Journal de l'année Édition 1996 1996Éd. 1996

Chrono. : 16/02, 18/04, 19/04, 28/05, 17/07, 17/08, 7/09, 12/09.

Portugal

Moins crépusculaire que celle de son homologue espagnol, la carrière politique du Premier ministre portugais, Anibal Cavaco Silva, connaît néanmoins en 1995 un brutal coup d'arrêt. Après plus de dix années passées à la tête du gouvernement, A. Cavaco Silva doit en effet céder sa place au grand vainqueur des élections législatives du 1er octobre, le chef du Parti socialiste, Antonio Guterres. Au-delà de l'ample victoire remportée par les socialistes (près de 44 % des suffrages et 112 élus, contre 34 % et 88 élus au PSD), ces élections bouleversent le paysage politique portugais. Pour la première fois depuis la fin des années 70, le Parti social-démocrate (PSD, centre droit) ne sera pas représenté au gouvernement. Cependant, contrairement au PSD lors des législatives de 1987 et 1991, le Parti socialiste n'a ni obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, ni celle des sièges à l'Assemblée de la république, qui compte 230 députés. Le PS ne pourra pas s'appuyer sur une majorité aussi confortable que celle dont disposait le PSD depuis 1987. Mais la tendance à la bipolarisation de la vie politique autour des deux partis phares est confirmée. Seul le Partido popular, l'ancien CDS repris en main par l'ultranationaliste Manuel Monteiro, améliore sensiblement son score de 1991. Usé par quinze années de présence quasi ininterrompue au pouvoir, le PSD est contraint de procéder à sa rénovation. Elle ne s'opère pas sans douleur. Les difficultés qu'a rencontrées Fernando Nogueira pour s'imposer à la tête du PSD depuis son accession à la présidence au mois de février le prouvent. La rénovation est d'autant plus douloureuse qu'elle devra se faire sans, et peut-être contre, celui qui a été pendant dix ans le leader charismatique du PSD, A. Cavaco Silva, parti relever d'autres défis.

Après avoir annoncé, le 23 janvier, qu'il abandonne la direction de son parti, A. Cavaco Silva se déclare candidat à la présidence de la République à l'issue des législatives. Pour succéder en janvier 1996 à Mario Soares, auquel la Constitution interdit de briguer un troisième mandat consécutif, il devra affronter le maire de Lisbonne, candidat naturel du PS, Jorge Sampaio. C'est un combat à l'issue incertaine qui placera peut-être A. Cavaco Silva à l'orée d'une nouvelle carrière et le « cavaquisme » à l'aube d'une nouvelle ère. À moins que, contrairement à une règle non écrite qui veut que le président et le Premier ministre du Portugal ne soient pas du même parti, A. Guterres puisse compter sur la présence à Belem de celui qui l'avait précédé à la direction du PS, J. Sampaio. Reste encore une dernière inconnue : quelle sera l'attitude de Mario Soares ?

Chrono. : 16/02, 1/10.

Yves Léonard