L'Office national de diffusion artistique a disposé d'un million de francs de plus qu'en 1987. Cet organisme, à la fois culturel et financier, redistribue la part du budget de fonctionnement qui lui est confiée, sous la forme de garanties de déficit ; il aide ainsi les compagnies dont le programme est riche. Un million de francs supplémentaire est octroyé au Service des informations internationales du ministère de la Culture, qui, en France ou ailleurs, organise des colloques, des stages, des tournées, etc., en coproduction avec l'étranger. En outre, la Délégation a investi l'Association française d'action artistique d'une mission spéciale en faveur de la danse.

Un art vivant

Ce vaste programme a donné naissance à des événements ponctuels destinés à rapprocher la danse du grand public. La plupart se sont passés à Paris, mais trois d'entre eux concernèrent aussi de façon originale la province et l'étranger. Renouant avec la tradition perdue de l'artiste nomade qui part à la rencontre de son public, « le Train de la Danse » réussit à attirer 144 000 visiteurs en dix-huit jours. Préparée par France-Rail, filiale de la SNCF, et sous le haut patronage du ministère de la Culture, cette opération a organisé le tour de France en trois semaines d'un train de six wagons-exposition, contenant des photos, costumes, vidéos, etc. Dans dix-sept villes, la gare a accueilli les écoles de danse de la région et leurs démonstrations. De son côté, le conseil régional d'Île-de-France a offert à vingt-cinq villes une grande rencontre avec douze compagnies de danse contemporaine. Spectacles et soirées, mais aussi répétitions ouvertes au public, dialogues avec les chorégraphes ont ponctué cette opération danse à domicile. Pour la circonstance, Carolyn Carlson jouait les guides.

Les Américains ont pu découvrir les costumes et les bijoux de scène des plus célèbres rôles de chanteurs et de danseurs du répertoire cher au palais Garnier, grâce à l'exposition itinérante organisée jusqu'en 1990 par la bibliothèque-musée de cette vénérable maison. À Vichy, ultime étape des Ballets russes en 1929, la Société fermière et IBM ont financé une exposition sur les peintres balletomanes : « les Grands Maîtres de la danse » ; soixante toiles de Marie Laurencin à Fernando Botero, en passant par Dali et par des dessins plus connus de Degas et de Rodin, transférées à Lyon à l'occasion de la IIIe Biennale internationale de la danse, puis dans le foyer du palais Garnier, ont été présentées au public. Aux Archives nationales, le ministère de la Culture a patronné « Danseurs et Ballet de l'Opéra de Paris depuis 1671 », une exposition qui rassemblait des documents administratifs, des dessins de costumes (dont ceux de Boquet) et des maquettes, et qui retraçait la vie dans les coulisses de l'Académie, depuis sa fondation. La danse a donc livré quelques-uns de ses secrets.

Celle-ci est un art vivant et, pour le prouver, certaines compagnies ont accepté de recevoir des classes d'écoliers pendant une semaine, pour leur faire vivre, hors de leur milieu scolaire, l'expérience du métier de danseur. Voir travailler les petits rats de l'Opéra de Paris dans les studios de la Julliard School coûtait 55 dollars, ce printemps, aux Américains pétris d'admiration. La danse s'est donc fait connaître en prenant le public à témoin. Mieux encore, grâce à Guy Darmet, directeur de la Biennale internationale de Lyon, trois bals historiques et un bal costumé en hommage à Jean Cocteau ont été organisés et complétés par des « ateliers » où l'on pouvait apprendre les pas. Pour montrer que la profession n'est pas sectaire, la célèbre virtuose de l'accordéon Yvette Horner a ouvert ces mémorables manifestations par un bal populaire. Danses paysannes et danses nobles se sont mêlées pendant trois semaines, retraçant quatre siècles de danse en France.

Danseurs et chorégraphes ont fait des efforts. Au public maintenant de prendre une décision. Il a certainement compris les termes du message qui disait : « Ne me quitte pas. »

Un vocabulaire varié

Les raisons de rester sont en effet nombreuses. Jamais le vocabulaire chorégraphique ne fut aussi varié, rajeuni par des influences aussi diverses que celles des acrobaties du cirque, du mime, des attitudes volées au cinéma ou des techniques sportives. Le danseur redevient un artiste complet, capable de jouer aussi la comédie, car l'humour est très présent dans l'inspiration des jeunes chorégraphes. Langages anciens et modernes ont fini de s'affronter et de s'entre-détruire. La danse demeure ce spectacle total cher aux Latins. Décors, costumes, maquillages et éclairages comptent toujours beaucoup. L'école française est techniquement à son zénith. Nos étoiles savent tout faire. Un tel éclectisme stimule les chorégraphes, dont l'imagination déborde. La danse sort des théâtres poussiéreux, elle utilise les décors naturels de la rue et entre dans l'espace extérieur.