Enfin, sans doute son départ pour Lille, où elle brigue (sans grand danger) la succession de Pierre Mauroy, était-il programmé. Mais la démission en novembre de Martine Aubry, initiatrice des trente-cinq heures, affaiblit encore un peu plus le gouvernement Jospin. D'autant que la popularité de Martine Aubry dans les sondages la fait apparaître comme une rivale potentielle, du moins comme une candidate crédible à l'Élysée dans l'hypothèse où l'actuel Premier ministre serait empêché.

Le quinquennat adopté

Évoquée depuis 1973, mais jamais mise en œuvre, la réduction de sept à cinq ans du mandat présidentiel est approuvée par référendum le 24 septembre. Le « oui » l'emporte avec 73,2 % des suffrages exprimés. Mais le taux d'abstention record (69,8 % des inscrits) transforme cette modernisation des institutions de la Ve République en échec pour la classe politique dans son ensemble et pour les deux têtes de l'exécutif en particulier.

Jusqu'alors opposé à cette réforme, le chef de l'État ne s'y rallie que sous la contrainte de son Premier ministre et de l'ancien président Valéry Giscard d'Estaing, à l'origine d'une proposition de loi organique. Pas vraiment convaincu par l'utilité d'un tel changement, Chirac s'engage peu dans le débat. Mais prend le risque de choisir la voie du référendum (avec le risque plébiscitaire que cela implique sous la Ve République) au lieu d'une simple réunion du Congrès à Versailles. La campagne, très brève, sans relief, éclipsée par d'autres événements (flambée du prix de l'essence) découragera les meilleures volontés.

La bataille de Paris

Bastion de la « Chiraquie » depuis 1977, jamais la majorité municipale de l'Hôtel de Ville de Paris n'a paru aussi menacée par une défaite électorale en mars 2001. À l'origine de cette perspective pour le RPR : la guerre Tiberi-Séguin. Candidat à sa propre succession, contre l'avis de son camp, le maire sortant, Jean Tiberi, fait de la résistance. Il décide de mener ses propres listes dans la capitale contre celles du candidat officiel de la droite RPR-UDF-DL, Philippe Séguin, désigné en mai. À l'automne, Tiberi est exclu du mouvement gaulliste. « Blessé », « trahi », il ne désarme pas pour autant. Sa détermination, au contraire, redouble, alors que, dans le même temps, la campagne du député des Vosges semble patiner. Certes, ce dernier se présente en « candidat de rupture ». Il veut en finir avec le « système parisien » qui, depuis des années, défraie la chronique « politico-judiciaire » (emplois fictifs, financement occulte). Mais voila, la croisade de Séguin pour renouveler le personnel politique parisien, sa volonté de n'admettre aucune personnalité mise en examen pour mener le combat dans les vingt arrondissements et sa détermination à ne pas faire alliance au second tour avec son rival, se heurtent à de nombreuses difficultés. Il doit notamment faire face à des listes dissidentes. Résultat : face à une droite éclatée, dans une ville sociologiquement à droite, la gauche dirigée par le sénateur socialiste Bertrand Delanoë paraît, pour la première fois de son histoire, en mesure de s'emparer de la mairie.

Chirac et les affaires

La « bombe » explose à la « une » du journal le Monde, les 21 et 22 septembre, juste avant le référendum sur le quinquennat. Elle va secouer durablement la cohabitation et déstabilisé le chef de l'État. Le quotidien publie le script des confessions sur vidéo de l'ancien collecteur de fonds du RPR, décédé en 1999, Jean-Claude Méry. Il met en cause Jacques Chirac (dont le nom est déjà cité dans les emplois fictifs et dans l'Office des HLM de la Ville de Paris). Méry détaille un circuit de financement politique occulte de plusieurs partis, de droite comme de gauche, à Paris et en Région Île-de-France. Dans une première intervention télévisée, le président se dit « indigné par le mensonge et l'outrance ». Et qualifie, en empruntant à Rimbaud, l'histoire d'« abracadabrantesque ». Tout tourne très vite à l'affaire d'État. Le 24 septembre, Dominique Strauss-Kahn reconnaît sans l'avoir visionnée avoir eu entre les mains la fameuse cassette. Une enquête judiciaire est ouverte contre lui. Début décembre, nouveau coup de théâtre : Michel Roussin, proche de Jacques Chirac, est mis en examen pour « complicité et recel de corruption » puis écroué avant d'être relâché. Dans le dossier, trois anciens trésoriers (officiels ou officieux) de partis politiques sont également mis en examen : Louise-Yvonne Casetta (RPR), Jean-Pierre Thomas (PR devenu Démocratie libérale) et Gérard Peybernes (PS).