sondage
Enquête statistique dont le but est de connaître, à un moment donné, la manière dont se répartissent les opinions individuelles à propos d'une question donnée. (On dit aussi sondage d'opinion ; synonyme : enquête d'opinion.)
DROIT
En France, la loi de 1977 interdisant de publier, de diffuser et de commenter les sondages d'opinion pendant toute la semaine précédant une élection et pendant le déroulement du scrutin est devenue caduque en 2001, à la suite d'un arrêt de la Cour de cassation. Une nouvelle loi, en 2002, n'a maintenu l'interdiction que pour la veille et le jour du scrutin. La Commission des sondages a tout pouvoir pour vérifier que ceux-ci ont été réalisés et vendus conformément à la loi.
SOCIOLOGIE
Le sondage, qui permet d'éviter l'étude exhaustive d'une population déterminée, s'applique aujourd'hui à tous les secteurs de la vie politique, économique et sociale. Il est employé aussi bien dans des enquêtes d'intérêt collectif ou général que dans des enquêtes d'intérêt privé, comme les études de marché. Fondé sur la loi des grands nombres, il consiste à interroger quelques personnes représentant un groupe social dont on veut connaître l'opinion sur un point précis.
Techniques des sondages
Méthodes d’échantillonnage
Deux méthodes permettent d'obtenir des échantillons représentatifs : la méthode probabiliste, ou aléatoire, et la méthode des quotas.
La méthode probabiliste consiste à « tirer » les personnes à interroger dans des conditions proches de celles du hasard. Elle nécessite de disposer d'un fichier exhaustif de la population à étudier, de sorte que chacun ait la même chance d'être désigné par le sort. L'échantillon est constitué en tirant un nom sur dix ou sur quinze, par exemple. La validité de cette méthode, qui est la plus rigoureuse, dépend donc de la qualité de la liste, ce qui rend souvent impossible son emploi.
La méthode des quotas consiste à construire a priori un modèle réduit de la population mère, de telle sorte que l'on retrouve dans celui-ci les proportions statistiques de celle-là. Le sexe, l'âge, l'habitat, le niveau des revenus sont autant de variables qui seront retenues ou non, compte tenu de ce que l'on veut savoir. Pour chaque variable prise en considération, des quotas sont établis. Cette méthode donne de bons résultats et présente l'avantage d'être plus économique et plus rapide que la méthode aléatoire.
Établissement des questionnaires
La réussite d'un sondage d'opinion ne dépend pas seulement de l'échantillonnage, mais aussi du questionnaire, spécialement conçu en fonction des informations à recueillir. Le travail essentiel vise à éliminer toute ambiguïté dans le vocabulaire employé, à écarter les termes incompréhensibles par leur technicité ou présentant une valeur affective, à ordonner les questions selon un ordre qui évite des réactions négatives. On distingue les questions fermées, où la réponse ne peut être que oui ou non, des questions ouvertes, auxquelles le sujet peut répondre librement en quelques phrases, et les questions pour lesquelles différents types de réponses sont proposées et entre lesquelles le sujet doit choisir.
Lorsque le questionnaire est au point, il est testé sur un nombre limité de personnes. L'analyse des entretiens permet d'établir définitivement les questions : certaines seront éliminées, d'autres reformulées. D'autre part, un plan de sondage est réalisé, déterminant les lieux où se déroulera l'enquête et les individus à interroger.
Dépouillement et tri
À l'interview succède le dépouillement des questionnaires ; simultanément, l'échantillon est « redressé », par comparaison avec les critères de choix initialement définis, auxquels un certain nombre de personnes interrogées ne répondent pas.
Enfin, les informations sont triées. On distingue le « tri à plat » et le « tri croisé ».
Le tri à plat fournit les résultats en nombre et en pourcentage pour chaque question : il décrit l'échantillon.
Le tri croisé met en corrélation deux ou plusieurs variables, par exemple le sexe et le nombre de oui, ce qui permet de comparer le comportement de l'électorat féminin au masculin. Le tri à plat donne donc le résultat brut de l'enquête, le tri croisé en amorce l'explication.
Les sondages et leurs limites
Les techniques utilisées par les instituts de sondage sont de mieux en mieux maîtrisées, et un certain nombre de dispositions ont été prises pour éviter les manipulations de l'opinion publique. Cependant, les sondages en eux-mêmes et l'utilisation qui en est faite posent un certain nombre de questions.
La première concerne la nature de l'opinion recueillie par le questionnaire. Nos opinions se construisent dans l'interaction quotidienne, et leur formulation, avec ses nuances, ses hésitations, dépend de leur contexte d'énonciation, alors que le questionnaire met en demeure la personne interrogée de formuler immédiatement son jugement ou de choisir entre des jugements prédéfinis qui ne laissent qu'une gamme de choix limitée. Ce type de situation incite les enquêtés à ne pas prendre de risques, à exprimer des opinions moyennes et provoque un effet de conformisme. De plus, la diversité des attitudes possibles face à une question rend difficile l'interprétation des non-réponses.
Deuxièmement, les médias utilisent de plus en plus les sondages pour mettre en scène le débat social et politique. Ce faisant, ils tendent à « révéler » l'opinion à elle-même et à transformer une opinion statistique distincte de celle des groupes sociaux réels en un fait incontestable. Comme l'indique le sociologue Pierre Bourdieu, l'opinion publique présentée sous la forme du résultat d'un sondage indiquant que « 60 % des Français pensent que » est « un artefact pur et simple dont la fonction est de dissimuler que l'état de l'opinion à un moment donné du temps est un système de forces, de tensions et qu'il n'est rien de plus inadéquat pour représenter l'état de l'opinion qu'un pourcentage ».
En méconnaissant la multiplicité et la complexité des opinions réelles, les sondages, tels qu'ils sont utilisés par les médias, peuvent contribuer à rendre plus opaque le fonctionnement de la démocratie.