Il faut toutefois ici remarquer que cette violence se déclenche en des lieux et selon des circonstances précises situés à l'intérieur de l'école. Ce qui signifie que cette dernière produit pour certains élèves des « effets déclencheurs » et qu'elle n'est pas le reflet d'une réalité « hors les murs », comme certaines simplifications le laissent aujourd'hui accroire. Les contenus d'enseignement, les méthodes, les comportements de certains enseignants sont donc, dans certains contextes, sources de comportements violents. L'échec scolaire dans tous ses composants et sous toutes ses formes apparaît ainsi comme une des causes majeures de ces situations.

Cet important corpus d'informations permet désormais d'esquisser des modèles théoriques. Celui qui est proposé par le rapport de l'IGEN prend en compte deux types de conduite, les agissements « anomiques » (absence des règles et de normes) et « antagonistes » (des comportements francs d'opposition et/ou de haine), et il facilite la mise en œuvre des politiques de gestion de la violence, avec une prévention « secondaire ».

D'une façon générale, la réflexion en France sur la violence scolaire – et sa traduction sur le terrain – est très récente, et elle s'est orientée sous la pression de l'urgence dans l'élaboration de programmes de gestion de ce phénomène.

Le rapport de l'IGEN

Ce modèle proposé par l'IGEN part de l'analyse que les actions mises en œuvre face à la violence sont marquées par trois grandes tendances que l'on peut qualifier de sécuritaire, identitaire et solidaire. Le sécuritaire est fortement construit sur des mesures de protection et de répression ; c'est le syndrome de « la citadelle assiégée ». L'identitaire repose sur des priorités d'actions qui maintiennent et améliorent l'identité de l'établissement où la prévention pédagogique est dominante ; c'est le type de « l'établissement-sanctuaire ». Le solidaire est construit sur la recherche d'un équilibre en osmose avec l'environnement ; la prévention partenariale le sous-tend : c'est le modèle de « l'espace éducatif concerté ». Cette clarification est une approche qui permet, d'une part, aux acteurs eux-mêmes défaire un constat et de se situer lucidement dans leur pratique, éventuellement de la modifier, et, d'autre part, aux décideurs d'élaborer des politiques en adéquation avec les missions éducatives nationales qui intègrent à des degrés divers ces différentes composants.

Gérer et/ou prévenir la violence ?

En relation directe avec la prégnance administrative et l'importance historique accordée à l'efficacité de la « planification » en France, la première réponse a été de mettre en œuvre des programmes d'ordre structurel infra-, péri-et post-scolaires. La seconde réponse, encore très timide, concerne des programmes destinés aux élèves et aux enseignants.

Pour les élèves du primaire et du secondaire, ces programmes sont construits sur l'apprentissage de la médiation, de la négociation, et de démarches de résolution de conflits. Pour les enseignants en formation initiale, ce sont surtout des modules de formation qui les préparent à enseigner dans des situations difficiles (connaissance des milieux et des élèves « à risque », adaptabilité des réponses pédagogiques...) et des stages pratiques en situation sous tutorat renforcé, dans des établissements « sensibles ».

L'orientation d'action de la formation continue, quant à elle, est plus de répondre aux demandes « du terrain » autour d'une situation de crise passée ou présente et de privilégier les stages sur les lieux d'exercice.

On remarquera dans cette panoplie de programmes l'absence quasi complète d'actions concernant des acteurs principaux : les parents.

Ces programmes ont toutefois leur propre limite. D'une part, même réussis, ils sont porteurs pour certains élèves de tendances « schizophréniques », ceux-ci retrouvant souvent leur comportement agressif dès le franchissement du seuil de l'établissement ; d'autre part, ils sont tardifs et paraissent « asymptotiques » aux causes profondes de ces agissements.