Mexique, Amérique Centrale et Caraïbes

Après les graves difficultés économiques provoquées par la crise mexicaine, l'Amérique centrale connaît une année un peu plus stable. La loi Helms-Burton complique encore les relations de Cuba avec le grand voisin américain, tandis que, de manière chaotique, le modèle démocratique et libéral tend à se consolider dans le reste de la région.

Mexique

Après avoir subi en 1995 la pire des récessions connues par le pays depuis soixante ans, l'économie montre des signes de récupération. Le PIB augmente de 3 % au premier semestre, la balance commerciale est positive, les exportations en direction de l'Amérique latine (notamment du Chili et de la Colombie) augmentent considérablement, l'inflation (18,5 %) se réduit de moitié par rapport à 1995. Au début de février, alors que l'on disait le parti moribond, le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) remporte, aux dépens du Parti d'action nationale (PAN, opposition conservatrice), des élections triomphales en Basse-Californie, récoltant 12 sièges parlementaires sur 15 et s'assurant de 4 municipalités sur 5. Fin mars, le gouvernement annonce une série de mesures pour faire face à la croissance de la criminalité – en 1995, le nombre des délits a augmenté de 35 % ; parmi celles-ci, les plus significatives sont le recours aux écoutes téléphoniques, les dépositions de témoins anonymes, l'abaissement à seize ans de l'âge de la responsabilité pénale et la justice rendue par des magistrats masqués, un expédient mis en pratique en Colombie, puis étendu au Pérou.

Fin juin, un nouveau groupe armé apparaît dans l'État de Guerrero. Une centaine d'individus masqués qui se présentent comme des dirigeants de l'Armée populaire révolutionnaire (EPR) commémorent le premier anniversaire de l'assassinat de paysans par la police du Guerrero, près du hameau de Aguas Blancas, à 40 km d'Acapulco ; le groupe disparaît après avoir lu une « déclaration de Aguas Blancas » dans laquelle il annonce son intention de mener la lutte armée contre « un gouvernement anti-populaire qui défend les intérêts des financiers étrangers et des affairistes nationaux ». Les forces de l'ordre envoyées sur les lieux rentrent bredouilles, la région étant plongée dans le chaos provoqué par l'ouragan Boris. Ce nouveau groupe armé est accueilli par un désaveu général, y compris des zapatistes qui veillent à marquer leurs distances à son égard. La démonstration de l'EPR, survenue deux jours avant la présentation par le sous-commandant Marcos (dirigeant du mouvement zapatiste) d'un forum public pour la réforme de l'État au Chiapas, place effectivement les zapatistes et leurs alliés dans une situation embarrassante. Une saisie effectuée dans une cache d'armes, en juillet, permettrait d'établir un lien entre l'EPR et une organisation armée surgie dans les années 60, le PROCUP-PLD (Parti ouvrier clandestin union du peuple-Parti des pauvres), dont le principal dirigeant est emprisonné depuis 1990. À la veille du message à la nation du président Ernesto Zedillo, dans la nuit du 28 au 29 août, l'EPR lance une série de sept opérations dans quatre États (Oaxaca, Guerrero, Mexico, Michoacán), faisant 13 morts et 30 blessés. L'armée – selon certaines sources, 10 000 soldats – se déploie dans la Sierra Madre du Sud, zone d'accès difficile où les trafiquants de drogue se sont installés et où se pratique sur une vaste échelle la culture de la marijuana et du pavot. Dans le même temps, l'AZLN (Armée zapatiste de libération nationale), qui a organisé du 27 juillet au 3 août une « Rencontre intercontinentale contre le néolibéralisme et pour l'humanité », décide de suspendre ses négociations avec le gouvernement. Fin septembre, les autorités municipales de l'État de Chihuahua annoncent l'apparition d'un nouveau groupe armé, l'Armée populaire Villista (pour Pancho Villa). D'autres mouvements de guérilla sont signalés dans les États de Puebla, Hidalgo et Vera Cruz.

Chrono. : 16/02, 25/06.

Costa Rica

La désillusion de l'opinion publique à l'égard de la vie politique s'aggrave au Costa Rica, où la protestation contre les mesures d'austérité du président José-Maria Figueres est particulièrement virulente dans la fonction publique : 50 000 enseignants font grève pendant un mois, affrontant même la police fin juillet et, en août, une manifestation réunissant plus de 100 000 fonctionnaires est sévèrement réprimée à San José. La situation économique du premier semestre se présente mal : des inondations entraînent la perte de 15 à 20 % de la récolte de bananes, le taux de croissance est en baisse et le déficit budgétaire passerait de 0,5 % à 2 %.

Guatemala : la fin de la guerre civile

L'année s'annonce incertaine, le 7 janvier, lorsque Alvaro Arzú, un homme d'affaires candidat du parti conservateur, le Parti pour l'avancement national (PAN), gagne, grâce au vote des citadins, le second tour des élections présidentielles contre Alfonso Portillo, soutenu par l'ancien dictateur, le général Ríos Montt, chef du Front républicain guatémaltèque (FRG). Le pourcentage d'abstention élevé (plus de 60 %) est attribué au manque de crédibilité des partis. La guerre de guérilla menée par l'URNG (Union révolutionnaire nationale guatémaltèque, qui regroupe les quatre organisations de la guérilla) continue, le calendrier de paix semblant retardé d'un an. La coalition de gauche, partisane d'une intégration de l'URNG à la vie politique légale, n'obtient d'ailleurs que 6 sièges au Parlement (7,7 % des voix).