À Buenos Aires, en octobre 1978, les cliniciens américains et italiens pourront révéler leurs résultats à long terme : cinq ans auront passé depuis la mise en œuvre des premières chimiothérapies chez des malades opérées d'un cancer du sein. Cinq années et l'heure de la vérité...

Prévenir

En matière de prévention, en revanche, les certitudes sont mieux établies. Certains facteurs pathologiques (troubles menstruels, maladies bénignes du sein) constituent autant d'éléments de risque dans l'apparition ultérieure des cancers de la glande mammaire, dont ils font, en quelque sorte, le lit.

Lutter systématiquement contre ces maladies hormonales et locales constitue un moyen efficace de prévention des tumeurs malignes du sein. Cette voie doit être suivie, dans la mesure où des statistiques récentes indiquent que les maladies des seins d'origine hormonale cèdent à une thérapeutique appropriée dans des proportions allant de 30 à 85 % des cas (Sterkers, aux Entretiens de Bichat 1976), les lésions non cancéreuses de la glande restant justiciables d'une chirurgie dont les indications doivent être soigneusement posées (Reynier).

Enfin, dans la mesure où les méthodes actuelles permettent un diagnostic ultraprécoce des tumeurs cancéreuses du sein, les tendances conservatrices du traitement chirurgical se sont accentuées, qui permettent à l'opérée de conserver, dans 20 % des cas, la masse de son sein. En 1976 se sont ouvertes, tant à Paris qu'en province, des consultations de sénologie où des médecins hospitaliers apprennent aux femmes les gestes qui leur permettront d'apprécier l'état de leurs seins et de détecter elles-mêmes tout nodule suspect.

Ostéosarcomes

La seconde percée thérapeutique vise les cancers osseux, les ostéosarcomes, devant lesquels les spécialistes se trouvent dans la même situation d'expectative. Ces cancers sont très difficiles à contrôler. Malgré l'amputation du membre atteint par la tumeur (les cancers du coude sont parmi les plus fréquents), quatre malades sur cinq développent rapidement des métastases pulmonaires ; un sur deux dans les six mois qui suivent l'acte chirurgical.

Il ressort d'une étude internationale publiée à la fin de 1976 sous l'égide du groupement ostéosarcome de l'Organisation européenne pour le traitement du cancer (OERTC) qu'« une chimiothérapie précoce, intensive, prolongée, mise en route après le traitement de la tumeur primitive, paraît capable, au moins de retarder — et probablement d'empêcher — l'apparition des métastases pulmonaires... ».

Mais là encore les résultats présentés par différentes équipes manquent du recul nécessaire pour une appréciation réellement mesurable de l'efficacité à long terme de cette chimiothérapie à visées préventives.

La chimiothérapie anticancéreuse en 1977 est à la recherche de son équilibre, c'est-à-dire de son emploi maximal : s'il n'est pas exclu de penser qu'elle pourrait constituer demain l'arme la plus efficace dans la prévention de certaines récidives de la maladie cancéreuse, les spécialistes s'accordent à estimer que la preuve définitive de son action bénéfique n'a pas encore été apportée. C'est le temps qui tranchera le fil des incertitudes actuelles.

Bilan des greffes d'organes, vingt-sept ans après la première transplantation rénale

Le mardi 22 mars 1977, la doyenne mondiale des greffées cardiaques, Mrs Betty Annick, 57 ans, décédait. Elle avait reçu son nouveau cœur le 21 octobre 1968. « Ça ne me plaît pas du tout d'être le doyen des greffés du cœur », déclara le Marseillais Emmanuel Vitria quand il apprit la nouvelle. Le 28 novembre 1976, E. Vitria était entré dans sa neuvième année de vie avec un cœur greffé !

Si ces dates rappellent quelques réussites incontestables de la transplantation cardiaque, elles ne font pas oublier que, pour les transplanteurs, le fait majeur de l'été 1976 a été la tenue à New York, du 22 au 28 août, du VIe Congrès international de transplantation. À cette date, le bilan mondial des greffes s'établissait ainsi : (Dans certaines transplantations, la différence entre le nombre des receveurs et celui des transplantations effectuées s'explique par le fait que certains receveurs ont subi deux, voire trois greffes du même organe. D'autre part, la survie de vingt ans pour la greffe rénale concerne un donneur et un receveur jumeaux vrais.)

Vingt-sept ans après la première transplantation rénale, dont bénéficia l'Américain Ruth Tucker le 17 juin 1950, la greffe est devenue l'une des techniques médico-chirurgicales de pointe dans le traitement de maladies jusque-là mortelles. Grâce à elle, des milliers d'hommes et de femmes condamnés à mort ont pu reprendre une vie à peu près normale parmi leurs semblables... auxquels ils ne sont pas tout à fait comparables.