Jean-Pierre Chevènement devient ministre de l'Éducation nationale. Fin août, il annonce des dispositions « simples et pratiques », que les dirigeants de l'enseignement catholique accueillent dans un climat d'apaisement. J.-P. Chevènement reprend à son compte les points d'accord entre les deux parties. La loi Debré, modifiée en 1977 par la loi Guermeur, revient à l'honneur. Concession à l'école privée : le contrat simple, moins contraignant, survit. Mais la nomination des maîtres échappe à l'initiative des chefs d'établissement. Collèges et lycées privés, en vertu de la décentralisation, pourront passer contrat avec départements et régions.

Chaque camp s'accommode de la nouvelle donne. Une page se tourne. La gauche a frôlé le pire.

Charles Vial

Information : l'enjeu culturel

Presse, radios, ancienne et nouvelle télévision, satellites... Le débat s'amplifie avec le développement des moyens de communication. En toile de fond, les libertés et les diverses façons d'en user.

Une nouvelle ordonnance

Cent trois ans après la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la législation a fait une nouvelle avancée, après quarante ans de vide juridique. La fameuse ordonnance du 26 août 1944, qui interdisait notamment à une même personne d'être propriétaire de plus d'un quotidien, n'avait pas été appliquée, et les concentrations allaient bon train à Paris et dans les provinces, au point que le groupe de Robert Hersant avait pu prendre le contrôle de dix-huit quotidiens d'information politique et générale. Trop, c'est trop, avait décidé le gouvernement à l'automne de 1983, inquiet de la crise persistante de la presse quotidienne parisienne et des appétits du Citizen Kane français.

La longue bataille politique qui s'ensuivit n'a pas fait reculer le pouvoir sur les principes, sinon sur leurs applications. Le texte adopté finalement en... quatrième lecture par l'Assemblée nationale et promulgué le 23 octobre 1984 est en retrait sur les intentions initiales et quelque peu alambiqué. On en retiendra toutefois l'obligation de transparence — les lecteurs sauront désormais qui édite quoi —, la reconnaissance de l'équipe rédactionnelle comme entité de base d'une publication — un journal, c'est d'abord ses journalistes — et la définition de certains seuils de concentrations pour les quotidiens. Toutefois, le Conseil constitutionnel ayant ôté du champ d'application de la loi les situations existantes, on aboutit à ce paradoxe que nul autre que R. Hersant ne peut désormais posséder un tel empire... sauf si la justice le condamne, puisqu'il reste inculpé, ainsi que divers de ses prête-noms, d'infractions à l'ordonnance de 1944.

Autre événement important

Le second événement majeur est indiscutablement le lancement, le 4 novembre, de la quatrième chaîne nationale de télévision, à péage celle-ci, Canal Plus. C'est le premier pas, important, vers l'abondance de programmes, français ou étrangers, que réclament les téléspectateurs. Il y a eu pourtant, là encore, bien des critiques. À gauche, certains ont reproché de faire une chaîne de divertissement (cinéma, sports, variétés), plutôt qu'une chaîne culturelle et de communication sociale. À droite, on a déploré que Canal Plus, société de droit privé, soit en fait contrôlée par l'État à travers ses principaux actionnaires (groupe Havas, banques...). Et le démarrage de la chaîne a été entaché de difficultés techniques pour certains abonnés, à cause du décodeur qui permet de décrypter les images.

Il n'empêche : Canal Plus est bien là, avec plus de 200 000 clients dès les premiers jours, et en marche vers le million et demi d'abonnés qu'elle recherche. Un beau succès pour François Mitterrand et son ami André Rousselet, P-DG de la quatrième chaîne et président du groupe Havas, qui avaient promis ce plus aux Français.

Mais ce n'est qu'un début

Ce qui se prépare maintenant est d'une autre envergure. Le plan de câblage de la France (adopté le 3 novembre 1982) a marqué le pas en 1984, relançant du même coup le débat sur les télévisions libres, par voie hertzienne. Après avoir libéralisé les ondes radio, et accepté finalement l'introduction de la publicité sur les radios locales privées qui le souhaitent, le gouvernement va-t-il faire un pas de plus ? Ce serait sans doute compromettre son propre plan de développement à travers le câblage, avec le risque d'un développement anarchique à l'italienne, qui a fait un tort considérable de l'autre côté des Alpes, ruinant en particulier la production cinématographique.