Le gouvernement français révise ses objectifs énergétiques à long terme. Alors que la commission de l'énergie du VIIIe Plan préconisait de ramener la part du pétrole dans la consommation à 40 % en 1990 (au lieu de 67 % en 1973 et 57 % en 1979), celle-ci ne serait plus que d'environ 45 % dès 1985 et tomberait aux environs de 30 à 33 % en 1990. Le nucléaire passerait de 5 % en 1980 à 20 % en 1985 et 30 % en 1990 ; le gaz naturel aurait 15 à 17 %; le charbon, 13 à 15 %. Enfin, les énergies renouvelables totaliseraient 10 %, se répartissant par moitié entre l'hydraulique et les énergies nouvelles (solaire, géothermie, biomasse).

Rentabilité

La croissance relativement importante (par rapport à celle d'autres pays industriels) de l'électronucléaire correspond à la difficulté, pour la France, de tirer parti de nouvelles ressources de combustibles fossiles. Les hausses successives du prix du pétrole — atteignant 30 dollars le baril au printemps 1980 — rapprochent du seuil de rentabilité des gisements jusqu'ici dépourvus d'intérêt économique : schistes bitumineux, sables asphaltiques, réserves d'huiles lourdes.

Leur mise en valeur dépend toutefois du développement des technologies d'extraction des hydrocarbures lourds : aux États-Unis, le programme énergétique du président Carter prévoit un budget de 20 milliards de dollars pour cet objectif. On estime que, vers 1990, 1 500 000 barils par jour (soit l'équivalent de la production prévue par le Koweït pour 1980) viendront de ces nouveaux gisements.

Retour au charbon

Le principal concurrent du nucléaire pour remplacer le pétrole est toutefois le charbon, dont les réserves utiles sont au moins dix fois supérieures à celles du pétrole. Là encore les perspectives dépendent de l'évolution technologique : transport sur lit fluidisé, gazéification, liquéfaction. L'Agence internationale de l'énergie se donne pour objectif de tripler la production mondiale de charbon d'ici l'an 2000. La France ne participe guère à ce retour au combustible qui permit la révolution industrielle. Le charbon qu'elle tire encore de son sous-sol lui coûte le double de celui qu'elle importe, et qui a représenté en 1979 les trois cinquièmes de la consommation nationale. Cette dernière continue à décliner, malgré la conversion par EDF de tranches thermiques brûlant du fuel et l'incitation à l'industrie privée de revenir à la consommation du charbon.

Outre l'investissement qu'exige la transformation des chaudières, le charbon, très polluant, appelle des dépenses supplémentaires de protection. Un colloque organisé par l'INSERM à Paris, en janvier 1980, sur les risques sanitaires des différentes énergies a mis en lumière une constatation inattendue : c'est le charbon qui est le plus dangereux, pour le public comme pour les travailleurs. Viennent ensuite, par ordre de danger décroissant, le fuel, le nucléaire et le gaz naturel. Aux États-Unis, qui possèdent 30 % des réserves mondiales, l'exploitation de nouvelles mines est retardée par l'obstruction des écologistes. Par ailleurs, le transport vers l'Europe ou le Japon de charbon américain ou australien suppose la construction de navires de fort tonnage et de nouvelles installations portuaires.

Hydroélectricité

Les petits cours d'eau représentent en France un important potentiel pour des microcentrales autour de 2 000 kW, qui n'intéressent pas EDF.

Début mai 1980, une loi relève de 500 à 4 500 kW le seuil au-dessous duquel les particuliers et les collectivités locales peuvent installer une centrale. Les associations de pêcheurs et de défenseurs de l'environnement s'inquiètent des conséquences d'une multiplication des petits barrages.

Éoliennes

À Ouessant, EDF a inauguré, le 10 octobre 1979, un aérogénérateur d'une puissance nominale de 100 kW, pouvant atteindre 140 kW avec des vents de plus de 52 km à l'heure. Il fournit de 10 a 20 % de la consommation de l'île. En Caroline du Nord, les Américains mettent en service une éolienne à axe horizontal de 1 MW. Au Québec, la société Canadair construit le plus puissant aérogénérateur au monde : 3,8 MW, rotor à axe vertical, hauteur totale 110 mètres. Jusqu'ici, les pales dos éoliennes de grandes dimensions — verticales ou horizontales —, construites dans divers pays (France, États-Unis, Danemark, Canada), avaient été brisées par le vent.

Géothermie

Cinq forages sont entrepris à l'instigation du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Trois d'entre eux intéressent le Bassin parisien. À Saint-Denis-en-Val, dans le domaine de Melleray, 15,7 ha de serres seront chauffées par un doublet exploitant la nappe aquifère du trias. La même nappe chauffera, à Cergy-Pontoise, 2 396 logements et 1 666 locaux divers. Ces deux opérations reçoivent le soutien financier de la CEE. À Coulommiers, la nappe du dogger, déjà utilisée en divers endroits du Bassin parisien, chauffera 1 043 logements, un hôpital et deux groupes scolaires. À Jonzac (Charente-Maritime) et à Dax (Landes), des forages profonds alimenteront le chauffage urbain.

Solaire

Le mélange d'espérances et d'incertitudes qui caractérise l'essor des énergies renouvelables se reflète bien dans le secteur solaire. La Sofretes, société française spécialisée dans les centrales thermodynamiques, dont les principaux actionnaires sont le CEA et Alsthom-Atlantique, doit licencier, en mars 1980, le quart de son personnel. Elle continue à prendre part à la construction des centrales solaires d'Ajaccio et de Carcassonne (Thémis) commandées par le COMES pour EDF (Journal de l'année 1978-79), mais, plutôt que sur les grandes centrales thermodynamiques, l'intérêt semble se porter vers la conversion photovoltaïque, à laquelle la Sofretes elle-même pourrait se consacrer. Elle y rencontrera de nombreux concurrents, dont Pechiney-Ugine-Kuhlmann et Thomson-CSF, qui ont signé en mars un accord de développement en commun de technologies nouvelles de piles au silicium.