Avec 1 198 milliards de francs, les recettes publiques ont progressé de 6 %. Si certains impôts ont été relevés (+ 6,7 milliards), les baisses l'ont toutefois emporté (− 15,3 milliards) et ont été réparties entre les entreprises (− 7,4  milliards) et les consommateurs (− 7,9 milliards). Les allégements fiscaux ont été destinés à soutenir les priorités de l'État. Il s'agissait d'encourager l'investissement sous toutes ses formes (baisse de l'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis, limitation de la taxe professionnelle, crédits d'impôt pour la recherche...), de favoriser les économies d'énergie (baisse de la TVA sur le fioul, rapidité d'amortissement...) et de lutter contre l'inflation (le taux majoré de la TVA a été ramené de 25 à 22 %). À l'inverse, pour des raisons d'équité et dans le cadre de la réduction des inégalités, d'autres impôts ont été augmentés (relèvement du plafond de l'impôt de solidarité sur la fortune ; taxation renforcée des plus-values immobilières réalisées sur les résidences secondaires ; suppression de l'exonération des plus-values sur les cessions de titres non cotés).

Grâce aux économies budgétaires qui compensent l'abandon des quelques recettes fiscales citées, le déficit budgétaire a été ramené de 90,2 à 80,2 milliards de francs. Mais, pour l'opposition, le budget 1991 a été fondé sur des hypothèses économiques jugées beaucoup trop optimistes : une croissance de 2,7 %, une inflation de 2,8 % et un baril de pétrole à 25 dollars. De plus, le projet de contribution sociale généralisée (CSG), qui doit être inclus dans la loi de Finances après discussions à l'Assemblée nationale, reste très contesté.

Dominique Colson

Politique économique

En 1990, le gouvernement a maintenu le cap de sa politique économique qui tend vers l'amélioration de la compétitivité par la maîtrise des prix et des coûts, par le renforcement de l'appareil productif (stimulation de l'investissement et de l'épargne) et par la stabilité du franc. En conséquence, une gestion prudente et rigoureuse de l'économie impliquant une politique budgétaire restrictive (par la maîtrise des dépenses publiques et la réduction du déficit), la mise en application de principes monétaires stricts (par le contrôle des agrégats monétaires et des taux d'intérêts réels élevés) et une politique des revenus prudente (par la désindexation et la modération des salaires) a été préconisée.

L'efficacité et la justice

Toutefois, l'économie allant mieux, le parti socialiste, qui s'appuyait sur un certain nombre d'études constatant la recrudescence des inégalités, a pu insister à partir du printemps pour que l'on soit plus attentif aux questions sociales (v. dossierVie sociale). Combiner efficacité économique et justice sociale est devenu l'objectif essentiel du gouvernement.

Mais la crise du Golfe a forcé les pouvoirs publics à réagir. Une stratégie « antichoc » visant à neutraliser les effets récessifs et inflationnistes d'un éventuel troisième choc pétrolier a été mise en place. Le projet de budget 1991 a été remanié (v. dossierBudget) et les tenants de la rigueur semblent maintenant l'emporter à nouveau. Leur objectif est de ne pas faire supporter aux entreprises l'essentiel du poids des prélèvements pétroliers. Au contraire, l'accent a été mis sur le renforcement des exigences de la compétitivité et sur la nécessité de contenir la hausse des revenus des particuliers et celle des dépenses publiques pour ne pas pénaliser l'effort d'investissement des entreprises.

De même, une attention toute particulière a été accordée à l'évolution des prix : l'encadrement de celui des carburants a été décrété pour la période du 8 août au 15 septembre avant que le taux majoré de la TVA ne soit réduit de 25 à 22 % et la politique monétaire a été assouplie pour tenir compte de la bonne santé du franc : en octobre, une nouvelle baisse de 0,5 point des taux directeurs de la Banque de France est intervenue après celles du mois d'avril (déjà deux fois 0,5 point) et l'allégement des réserves obligatoires des banques a été accepté afin de les inciter à baisser le coût du crédit.

Des décisions ont été également prises pour préserver l'emploi. Dans cet objectif, un troisième plan-emploi a été présenté le 19 septembre. Comme les précédents, il veut agir sur le coût du travail et sur la formation, mais il cherche aussi à lutter contre une grave pénurie de main-d'œuvre qualifiée.

Enfin, des mesures exceptionnelles en faveur des agriculteurs frappés par une crise sans précédent ont été annoncées les 31 août et 26 septembre. Elles doivent être financées en partie par le Crédit agricole.

Dominique Colson