Malgré la consolidation de ses positions, le gouvernement connaît un début d'année difficile puisque, ayant exporté du blé en 1995, il se retrouve sans stock disponible pour le rude hiver bulgare. Le « scandale du blé » coûte leurs places au vice-Premier ministre et au ministre de l'Agriculture en janvier. En mai vient le tour du ministre de l'Intérieur, incapable d'endiguer la criminalité qui ronge le pays. Le cabinet Videnov subit son plus cuisant échec dans le domaine financier, le système bancaire privé bulgare étant basé sur la spéculation mafieuse et souffrant d'une forte vulnérabilité. En mai le taux d'escompte passe à 108 % ; en septembre les taux d'intérêt grimpent à 300 %; la monnaie nationale, le lev, n'en finit pas d'être dévaluée. La Banque centrale doit, finalement, en juin, fermer 3 banques privées ; en septembre, 9 d'entre elles sont mises directement sous son contrôle. Paniques, les petits épargnants vident leurs comptes, entraînant ainsi la décrépitude du système bancaire bulgare. Quasiment en cessation de paiement, la Bulgarie est obligée de faire appel aux institutions financières internationales et augmente tous les impôts directs et indirects.

Devant une telle faillite, l'UFD en pleine rénovation prépare l'élection présidentielle d'octobre-novembre. Elle a écarté, au mois de juin, son président Jelio Jelev, un ancien dissident, au profit de Petar Stoïanov. Celui-ci l'emporte haut la main, le 3 novembre, avec plus de 60 % des suffrages. Avocat, fondateur du club Démocratie, à Plovdiv, en 1990, premier porte-parole de l'Union des forces démocratiques, il a été le vice-ministre de la Justice du premier gouvernement anticommuniste en 1992-1993, avant d'être élu député l'année suivante, puis d'être nommé vice-président de l'UFD en 1995, après le retour des communistes au pouvoir.

À la suite de la gifle que constitue cette élection, des voix s'élèvent au sein du PS pour demander la démission de Jean Videnov, qui, fort de la domination socialiste au Parlement, n'a pas l'air de craindre la cohabitation avec un président UFD sans grands pouvoirs.

Chrono. : 25/05, 1/06, 3/11.

Roumanie

Depuis la révolution de décembre 1989, la Roumanie semblait imperméable à l'alternance démocratique, dominée qu'elle était par le néocommunisme d'Ion Iliescu, mâtiné de xénophobie et de dirigisme économique. Depuis six ans, alors que le pays s'enfonçait dans la misère, les investissements étrangers n'ont pas dépassé le milliard et demi de dollars, soit le chiffre le plus faible de la région. Dans ce contexte, 1996 marque un tournant de l'histoire roumaine : pour la première fois, aux élections municipales de juin, le pouvoir néocommuniste est déstabilisé ; il tombe définitivement au mois de novembre.

La situation économique est catastrophique et la paupérisation se généralise. Pauvre parmi les pauvres, la minorité rom (tsigane), forte de 5 millions de personnes (la plus forte minorité ethnique d'Europe centrale et orientale), est l'objet de nombreuses exactions de la part des autorités et des partis nationalistes. À la pauvreté roumaine s'ajoute, durant l'hiver 1995-1996, une très grave crise énergétique. La Roumanie, exsangue, obtient alors deux prêts de la Banque mondiale, pour un montant de 400 millions de dollars.

L'opinion n'attendant plus rien du pouvoir en place, l'opposition commence à préparer, dès le début de l'année, les législatives et la présidentielle de novembre : l'ancien Premier ministre Petre Roman, dissident de la formation du président Iliescu et président du Parti démocrate-Front du salut national (PD-FSN), annonce sa candidature dès le 3 février. Peu après, le PD-FSN se transforme en Union sociale-démocrate (USD), une formation de centre gauche qui se veut plus ouverte et accepte de mettre fin aux querelles stériles de l'opposition. En revanche, la coalition au pouvoir se délite. En mars, l'alliance entre le Parti de la démocratie sociale de Roumanie (PDSR, nationaliste) du président Ion Iliescu, et le Parti socialiste du travail (PST, ex-Parti communiste) vole en éclats, ce qui restreint encore la marge de manœuvre du PDSR, déjà minoritaire au Parlement. Aux municipales du 16 juin, l'USD, les conservateurs de la Convention démocratique de Roumanie (CDR), et les ultranationalistes du Parti de l'union nationale roumaine (PUNR) arrivent en tête.