre que nos concepts doivent leur contenu au moins en partie à la nature de l'environnement physique ou social (notamment linguistique).
L'internalisme peut, à l'inverse, avoir pour motivation une conception dualiste, de type cartésien, selon laquelle l'esprit est une substance autonome, ontologiquement indépendante de l'environnement externe sur lequel peuvent porter ses pensées et ses perceptions. Toutefois, les internalistes contemporains sont rarement dualistes. Leur position est notamment motivée par certaines conséquences contre-intuitives que semble avoir l'externalisme. Celui-ci leur paraît notamment incompatible avec la thèse selon laquelle la connaissance que nous avons sur nos propres contenus de pensées a une autorité particulière. Il introduit d'autre part des distinctions de contenus qui sont sans pertinence pour l'explication psychologique. En réponse à ce second problème, de nombreux auteurs ont proposé des théories duales du contenu, distinguant un contenu étroit, interne, et un contenu large, dépendant des relations à l'environnement(4).
Élisabeth Pacherie
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Evans, G., The Varieties of Reference, Clarendon Press, Oxford, 1982.
- 2 ↑ Burge, T., « Individualism and the Mental », in Midwest Studies in Philosophy, vol. IV, pp. 73-121, 1979.
- 3 ↑ Putnam, H., « The Meaning of “Meaning” », in Mind, Language and Reality, Cambridge University Press, Cambridge, 1975.
- 4 ↑ McGinn, C., Mental Content, Blackwell, Oxford, 1989.
→ contenu, individualisme, représentation
Philosophie Contemporaine, Morale
L'internalisme éthique affirme que la connexion entre jugement moral et motivation est nécessaire ; l'externalisme, qu'elle est contingente.
Selon l'internalisme, on ne peut juger qu'un acte est juste sans avoir une motivation pour agir, que celle-ci l'emporte ou non. Pour Socrate(1) et pour Kant(2), le jugement fait la volonté ; pour Hume(3) et l'émotivisme, c'est l'inverse.
L'externalisme insiste sur le phénomène de la faiblesse de volonté (acrasia(4)), qui consiste précisément à juger qu'un acte est juste sans être capable de le vouloir.
Cette question porte sur des états mentaux (jugement et motivation). A. J. Ayer l'a reposée au niveau de la signification des jugements moraux : dire qu'un acte est juste, est-ce signifier l'intention d'agir(5) ?
Julien Dutant
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Platon, Protagoras, 358 c-e.
- 2 ↑ Kant, E., Critique de la raison pratique (1788), « Des mobiles de la raison pure pratique ».
- 3 ↑ Hume, D., Traité de la nature humaine (1739), livre III, I, 1.
- 4 ↑ Aristote, Éthique à Nicomaque, livre VII.
- 5 ↑ Ayer, A. J., Language, Truth and Logic, chap. 6, Gollancz, Londres, 1936.
- Voir aussi : Ogien, R., La Faiblesse de volonté, PUF, Paris, 1993.
→ descriptivisme et expressivisme, émotivisme, intention, volonté