Le clou du spectacle, retransmis en mondiovision, fut, dans la nuit du 14 juillet, la descente des Champs-Élysées par un immense cortège baroque constitué par une multitude de groupes venus du monde entier, chacun représentant un aspect caractéristique de sa culture ou un moment de son histoire, récente ou passée. La scénographie, due à Jean-Paul Goude, manquait d'unité, mais l'ensemble avait grande allure dans le scintillement des petites lumières individuelles portées par les participants dont la marche lente était scandée par une musique lancinante. Sur une estrade édifiée au pied de l'obélisque de la place de la Concorde, la grande cantatrice américaine Jessye Norman, drapée de tricolore, entonna une bouleversante Marseillaise. Le défilé prit fin avec un grand feu d'artifice.

Le 26 août, se déroula à l'Arche de la Fraternité la cérémonie commémorative du vote de la Déclaration des droits de l'homme. Le 20 septembre, à Valmy, avec trois ans d'avance sur la date de son bicentenaire, eut lieu une reconstitution de la célèbre bataille sous la pluie comme cent quatre vingt dix-sept ans auparavant. Enfin, le cycle des commémorations s'acheva, le mardi 12 décembre, avec le transfert au Panthéon des cendres du mathématicien Monge, du philosophe Condorcet et de l'ancien évêque constitutionnel du Loir-et-Cher, Henri Grégoire, l'ami des Juifs et des Noirs.

Les grandes liturgies d'État ont été loin de remplir tout le champ festif de la commémoration. Il faut y ajouter ce qui a été fait dans chaque village et dans chaque ville : les bals populaires du 13 juillet et les feux d'artifice du 14, mais aussi les animations de quartier, la décoration tricolore des magasins, les cortèges d'enfants des écoles déguisés en sans-culottes. Le Bicentenaire ne fut pas ignoré à l'étranger. Les rares Français présents à Maëstricht (Pays-Bas), le 15 juillet, eurent la surprise d'assister à une fête populaire révolutionnaire qui se tenait sur une des places de la ville avec guinguettes, orchestres de danse et personnages costumés. On invitait les spectateurs à savourer des tranches de melon... nappées de sauce mayonnaise !

Le Bicentenaire en images et en questions

Les arts du spectacle furent également mis à contribution. Le cinéma avec la Révolution française de Robert Enrico et Richard Heffron, une vaste fresque historique en deux parties, Les années lumière (sur la période 1789-1792) et Les années terribles (sur la période 1792-1794) ; le théâtre avec le spectacle de Robert Hossein, la Révolution ou la Mort, au Palais des Congrès ; la télévision avec des dizaines d'heures de programmes « révolutionnaires », parmi lesquels la reconstitution des procès de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Des peintres et des sculpteurs ont créé des œuvres originales sous le signe du Bicentenaire. C'est ainsi qu'une fresque monumentale de 470 m2 a été réalisée sur une voûte de la station de métro parisienne Chaussée-d'Antin, rebaptisée Chaussée-d'Antin-La Fayette, par Hilton Mc Connico sur le thème de « La Fayette, héros de la guerre d'Indépendance des États-Unis ». En 1990, une autre voûte de la même station sera peinte et représentera « La Fayette et la Révolution française ». Citons encore la création d'une tapisserie d'Aubusson consacrée à la Déclaration des droits de l'homme.

En France et à l'étranger, de nombreuses expositions, grandes et petites, ont été organisées, telles, pour n'en citer que deux parmi les plus importantes, la XXe exposition du Conseil de l'Europe, à Paris, dans les galeries du Grand-Palais, sur la Révolution française et l'Europe, et, à Nuremberg (RFA), dans le cadre prestigieux du Musée national germanique, l'exposition intitulée Liberté, Égalité, Fraternité, 200 ans de Révolution française en Allemagne, accompagnée d'un catalogue scientifique de plus de 800 pages. Tout au long de l'année, les spécialistes de la période révolutionnaire ont multiplié les livres, les articles de revue, les conférences et les colloques. Le 114e Congrès national des sociétés savantes s'est tenu à Paris, du 3 au 9 avril, avec pour thème principal « Les espaces révolutionnaires, xvie-xxe siècles ».