Édouard Mattei

Épargne

L'épargne des français, qui avait recommencé à progresser en 1988, a atteint 12,5 % du revenu disponible en 1990, contre 11,7 % en 1987, mais reste encore bien en deçà du niveau atteint en 1978 (20,4 %). Elle se répartit entre l'investissement logement (9,2 %) et l'épargne financière (3,3 %). La désaffection pour l'immobilier et pour les liquidités (dépôts à vue, livrets) se confirme au profit de l'épargne contractuelle (notamment l'épargne logement) et surtout des placements financiers (avec le rôle très dynamique des SICAV et des FCP) et de l'assurance-vie. Les comportements se modernisent et deviennent plus souples : on diversifie et on arbitre d'un produit à l'autre selon la rentabilité offerte.

Cette année, les épargnants sont particulièrement attirés par deux produits. D'abord, par les SICAV court terme, principalement monétaires, qui cumulent rémunération avantageuse (environ 9 % l'an contre 4,5 % pour le livret A), liquidité et faible risque, et connaissent une véritable explosion, d'autant que la capitalisation possible des intérêts les rend fiscalement intéressantes ; ensuite, par le Plan d'épargne populaire (PEP), défiscalisé et librement rémunéré, qui remplace le PER depuis janvier 1990 et dont l'objectif est de favoriser l'épargne longue nécessaire à l'investissement et disponible lors de la retraite. Il remporte un grand succès, mais un quart seulement de l'argent ainsi placé correspond à de l'épargne nouvelle. Le livret A est particulièrement touché en dépit d'une rémunération positive et du relèvement du plafond de 80 000 à 90 000 francs en avril. De même, les titres à long terme connaissent un fléchissement : si les obligations sont toujours délaissées, les actions le sont à leur tour en raison de l'instabilité des marchés financiers.

Les ménages sont de plus en plus attirés par les produits librement rémunérés et se détournent des produits réglementés. Un rapport présenté par Benoît Jolivet en mars préconise la liberté de rémunération et la neutralité fiscale pour tous les produits de placements, sauf pour les deux principaux postes au profit desquels les Français économisent : le logement et la retraite. Après avoir ménagé les revenus de l'épargne pour éviter la délocalisation de cette dernière que la libre circulation des capitaux dans la CEE depuis le 1er juillet risque d'entraîner, le gouvernement s'inquiète du niveau insuffisant de celle des ménages.

Depuis cinq ans, la baisse de cette catégorie d'épargne a été compensée par la hausse de celle des entreprises (qui durait depuis 1983 mais qui semble s'arrêter) et par la réduction des besoins en financement des administrations (depuis 1985), de façon telle que l'épargne globale de la nation continue d'augmenter. Elle n'en reste pas moins insuffisante, comme le prouve la persistance du déficit des transactions courantes de la France.

Dominique Colson

Investissements

Cette année, l'investissement productif des entreprises a encore connu une croissance soutenue (6 % après 7,2 % en 1989). C'est le secteur de l'industrie concurrentielle qui a progressé le plus rapidement avec une hausse de 11 % (contre 7 % en 1989), suivi dans une moindre mesure par celui des commerces et des services (environ 7 %). Dans l'industrie, les biens d'équipement professionnels ont constitué l'élément moteur tandis que les biens intermédiaires et les biens de consommation ont semblé marquer le pas. Ce sont toujours les grandes entreprises privées qui ont investi le plus.

Les incertitudes nées de la crise du Golfe n'ont donc pas affecté le volume des investissements ; en revanche, elles ont conduit les entreprises à les réorienter vers la productivité et les économies d'énergie au détriment de la capacité. Toutefois, plusieurs éléments sont venus assombrir les perspectives d'investissement. Ils sont déjà perceptibles dès le second semestre : résultats des entreprises en baisse, taux d'autofinancement retombé à 73 % (contre 93 % en 1986), besoins de financement externe croissants mais de plus en plus coûteux en raison du niveau élevé des taux d'intérêt réels, ralentissement de la conjoncture mondiale sans compter l'éventuel troisième choc pétrolier.