Tournés vers l'extérieur, les protestants de France n'en reviennent pas moins chaque année, en septembre, dans un petit hameau du Gard, au lieudit mas Soubeyran, où depuis des décennies, ils se retrouvent par milliers (20 000 cette année) pour commémorer le sort tragique de leurs ancêtres les camisards, morts pour leur foi. Le thème choisi pour cette rencontre : « La femme sous la résistance au temps de Louis XIII ». Une autre manière de dire que les protestants vivent leur siècle et que la place et le rôle des femmes ne leur sont pas étrangers.

Œcuménisme

Le grand événement est la réunion à Genève, en juillet 1982, du Comité central (organe législatif) du Conseil œcuménique des Églises, qui rassemble plus de 300 Églises anglicanes, protestantes et orthodoxes du monde entier.

Parmi l'ensemble des questions abordées, on peut en retenir trois. Tout d'abord, la présentation aux 120 membres du Comité du texte d'accord sur « le baptême, l'eucharistie et le ministère », conçu et réalisé par une centaine de théologiens appartenant à toutes les confessions chrétiennes, catholiques inclus.

Ce texte a été adressé, pour étude et amendements divers, à toutes les Églises membres, et, s'il était adopté par elles, même modifié, cela constituerait un événement œcuménique sans précédent. Non que chacune d'entre elles s'y retrouverait sans difficulté : les oppositions demeurent. Mais on aurait en main un document de référence commun à l'ensemble des Églises chrétiennes.

La deuxième question touche la mission et l'évangélisation : un texte de synthèse du travail accompli pendant des années par le Conseil œcuménique permet d'affirmer que la mission, c'est-à-dire le témoignage, est l'essence même de la vocation des Églises, parce qu'elles sont envoyées dans le monde pour annoncer Jésus-Christ et son message de réconciliation.

La troisième question porte sur la formulation nouvelle d'une éthique « politique chrétienne ». Il s'agit d'une évaluation de la conception et de l'exercice du pouvoir, dans la fidélité à l'Évangile et dans l'intérêt de la justice sociale et de la dignité de l'être humain.

Intercommunion

La vie œcuménique, c'est aussi le développement de ce qu'on appelle les « dialogues bilatéraux », c'est-à-dire les discussions d'Église à Église, tel le dialogue entre anglicans et catholiques, au niveau mondial, qui fait apparaître de très nombreux points d'accord, bien que la question de la primauté du pape demeure une pierre d'achoppement pour un certain nombre d'anglicans. Tel aussi le dialogue entre catholiques et orthodoxes ou entre anglicans et luthériens.

Pour la France, il faut mentionner la reprise du dialogue officiel entre protestants et orthodoxes, dont les Églises sont membres du Conseil œcuménique des Églises. La rencontre de cet automne, qui portait sur la conception de la Sainte Cène et de l'Eucharistie dans les deux Traditions, fait apparaître moins de divergences que dans le passé et c'est sans doute plus pour des raisons pastorales (être attentif aux réactions des fidèles) que strictement théologiques qu'une pleine communion s'avère encore impossible.

Du côté des relations entre catholiques et protestants, on peut seulement relever qu'elles se développent, notamment au plan de l'action commune, en faveur de la défense des droits de l'homme par exemple.

Il est vrai que la collaboration permanente entre catholiques, protestants et orthodoxes au sein de l'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture), pose en termes nouveaux la question du dialogue œcuménique et celle, très précise, de l'intercommunion. S'il est possible de témoigner ensemble, de s'engager ensemble, de prier ensemble pour les torturés et les victimes de la répression dans tous les pays, comment supporter davantage « le jeûne eucharistique », l'impossibilité de partager le même pain et le même vin ? La vie est quelquefois plus forte que les raisons d'Églises.

Orthodoxes

La deuxième conférence panorthodoxe préconciliaire, qui se déroule du 3 au 13 septembre 1982 à Genève et Chambéry, se révèle à la fois importante et décevante. Y participent toutes les Églises orthodoxes, à l'exception de l'Église d'Amérique et de l'Église du Japon, non encore reconnues. Le P. Boris Bobrinskoy, professeur à l'Institut de théologie Saint-Serge de Paris, fait partie de la délégation du patriarcat œcuménique.