En juillet 1977, des experts des Nations unies discutaient de ce problème à Monaco. Dans le même temps, au congrès des enseignants de biologie réuni à Poitiers, le professeur J.-F. Boison, de l'Académie de médecine, déclare : « Plutôt que de manifester contre le nucléaire ou le pétrole, on ferait mieux de se battre contre le développement des émissaires, ces tuyaux que l'on installe en mer pour rejeter les déchets. En France, il y a chaque année quinze mille cas d'hépatite virale provoqués par les déversements des égouts. »

Rhin

Un rapport du laboratoire central d'hygiène alimentaire, organisme dépendant du ministère de l'Agriculture, signale (juillet 1977) que 28 % des poissons péchés dans le Rhin ont une teneur en mercure supérieure aux normes légales. La pollution mercurielle s'aggrave à l'aval de chaque agglomération importante.

Responsables : les industries chimiques suisses, allemandes et françaises, mais aussi les égouts urbains qui reçoivent les antiseptiques des hôpitaux, les amalgames des dentistes, les bains des ateliers de photographie, les résidus des laboratoires d'analyse (Journal de l'année 1975-76). Cette contamination devrait diminuer si l'on applique la convention internationale signée à Bonn fin 1976, qui interdit tout déversement de produits mercuriels dans le Rhin. Elle commence à être appliquée par quelques usines, notamment à Thann, où on a installé un dispositif spécial de récupération du mercure.

En attendant la généralisation de telles mesures, les composés de mercure continueront de s'accumuler au fond du fleuve, où ils constituent une menace durable. Sur la côte septentrionale des Pays-Bas, les phoques sont menacés de disparition. L'absorption de métaux lourds (plomb, cadmium, mercure) et d'autres substances toxiques déversés par l'estuaire du Rhin diminue la résistance de ces mammifères aux parasites naturels, provoque des malformations génitales chez les femelles et accroît la mortalité des nouveau-nés.

Seine

La bataille qui oppose les pêcheurs et les écologistes de la baie de Seine à l'usine de bioxyde de titane Thann-et-Mulhouse, implantée au Havre, connaît des épisodes divers.

Le 27 janvier 1978, le Conseil d'État suspend deux décisions prises par le tribunal administratif de Rouen, qui interdisaient à l'usine de déverser ses déchets – les fameuses boues rouges – en mer comme dans la Seine.

La firme s'était déclarée incapable de les appliquer sans arrêter son activité. Cependant, le Conseil d'État n'autorise que le rejet de résidus correspondant à la production actuelle de bioxyde de titane, ce qui interdit, si la décision est appliquée, toute extension de l'entreprise. Celle-ci s'est engagée à créer à titre expérimental un atelier de recyclage de rejets. Du reste, en signant le 12 décembre 1977, à Bruxelles, une convention internationale sur les boues rouges, la France s'est obligée à soumettre leur rejet à un contrôle écologique permanent et, en tout état de cause, à cesser de polluer la mer au plus tard en 1987.

Rhône

La possibilité de limiter la pollution des cours d'eau par les rejets des industries chimiques, à condition de consentir les investissements nécessaires, a été démontrée, au cours de l'année 1978, par la mise en service d'une grande station d'épuration à Saint-Fons, dans la banlieue sud de Lyon.

Recevant les effluents de trois usines (pétrochimie, chimie fine, colorants), elle traite quotidiennement 3 800 m3 de produits toxiques, qui étaient rejetés auparavant dans le Rhône. La station a été construite par les sociétés Rhône-Poulenc et Ciba-Geigy, propriétaires des usines, un quart des dépenses (16 millions) étant couvert par une subvention de l'agence du bassin Rhône-Méditerranée.

Parallèlement, la communauté urbaine de Lyon a mis en service à Saint-Fons une station d'épuration des eaux d'égout provenant de la rive gauche du Rhône (ce qui représente une population de plus de 700 000 habitants). Les boues résiduaires de l'installation industrielle sont brûlées dans le four à incinération.