Les satellites sont devenus des outils précieux pour recueillir des renseignements d'ordre tactique ou stratégique. Cette application, la reconnaissance, permet aux responsables militaires et au gouvernement des puissances qui y ont recours d'obtenir discrètement des informations sur les équipements militaires et les grands équipements technologiques des autres pays, et de surveiller les mouvements de troupes et de matériels, les zones de conflits, etc. Tous les grands conflits des dernières décennies (guerres israélo-arabes, guerre Irak-Iran, conflit d'Afghanistan, guerres du Golfe et de Yougoslavie...) ont été étroitement surveillés par des satellites de reconnaissance photographique. Aujourd'hui, les satellites les plus performants fournissent des images sur lesquelles on peut distinguer des détails d'une dizaine de centimètres seulement.

Les premiers satellites de reconnaissance photographique ont été lancés au début des années 1960, par les États-Unis et l'ex-URSS. Les Américains utilisèrent d'abord des satellites Discoverer, dotés d'une caméra à haute résolution dont le film revenait au sol dans une capsule munie d'une rétrofusée, qui pouvait être récupérée à l'aide d'un avion pendant sa descente en parachute, et des satellites SAMOS (Satellite And Missile Observation System), équipés pour transmettre leurs images par radio chaque fois qu'ils survolaient les États-Unis. À partir de 1971, ils disposèrent de satellites Big Bird, évoluant entre 160 et 250 km d'altitude et recueillant d'une part des images à moyenne résolution transmises au sol par radio, d'autre part des images à haute résolution (quelques décimètres) envoyées au sol dans des capsules récupérables, chaque satellite disposant de six capsules larguées successivement à des intervalles de trois à quatre semaines. Depuis la fin des années 1970, les Big Bird sont remplacés par les engins de la famille Key Hole (KH), à l'orbite plus haute (plus de 300 km) qui leur confère une durée de vie plus longue (deux ans environ). Ils transmettent leurs images au sol sous forme numérisée (donc, sans aucune dégradation) et possèdent, par ailleurs, des détecteurs opérant dans l'infrarouge. Leur lancement est assuré par la navette spatiale.

Dans l'ensemble du programme spatial de l'ex-URSS, les satellites de reconnaissance photographique constituent, de loin, la famille la plus nombreuse : plusieurs centaines ont été lancés depuis 1962 dans le cadre du programme Cosmos. À la différence des Américains, les Soviétiques, jusque dans les années 1980, ont utilisé exclusivement la technique de récupération des clichés obtenus par leurs satellites. Cette procédure leur permettait d'obtenir des clichés de très bonne qualité avec des caméras classiques, à défaut de maîtriser les technologies optiques et électroniques nécessaires à la transmission au sol d'images par radio. Mais, comme les satellites concernés avaient un périgée très bas (pour accroître la résolution des images), leur durée de vie était très courte (une douzaine de jours, en moyenne), et il fallait donc en lancer beaucoup pour assurer une surveillance permanente. Il a fallu attendre 1983 pour que l'ex-URSS dispose de satellites de reconnaissance photographique ayant une durée de vie de plusieurs mois et capables de transmettre leurs images par radio. La France, forte de l'expérience acquise avec les plates-formes Spot, a développé les satellites Hélios. Décidé en 1986, réalisé en coopération avec l'Italie et l'Espagne, chacun des trois pays disposant sur son territoire de ses propres installations de réception et de traitement des images, le programme Hélios 1 comporte deux satellites, lancés respectivement en 1995 et en 1999.

La continuité du service sera assurée par le programme Hélios 2, engagé en 1995 et auquel sont venues se joindre en 2001 l'Allemagne et la Belgique. Celui-ci comportera également deux satellites, mais qui bénéficieront de plusieurs améliorations : l'adjonction d'un moyen d'observation infrarouge autorisera la surveillance nocturne et la détection des activités sur les sites observés, les prises de vues seront plus nombreuses et les images obtenues présenteront une meilleure résolution. Le lancement du premier satellite, Hélios 2A, est prévu en 2004.