Michel-Louis Levy

Enseignement

Il avait déclaré dès sa nomination : « Il n'y aura pas de réforme Monory. » Mais les résolutions initiales de René Monory n'auront pas résisté au temps.

S'il n'y a point de réforme en apparence, que de « contre-réformes » en revanche ! Avec son bon gros sens pratique, le nouveau locataire de la rue de Grenelle avale les dossiers, consulte les partenaires et en tire des conclusions : abrogation de la loi Savary sur les universités, de la réforme Chevènement sur les lycées.

Son plus grand coup de balai, il le réserve cependant à la toute-puissante FEN (Fédération de l'éducation nationale) : suppression du corps des PEGC ; fin du « privilège » accordé aux instituteurs de distribuer en classe les assurances scolaires de la MAE (Mutuelle assurance élèves, proche de la FEN) ; modification des conditions de mutation des enseignants ; création d'un statut de directeurs d'école et retrait des personnels « mis à disposition » des associations par l'Éducation nationale (la plupart font partie de « l'orbite » FEN).

Ironie du sort, c'est sur un dossier qu'il n'avait pas souhaité rouvrir – la réforme des universités – que René Monory va essuyer un brutal coup d'arrêt. Le projet d'Alain Devaquet, ministre délégué à l'Enseignement supérieur, qui prévoit entre autres dispositions une élévation des droits d'inscription et une officialisation de la sélection, provoque en effet la colère des étudiants. Durant trois semaines, le flot de la jeunesse monte jusqu'à submerger le gouvernement et l'obliger à faire machine arrière. Revanche de la FEN, qui saisit alors la balle au bond et appuie de toute sa force les revendications étudiantes. Déstabilisé, René Monory voit l'ensemble de son action menacée. Doté d'une marge de manœuvre considérablement rétrécie, il n'a d'autre ressource que de revenir à sa philosophie initiale et déclare : « Première réforme à réaliser dans l'Éducation nationale : ne plus faire de réformes. »

Christian Makarian

Presse

Malgré la loi d'octobre 1984 visant à garantir la transparence et le pluralisme des entreprises de presse, Robert Hersant, début janvier, a pris le contrôle du Progrès de Lyon, et s'est assuré de ce fait le monopole sur la région Rhône-Alpes. Il écrit dans un éditorial, au lendemain de cette opération : « parfois, pour ne pas être en retard d'une guerre, il convient d'être en avance d'une loi... » Il fait construire à Paris, dans le XVIIe arrondissement, un studio de télévision ultrasophistiqué, dans l'optique de son entrée dans le capital de TF1. Pendant ce temps, toujours à Lyon, la guerre fait rage. Libération lance en septembre un quotidien spécifique (qui augmentera d'ailleurs ses ventes de 10 000 exemplaires sur la région). Lyon-Libération est destiné à rétablir partiellement le pluralisme. Quelques jours avant son lancement, Lyon-Figaro fait son apparition... Et les grèves des ouvriers du Livre se succèdent au détriment de Lyon-Libération...

À Paris, la bataille fait rage autour de l'audiovisuel, dont deux chaînes vont être redistribuées. Les groupes de presse, soucieux de ne pas rater un rendez-vous, mais aussi inquiets pour leurs ressources publicitaires, s'organisent. Les Éditions mondiales (Télé Poche, Nous Deux...), Jimmy Goldsmith (l'Express), et d'autres tentent de participer aux tours de table. Des éditeurs s'associent : Pluricommunication regroupe le Monde et quatre quotidiens régionaux, dont Ouest-France ; Set-Presse réunit une trentaine d'éditeurs, dont Bayard-Presse et la Voix du Nord, s'assurant un investissement potentiel de 100 à 150 millions de francs.

Au milieu de cette agitation, Daniel Filipacchi, vice-président du groupe Hachette et responsable du secteur presse, connaît un revers de taille avec la chute de 7 Jours Madame, contraint au retrait par Femme Actuelle, patronné par Axel Ganz. Pendant ce temps, Elle-USA, lancé avec Murdoch, crève les plafonds de diffusion et fait des petits en Europe.

Joseph Vebret

Radio

Deux mots résument l'évolution de la radio en France durant l'année 86 : libéralisme et banalisation. Le libéralisme s'est manifesté par l'amorce du désengagement de l'État. L'opération concerne les radios périphériques. L'État participe à leur capital, par l'intermédiaire de la Sofirad. Première étape : la vente, début mars, au groupe Hachette, des 34,19 p. 100 que la Sofirad détenait dans le capital d'Europe 1-Communication.