Mais, du projet précédent, le gouvernement de M. Chirac garde trois principes : l'unité de la fonction publique territoriale, la mobilité des agents, et enfin des garanties de carrière.

Comment seront recrutés les agents ? Par concours, selon le sacro-saint principe de la fonction publique. Mais un candidat reçu ne sera pas automatiquement engagé et nommé. Il faudra qu'il soit recruté par le maire ou le président du conseil régional ou général à partir d'une liste d'aptitudes établie par le jury. Le gouvernement n'a pas voulu qu'un maire, par exemple, se voit imposer un candidat qu'il n'aurait pas choisi ou soit l'objet d'une sanction financière s'il refusait le candidat. Si le texte est adopté par le Parlement, il sera créé un Centre national de la fonction publique territoriale chargé de la formation, des concours, de la mise en place d'une « bourse de l'emploi », du déroulement de carrière des fonctionnaires des grades les plus élevés ; des centres départementaux, voire interdépartementaux, s'occuperont de la gestion technique des personnels employés dans les communes de moins de 200 habitants.

S'occuper des fonctionnaires, c'est bien, mais il ne faut pas oublier les élus eux-mêmes. Reparler du statut des élus locaux et régionaux, c'est réveiller un serpent de mer – ce que font tous les gouvernements successifs sans parvenir à traiter à fond la question. Pourtant, à l'initiative des gouvernements socialistes de 1981-1986, une loi qui limite le cumul des mandats sera mise en application en 1987. Et l'actuel ministre chargé des collectivités locales la juge pour sa part tout à fait judicieuse.

Il faut, de plus, permettre à un nombre de plus en plus grand de salariés d'entreprises privées ou nationales de s'engager dans la vie publique. C'est pourquoi le gouvernement a ouvert une négociation avec le CNPF sur la question. Les salariés devraient pouvoir obtenir deux sortes de crédits d'heures pour exercer un éventuel mandat, le premier crédit étant pris en charge par l'entreprise et la seconde tranche par le salarié lui-même.

Les élus demandent aussi que soient réglés les problèmes de leurs indemnités et de leur retraite. M. Marcel Debarge, sénateur socialiste, avait été chargé de réfléchir à la question, mais ses propositions de revalorisation des indemnités auraient abouti à une « ardoise » de quelque 10 milliards de francs. Une amélioration plus immédiate pourrait être obtenue en revanche en ce qui concerne les retraites complémentaires.

Il ne faut pas que les Régions débordent le cadre qui leur a été fixé et qu'elles alimentent une nouvelle bureaucratie. Elles ne doivent pas se substituer ou se surajouter à des collectivités locales qui ont l'habitude de la gestion, a déclaré en substance M. Chirac à la mi-octobre à la Réunion, devant le congrès des présidents de conseils généraux. 1987 dira si la décentralisation enregistre une pause, un recul ou au contraire une consolidation. De toute façon, changer des habitudes administratives et politiques séculaires de centralisme est une affaire de volonté, de constance, sur plusieurs générations.

François Grosrichard

Un nouveau cours pour l'aménagement du territoire

Ceux qui pensaient que l'arrivée d'un nouveau gouvernement en mars 1986 modifierait le cours de l'aménagement du territoire on dû être déçus. A la fin de l'année, le délégué, M. Jacques Sallois, ancien directeur du cabinet de M. Jack Lang, était toujours en poste. Le ministre de l'Aménagement du territoire, du Logement et de l'Équipement n'avait toujours pas pris d'orientations très marquées, sauf à accepter une amputation considérable du budget des primes et à réorienter ses crédits pour 1987 sur les infrastructures routières. Mais, surtout, tout le monde est resté jusqu'au 18 novembre dans l'attente du rapport d'Olivier Guichard, qui avait été sollicité fin mai par le nouveau ministre, M. Pierre Méhaignerie, pour définir clairement les priorités, et énumérer aussi les « non-priorités », étant entendu qu'il faut désormais compter sur trois faits nouveaux : la décentralisation, la faible croissance économique, la dimension européenne.