Le fédéralisme est pourtant non seulement l'issue logique, mais la raison d'être de la construction européenne. Celle-ci continue à se faire – quoi qu'on en dise – par la « méthode Monnet », chaque étape portant en elle-même la nécessité de passer à la suivante. La Communauté européenne du charbon et de l'acier a débouché sur le marché commun ; le marché commun s'est transformé en marché unique (liberté totale de circulation des hommes, des produits et des capitaux) ; le marché unique a conduit tout droit à l'union monétaire ; la zone euro, enfin, ne fonctionnera pas sans solidarité financière, sans règles budgétaires et fiscales communes, sans une représentation extérieure commune d'Euroland. Il ne faut pas se leurrer : la prochaine étape, c'est la mise en place d'un pouvoir supranational organisé. Le défi est exaltant, il pourrait redonner goût à la politique. En revanche, le relever avec frilosité, agir en catimini en s'abritant derrière des argumentations techniques (« la contrainte de l'euro exige que... »), ne pourra qu'éloigner un peu plus les peuples de leurs élites et de leur nouvelle monnaie.

Pascal Riche