Les grandes « expos » de 1990

Même s'ils commencent à s'en lasser quelque peu, les responsables des grands musées du monde s'ingénient toujours – ou encore – à proposer des expositions-spectacles qui attirent dans leurs murs de longues files de visiteurs.

Aux Pays-Bas, le centenaire de la mort de Van Gogh a été célébré par un ensemble de manifestations culturelles organisées autour d'une rétrospective prévue de longue date et annoncée à grand renfort de slogans publicitaires et touristiques. On avait alors prédit : « les tournesols vont faire de l'ombre aux tulipes » ; c'est ce qui s'est effectivement produit.

Van Gogh, Vélasquez, Titien et les autres

De tous les coins du monde, on s'est empressé de se rendre à Amsterdam revisiter l'homme à l'oreille tranchée. Cent vingt de ses tableaux étaient exposés, un peu froidement, au musée qui porte son nom ; dix douzaines d'œuvres, choisies en fonction de l'importance que le peintre lui-même leur accordait, ainsi qu'en témoigne notamment l'abondante correspondance qu'il échangea avec son frère Théo. Mais, en même temps, on ne prit pas toujours la peine de faire un saut au musée Kröller-Müller d'Otterlo, où 250 dossiers complétaient utilement cette commémoration en permettant de suivre encore mieux toutes les étapes de l'itinéraire fulgurant et tragique de l'artiste, de la Hollande à Auvers, en passant par Paris, Arles et Saint-Rémy. Cette double exposition devait symboliquement fermer ses portes le 29 juillet, jour anniversaire de la disparition du peintre.

Autre « grand-messe », cette fois à Madrid, pour Vélasquez, dont l'essentiel de l'œuvre avait été rassemblé au Prado. À cette occasion, les tableaux du peintre sévillan habituellement présentés sur les cimaises du célèbre musée madrilène se mêlaient à ceux qui provenaient de l'Escurial, de Londres ou de collections américaines. Ainsi étaient donc évoquées toutes les métamorphoses du style incomparable, mais néanmoins insaisissable, de l'auteur des « Ménines », depuis ses tableaux de jeunesse réalisés à Séville jusqu'aux portraits et aux compositions savantes peints à Madrid, à la cour de Philippe IV.

Mais on a également fêté bien d'autres phares et bien d'autres classiques de l'histoire de la peinture : Titien, à Venise (Palazzo Ducale) pendant l'été, puis à Washington (National Gallery), où, à l'occasion du cinquième centenaire de la naissance du « prince des peintres », une cinquantaine de ses tableaux dispersés dans le monde avaient pu être rassemblés ; Frans Hais, le maître incontesté du portrait au xviie siècle, dont quatre-vingts œuvres ont voyagé de Washington à Londres (Royal Academy) et de Londres à Haarlem (Frans Hais Muséum) ; Anton Van Dyck, cet autre Hollandais, dont seule la National Gallery de Washington a commémoré le 350e anniversaire de la mort ; Simon Vouet, le peintre de Richelieu et de Louis XIII, dont Paris a proposé au Grand Palais, pour le quatrième centenaire de la naissance, la première exposition monographique (nov. 90 – févr. 91). En une centaine d'œuvres importantes – tableaux, dessins, tapisseries –, celle-ci a tenté de dégager le style personnel de Vouet dont l'influence exercée en France et au-delà des frontières n'est pas toujours correctement évaluée. Ainsi, Mignard, que le musée du Louvre invitait à découvrir ou à redécouvrir au début de l'année, était un de ses élèves (janv.-avr.).

Symbolistes, intimistes et impressionnistes

Cette année, si les plus grands musées occidentaux se sont volontiers attachés à cerner au plus près la personnalité et le style de tel ou tel peintre classique, une remarquable exposition organisée par le musée des Beaux-Arts de Caen a proposé, au cours de l'été, d'analyser certains aspects iconographiques de leurs tableaux à travers le thème des « Vanités dans la peinture au xviie siècle ». Pleine de crânes et d'objets symbolisant les biens de ce monde, cette austère mise en perspective des contenus philosophiques et religieux de l'art a été également présentée à Paris à la fin de l'année (Petit Palais, nov. 90 – janv. 91).