La crise aggrave les disparités monétaires qui perturbent fortement le fonctionnement de l'Europe verte, la seule véritable réalisation communautaire opérationnelle.

Les montants compensatoires monétaires atteignent des niveaux intolérables. Ceux de la Grande-Bretagne frisent les 40 % en avril 1978. Cette situation rend très difficile l'accord sur les prix agricoles 1978-1979. D'autant qu'il s'accompagne d'une série de mesures destinées à préparer l'élargissement. La négociation commencée le 12 décembre 1977 se termine cinq mois plus tard.

La négociation est dure, car il s'agit moins de décider d'une augmentation générale des prix que du rajustement des monnaies vertes, donc d'une réduction des montants compensatoires monétaires. L'objectif est de rapprocher les prix intérieurs des différents pays, plus éloignés les uns des autres qu'avant la mise en œuvre de la politique agricole commune.

La grande affaire est donc le démantèlement de ces montants compensatoires monétaires (MCM) dont les effets provoquent des distorsions de concurrence, notamment dans le secteur du porc. Pour protester contre les importations subventionnées, des manifestations, non violentes, ont lieu à travers la France.

La dépréciation continuelle du franc fait progresser les MCM — ils étaient de 2,6 % en 1976 — jusqu'aux élections législatives. En février, la France demande à Bruxelles le gel de ses MCM. Ce qui est accepté pour quelques jours. Dès la fin de cette trêve, les MCM bondissent de 17 à 21,5 %. Début mars, ils doivent passer à 23 %. Le ministre de l'Agriculture se rend à Bruxelles afin d'obtenir leur blocage, Paris soulignant que la chute du franc est due à l'incertitude politique. La Commission refuse cet arrangement, propose une dévaluation du franc vert et augmente les montants compensatoires.

Accord

La France refuse d'appliquer cette augmentation au mépris des règlements communautaires. C'est la crise. Les Neuf se saisissent du dossier et trouvent une solution permettant aux MCM français de ne pas dépasser 21,5 % pendant la période électorale. La France doit accepter une dévaluation du franc vert de 1,2 %, ce qui augmente les prix de 1 % et diminue les montants de 1,5 %. Après les élections, le franc remonte, permettant aux montants compensatoires monétaires de diminuer encore. Ainsi reviennent-ils progressivement à 14,7 % lors de la négociation finale sur les prix.

L'accord est obtenu le 12 mai. L'augmentation générale des prix est, pour l'ensemble de la Communauté, de 2,25 % en unités de compte, ce qui donne une moyenne de 1,98 % pour les prix français. Cette faible augmentation comble les voeux de Paris au détriment des agriculteurs étrangers, notamment allemands. À cette augmentation, s'ajoutent les conséquences d'une nouvelle dévaluation du franc vert de 3,6 %. Les MCM sont diminués de 4,2 %, ce qui les ramène à 10,5 %. Sauf pour le porc, pour lequel le franc vert est dévalué du double, ce qui abaisse les montants pour ce secteur à 6,2 %. Mais, après quelques semaines, les prix de marché remontent en France, les importations reprennent, soulevant de nouvelles protestations des éleveurs.

Grâce aux trois dévaluations du franc vert (2,5 + 1,2 + 3,6, soit 7,3 %) et à l'augmentation communautaire (1,98 %), la progression des prix agricoles français est, en moyenne, supérieure à 9 % pour la campagne 1978-1979.

Les industries agricoles et alimentaires

Dès l'annonce de la libération des prix industriels, les attaques des chefs d'entreprises privées contre la coopération se font plus vives. Malgré la renaissance de cette guerre de religion, les investissements français à l'étranger sont, avec 244 millions en 1977, en augmentation de 35 % sur ceux de l'an passé. En revanche, les investissements étrangers en France stagnent avec 298 millions et + 8 % en francs courants.

En février 1978, un conseil des ministres prend plusieurs décisions destinées à mieux valoriser les richesses agricoles du pays. 50 millions de crédit sont dégagés afin de réaliser des opérations exemplaires. La création d'un Institut privé international de gestion agro-alimentaire est annoncée. C'est chose faite quelques semaines plus tard.