La junte militaire assiste, impuissante, à la destruction des principales infrastructures : ponts — dont le célèbre Pont d'or, détruit par la guérilla en octobre 1981 — routes, voies ferrées inutilisables pour un tiers du réseau, centrales thermiques.

La situation économique se détériore. Le PNB a diminué de 25 % en trois ans, les capitaux s'évadent (3 milliards de dollars en deux ans), les caisses sont vides. L'inflation atteint 50 % en 1981 et le chômage touche 17 % de la population, cependant que le budget de la Défense est augmenté de 70 %.

Une guerre civile meurtrière

Plus de 30 000 morts — civils pour la plupart — et un demi-million d'expatriés : tel est le bilan de deux ans de guerre civile (fin 1979-fin 1981), selon l'Association latino-américaine de défense des droits de l'homme. D'autres chiffres complètent l'effroyable bilan de ce petit pays d'Amérique centrale : 93 % des enfants d'âge scolaire souffrent de malnutrition et le PNB a baissé de 13 % depuis décembre 1980.

Guérilla

Faute de moyens, de compétences, faute de paix également, les réformes promises, notamment la réforme agraire, ne sont pas réalisées. Un rapport accablant de Nations unies montre que 5 % de la population disposent de 21 % du revenu national, qu'il existe 40 % d'analphabètes et 1 médecin pour 3 650 habitants.

Confortée par la déclaration franco-mexicaine du 28 août 1981 reconnaissant sa représentativité politique, bénéficiant selon toute vraisemblance du soutien cubain — par Nicaragua interposé —, la guérilla estime, en janvier 1982, contrôler le quart du territoire, toute la frange nord et des poches au nord et à l'est de la capitale.

Elle réussit, le 27 janvier, à détruire une partie de l'aviation gouvernementale sur une base aérienne proche de San Salvador. Le Front Farabundo Marti de Libération nationale (FMLN), qui réunit l'ensemble des guérilleros (Journal de l'année 1980-81), disposerait de 6 000 combattants et 20 000 miliciens.

Pour les États-Unis, l'enjeu est considérable. Alors que la guérilla est toujours active au Guatemala et se développe au Honduras, que le Costa Rica est sans armée, le passage du Salvador aux mains des guérilleros peut entraîner celui de toute la région.

Aide US

L'aide militaire et économique américaine est renforcée (elle atteindra 300 millions de dollars en 1982) et des conseillers (environ 10 % des effectifs des officiers salvadoriens) viennent seconder une armée insuffisamment encadrée. Le général Haig dénonce vigoureusement l'aide extérieure fournie à la guérilla. L'Argentine et le Venezuela reconnaissent leur soutien à la junte.

Il existe des risques réels de généralisation du conflit. La condamnation, le 3 décembre 1981, par l'ONU de toute ingérence extérieure, reprise par le pape le 28 février 1982, n'a pas le moindre résultat, pas plus que l'offre de médiation de l'archevêque de San Salvador.

Lancée par le président Duarte en mars 1981, l'idée d'élire une Assemblée constituante qui choisirait un nouveau gouvernement apparaît comme la seule issue politique au drame. La victoire du parti démocrate-chrétien (PDC), celui du président, permettrait en effet de légitimer les options réformistes de la junte aux yeux de la droite, tout en affaiblissant la guérilla.

Cette perspective ne peut que séduire les États-Unis, qui pourraient alors renforcer leur aide à un gouvernement plus démocratique. Le FDR, qui regroupe depuis avril 1980 les diverses organisations de gauche (Journal de l'année 1979-80), refuse cependant de participer aux élections prévues pour mars 1982, estimant que les conditions de liberté et de sécurité ne sont pas réunies. Et le FMLN annonce la poursuite des combats, renforçant les opérations de harcèlement et d'intimidation à la veille de la consultation. La guérilla réussira le 17 juin 1982 à capturer le vice-ministre de la Défense, après avoir abattu l'hélicoptère qui le transportait.

Campagne

Pour des raisons évidentes de sécurité, la campagne se déroule de manière presque clandestine (seules les têtes de liste sont rendues publiques), radio et télévision remplaçant le contact direct des réunions. La compétition ne concerne que le PDC et 5 partis de droite, dont l'Alliance républicaine nationaliste (ARENA) du commandant d'Aubuisson.