génération

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Traduction du grec genesis, « devenir, engendrement ».

Philosophie Générale

Fait de venir à l'être.

Parménide refuse que la génération et la destruction affectent l'être : la génération est en effet un passage de l'être au non-être qui contredit le strict monisme parménidien, de même que la corruption ou la destruction en sens inverse(1). Pour contourner l'interdit Parménidien, Aristote détermine la forme de la génération en tant qu'elle exige trois principes : un sujet qui ne change pas, un accident qui change, et le principe même de la privation qui convertit formellement un accident en son contraire. Ainsi les deux accidents contraires, qui ne peuvent s'affecter immédiatement, sont articulés par le sujet qui les reçoit successivement(2). Aristote considère par là qu'il a répondu à l'objection parménidienne, en faisant pour ainsi dire travailler par accident le non-être : « Pour nous, nous dirons qu'il n'y a pas de génération qui vienne absolument du non-être, ce qui n'empêche pas qu'il y en a à partir du non-être, à savoir, dirons-nous, par accident »(3). La privation est donc un non-être passager qui permet la génération, ce qu'Aristote réfère explicitement à la doctrine de l'acte et de la puissance : l'être en puissance constitue en effet une autre façon de concevoir le passage du non-être à l'être, en accordant au sujet la puissance des accidents contraires. Dans cette seconde perspective, qui travaille particulièrement les textes consacrés à la génération du vivant, il est possible de décrire tous les changements naturels comme des transformations de la matière qui, en tant qu'elle est puissance des contraires, accueille successivement des formes qui se suppriment réciproquement(4).

De la même façon, Leibniz considérera que les monades, qui ne peuvent être engendrées ni détruites par des changements naturels, enveloppent en revanche toute la succession des accidents qui leur seront attribués tout au long de leur existence(5) : et Leibniz conclut que la génération et la destruction ne sont que des processus d'enveloppement et de développement des puissances de la substance.

Leibniz étaye sa conception de la génération en commentant les résultats des observations microscopiques des animalcules que réalisent à la même époque Van Leeuwenhoek, Malpighi, ou Swammerdam : le contenu philosophique de la question de la génération se trouve alors placé sous la juridiction scientifique de la question de l'embryologie. La conception de la génération se déploie à partir du xviiie s. dans l'horizon du débat entre épigénèse et préformation(6).

Laurent Gerbier

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Parménide, Fragment B viii, tr. J.-P. Dumont, dans Les Présocratiques, Gallimard, La Pléiade, Paris, 1988, p. 261-262.
  • 2 ↑ Aristote, Physique, I, 7, 190b29-191a3, tr. H. Carteron (1926), Les Belles Lettres, Paris, 1996, vol. I, p. 46.
  • 3 ↑ Aristote, ibid., I, 8, 191a13-15, p. 48.
  • 4 ↑ Aristote, De la génération et de la corruption, I, 318b, tr. Ch. Mugler, Les Belles Lettres, Paris, 1966, p. 14-15.
  • 5 ↑ Leibniz, G. W., Monadologie, §§ 6-7 et 63-77, GF, Paris, 1996, pp. 243-244 et 256-260.
  • 6 ↑ Caspar, Ph., Penser l'embryon, III, 6-7, Éditions Universitaires, Paris, 1991.

→ devenir, matière, vie




générations futures


De l'allemand künftige Generationen. Expression introduite par Hans Jonas en 1979 dans son ouvrage Das Prinzip Verantwortung.

Morale, Politique

Objet d'obligation pour une éthique transformée, quand la simple présence d'un monde approprié à l'habitation humaine est menacée par le développement de la technique moderne.

Selon H. Jonas, le développement de la technique moderne engage une transformation de l'agir humain telle qu'il déborde le site de l'éthique traditionnelle. Celle-ci se limitait à ce qui est proche et présent. Or, les forces en jeu supposent un sujet collectif, font disparaître la différence entre le naturel et l'artificiel et concernent directement l'avenir. L'existence d'un monde pour les prochaines générations humaines est menacée. Ainsi, le futur devient directement l'horizon de notre responsabilité. La morale ne peut plus considérer la présence de l'homme comme une simple donnée, mais comme un objet d'obligation. Un nouvel impératif apparaît, selon lequel « nous n'avons pas le droit de choisir le non-être des générations futures ». H. Jonas en recherche ensuite les conditions philosophiques précises.

On remarquera que cette position implique un certain anthropocentrisme.

Jean-Paul Paccioni

Notes bibliographiques

  • Jonas, H., Das Prinzip Verantwortung, (Insel Verlag, Frankfurt am Main, 1979) trad. « Le principe de responsabilité », Cerf, Paris, 1990.

→ éthique, génération, homme