Si l'encyclique Dominum et vivificantem, consacrée à l'Esprit-Saint, publiée le 30 mai, est en fait une méditation personnelle sur la Trinité et, par voie de conséquence, sur l'Église inspirée par l'Esprit de Dieu, l'Instruction sur la liberté chrétienne et la libération, rendue publique le 5 avril par la congrégation pour la Doctrine de la foi, sort des sentiers battus : car, si elle insiste, une fois encore, sur le dialogue et la concertation nécessaires dans les situations d'oppression, spécialement en Amérique latine, elle n'exclut pas la nécessité, en certains cas, du recours des opprimés à la résistance, passive ou active. Ce qui constitue une nouveauté remarquable dans le développement de la théologie de la Libération, abordée jusque-là par l'Église romaine avec d'extrêmes réserves, qu'on retrouve au niveau des rapports personnels avec Rome des théologiens de la Libération.

En général, d'ailleurs, la curie reste méfiante à l'égard des théologiens considérés par elle comme trop hardis. Ainsi, l'Américain Curran, est privé de chaire en raison du « caractère dangereux » de son enseignement en matière sexuelle ; le Néerlandais Schillebeeckx, le 15 septembre, pour la quatrième fois, fait l'objet d'une « notification » sévère de la part du cardinal Ratzinger, préfet de la congrégation pour la Doctrine de la foi.

Si, le 27 octobre, par un geste sans précédent, Jean-Paul II rassemble, à Assise, en un « sommet », marqué par la prière et le jeûne en faveur de la paix et de la fraternité universelles, les représentants de toutes les religions, le problème du sacerdoce consacré des femmes continue à se heurter à l'opposition absolue de l'Église romaine, comme en témoigne, en juin, le vif échange de lettres entre l'archevêque de Canterbury et le cardinal Willebrand, président du secrétariat romain pour l'Unité des chrétiens.

Cette attitude contrastée se retrouve au cours des trois voyages, hors d'Italie, accomplis par Jean-Paul II en 1986. En Inde (1er -11 février), le pape se fait l'avocat des démunis, qui pullulent dans ce pays, tout en rappelant l'essentiel de l'éthique chrétienne, pourtant très différente de celle de l'hindouisme. En Colombie (1er-7 juillet), il insiste sur les liens de subsidiarité qui doivent être maintenus entre riches et pauvres, tout en souhaitant la libération de ceux-ci. À Lyon, Taizé, Paray-le-Monial, Ars, Annecy (4-7 octobre), l'exaltation du culte du Sacré-Cœur et de la spiritualité traditionnelle du patron des prêtres français, saint Jean-Marie Vianney, et de saint François de Sales, s'accompagne d'un appel à l'œcuménisme le plus large et le plus fraternel et à la nécessité du service des pauvres, magnifiés en la personne d'Antoine Chevrier, fondateur des prêtres du Prado, que le pape béatifie solennellement en présence de 300 000 personnes réunies à Lyon.

Protestantisme

Du 18 au 21 mai, à Genève, est commémorée l'adoption, par la ville de Calvin, le 21 mai 1536, de la Réforme. Cette commémoration, marquée notamment par un culte solennel et par une cérémonie au Mur des réformateurs, donne l'occasion aux réformés venus du monde entier de célébrer la pérennité de l'œuvre calviniste et de mettre en lumière l'apport du protestantisme à la civilisation moderne avide de tolérance, de liberté, d'esprit critique, mais aussi de spiritualité authentique.

Judaïsme

Le grand événement de l'année 1986 est de caractère œcuménique, on peut même dire insolite et historique ; il s'agit de la visite que, le dimanche 13 avril, Jean-Paul II fait à la synagogue de Rome. Même si les ombres sont encore nombreuses au tableau des relations judéo-chrétiennes, le pape franchissant, le premier dans l'histoire, le seuil d'une synagogue, lisant les psaumes près de la Théba, là où sont conservés les rouleaux de la Torah, près du chandelier à sept branches, vient éclairer ce tableau d'une lumière absolument nouvelle. Malgré quelques réticences – le pape n'a parlé ni de « repentance chrétienne » ni de la reconnaissance par le Vatican de l'État d'Israël –, cette visite est fortement ressentie et saluée avec joie par le judaïsme tout entier.