affection

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».


Du latin affectio ; en grec : pathos.

Philosophie Antique

Modification subie sous l'effet d'une action extérieure. Associée, chez un être vivant, au plaisir ou à la peine, l'affection consiste en un sentiment, affectus.

Rangée par Aristote sous la catégorie de la qualité(1), l'affection, pathos, est, en un premier sens, « la qualité suivant laquelle un être peut être altéré »(2), comme le blanc et le noir, le doux et l'amer, la pesanteur et la légèreté. En un second sens, c'est l'altération elle-même : le fait d'être blanchi, noirci, etc. Subie, elle est passive : d'où le sens psychologique de passion, « tout ce qui arrive à l'âme »(3). Entendu en ce sens, pathos prend bientôt une valeur négative : Zénon de Citium, le fondateur du stoïcisme, définit le pathos comme « le mouvement de l'âme irrationnel et contraire à la nature ou encore une impulsion excessive »(4). Cicéron qui, lorsqu'il traduit pathos par adfectio, définit celle-ci de façon neutre comme « un changement de l'âme ou du corps venant d'une cause ou d'une autre »(5), traduit ici pathos par perturbatio(6).

À la différence des passions, que les stoïciens tiennent pour des jugements irréfléchis et donc contraires à la sagesse, les sensations, qui sont pourtant elles aussi des affections passives, sont susceptibles d'être assumées activement par l'âme par le bon exercice de l'assentiment. Si l'idéal du sage stoïcien est d'éradiquer les faux jugements que sont les passions et d'atteindre l'impassibilité, les stoïciens retiennent toutefois trois « affections positives », eupatheiai : la joie, la circonspection, la volonté.

À travers même la condamnation stoïcienne des passions subsiste ainsi la conception aristotélicienne, moralement neutre, de l'affection comme modification subie : c'est elle qui préside à l'analyse thomiste(7) comme à la conception cartésienne des passions de l'âme(8).

Frédérique Ildefonse

Notes bibliographiques

  • 1 ↑ Aristote, Catégories, 8, 9a28-10a10.
  • 2 ↑ Aristote, Métaphysique V, 21, 1022b15-16.
  • 3 ↑ Aristote, Traité de l'âme, I 1, 402a8.
  • 4 ↑ Diogène Laërce, VII, 110.
  • 5 ↑ Cicéron, De l'invention, I, 36.
  • 6 ↑ Cicéron, Tusculanes, IV 6, 11.
  • 7 ↑ Aquin, Th. (d'), Somme théologique, I, q. 79, a 2.
  • 8 ↑ Descartes, R., les Passions de l'âme, première partie, article 1 (Œuvres de Descartes, publiées par Ch. Adam & P. Tannery, réimpr. Paris, 1996, p. 2-3).

→ altération, assentiment, impassibilité, passion, qualité, substance