eugénisme
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
De l'anglais eugenics (Galton, 1883), lui-même construit sur le grec eugenès, « bien né » (de eu, « bien », et genos, « naissance », « lignée », « genre »).
Les « jeunes hommes bien nés » qu'évoque Platon dans La République(1) constituent l'apparition de l'idée d'eugénisme en philosophie ; mais pendant des siècles l'eugénisme, sans jamais reprendre ce nom, correspondra simplement à une théorie de la noblesse. Cette théorie de la noblesse peut fonder une hiérarchie sociale, ou offrir une légitimité à l'exercice de la force politique ou militaire, mais l'eugénisme ne prend son visage moderne qu'avec l'invention du mot par Francis Galton(2) : il devient alors un programme, revendiquant ses fondements scientifiques dans la théorie de l'évolution.
Biologie, Morale, Politique
Doctrine regroupant les recherches (génétiques, biologiques) et les pratiques (morales, sociales) visant à améliorer une race.
Circonscrit à l'amélioration des races animales, l'eugénisme a été appliqué à l'homme, puis détourné par les idéologies discriminatoires pour devenir une théorie sociale visant à ne permettre la reproduction et la survie qu'à certains sujets jugés les plus aptes.
L'amélioration des races domestiques s'est construite selon le schéma eugéniste de contrôle de la procréation par sélection, ce qui, du reste, a conduit à un appauvrissement génétique.
L'eugénisme « positif » consiste à sélectionner les reproducteurs ; l'eugénisme « négatif », à empêcher certaines reproductions. Appliqué à l'homme, ce programme n'avait pas la connotation discriminatoire qu'on lui connaît. Ainsi, A. Pinard (1844-1934), médecin accoucheur et fondateur de la puériculture, définissait l'eugénisme comme l'« étude des conditions qui doivent présider à une bonne procréation ».
Imprégnée d'idéologie raciste, l'eugénisme devait prendre une tout autre tournure : des programmes de stérilisation de personnes mentalement déficientes à l'exhortation d'une race supérieure.
Cédric Crémière
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Par exemple Platon, La République, II, 375a, tr. P. Pachet, Gallimard, « Folio », Paris, 1993, p. 125.
- 2 ↑ Galton, F., Inquiries into Human Faculty and its Development, Londres, 1883.
- Voir aussi : Pichot, A., La société pure. De Darwin à Hitler, Flammarion, « Champs », Paris, 2000.
- Habermas, J., L'avenir de la nature humaine. Vers un eugénisme libéral ? (2001), tr. Ch. Bouchindhomme, Gallimard, Paris, 2002.
- Taguieff, P.-A., La couleur et le sang. Doctrines racistes à la française, intr. et ch. IV, nouvelle éd., Fayard, « Mille et une nuits », Paris, 2002.
→ génération, genre, race, racisme
