Agriculture, écologie et environnement

Employant massivement les produits chimiques, l'agriculture intensive provoque pollutions et déséquilibres écologiques. Toutefois, les méthodes biologiques sont en train de gagner du terrain, et l'abandon des zones défavorisées, qui menace l'environnement, suscite des réactions de plus en plus vives.

Le 21 mars 1987 a été inaugurée l'Année européenne de l'environnement. Ainsi en ont décidé les chefs des États membres de la Communauté économique européenne, soucieux de voir mener des actions « concrètes et exemplaires » visant à sensibiliser les citoyens à la protection et à l'amélioration du cadre de vie ainsi qu'à la bonne gestion des ressources naturelles. Dans chaque pays, des comités ont été créés pour assurer la préparation et le déroulement de cette « année ». En choisissant le slogan « pour changer de décor, changeons d'abord », le Comité français, qui est présidé par Mme Simone Veil, a montré qu'il connaît le chemin restant à parcourir pour que la prise en compte de l'environnement devienne l'affaire de tous. Cette initiative vient après une série d'événements catastrophiques dont les conséquences n'ont pu qu'accroître les inquiétudes et renforcer la détermination à améliorer la gestion des ressources naturelles et la protection du milieu. Les noms de Seveso, Bhopal, Tchernobyl, Bâle sont dans toutes les mémoires. Ils rappellent que les efforts déployés pour dominer la nature et développer l'économie peuvent se trouver contrecarrés par des accidents aux effets incontrôlables sur le cadre de vie et sur la vie elle-même. Ainsi, il apparaît que des industries, des entreprises polluent, dégradent, détruisent et, dans quelques cas, peuvent même tuer. C'est pourquoi l'industrie et ses corollaires : la production et l'utilisation d'énergie, les transports, sont au centre des débats écologiques. L'agriculture tient une place plus effacée dans ces controverses. Pourtant, cette activité, qui a modelé la plus grande partie de l'espace habité de la planète, est encore étroitement dépendante de la nature. Si elle ne concerne plus que quelques pour cent de la population active dans les pays industrialisés, elle occupe des centaines de millions de paysans dans les pays en voie de développement.

L'agriculture et ses rapports avec la nature

Par une action de plusieurs millénaires, les sociétés humaines ont modifié leurs milieux naturels selon des modalités diverses, à l'aide de savoirs accumulés et en fonction de formes variées d'organisation sociale. C'est dans les pays industrialisés, grâce à une interaction complexe entre le développement agricole et le développement industriel, que l'artificialisation du milieu a été poussée le plus loin. Les sociétés paysannes y ont élaboré des mécanismes productifs souvent très complexes, par lesquels la combinaison du travail de l'homme avec les forces de la nature a permis de produire de plus en plus de biens avec de moins en moins de personnes. Dans la mesure où l'agriculture devait d'abord compter sur ses propres forces pour assurer son développement, la protection et le renouvellement des ressources naturelles constituaient une préoccupation fondamentale. L'accroissement de la fertilité des sols par l'autofourniture de la matière organique, le maintien de la richesse génétique au moyen de l'adaptation des variétés cultivées et des races aux spécificités du milieu et des systèmes de production, l'équilibre entre les espèces domestiques et les espèces sauvages : voilà autant d'objectifs que se sont assignés pendant des siècles nos agriculteurs et nos éleveurs.

Cela ne veut pas dire que l'agriculteur n'ait pas été un destructeur. Il à déforesté, il a lutté contre les parasites, contre les ennemis de ses récoltes et de son bétail, il n'a pas hésité à abandonner telle variété de plante lorsqu'une autre, plus productive, était disponible. Pour lui, la nature était tout à la fois un adversaire qu'il fallait dominer et un allié à ménager, la source de toute vie. Au cours des siècles, dans cette relation complexe, les progrès ont été lents. Mais, par ce long itinéraire, en améliorant ce rapport fait autant d'inquiétudes que d'espérances renouvelées, les sociétés paysannes ont diminué la précarité de leur existence, créé et entretenu un paysage rural devenu au fil du temps un patrimoine culturel collectif. Elles se sont non seulement alimentées elles-mêmes mais elles ont permis à une fraction croissante de la population de manger et de se vêtir. Leur action a été si profonde, si constante qu'on en est venu à considérer que la « nature » était ce milieu transformé, le résultat de cette interpénétration sans commencement et sans fin.