Tous les produits utilisés par l'agriculture sont touchés par des hausses importantes au cours de 1974, la palme revenant aux produits pétroliers (+ 62 %), suivis par les engrais (+ 49,5 %) et la parachimie (+ 34 %), dans laquelle intervient à la fois la hausse sur les matières premières importées et celle de l'énergie.

Le prix des aliments pour animaux, qui avait déjà subi une forte augmentation en 1973, connaît une nouvelle hausse (11,7 %) en 1974. Pour les réparations de bâtiment et les services, les hausses de prix sont voisines du taux général d'inflation (+ 13 à 15 %), la hausse atteignant même 25 % dans le bâtiment.

Les charges de production augmentent elles aussi ; c'est ainsi que, outre la rareté de l'argent, conséquence de l'encadrement du crédit, la hausse des taux d'intérêts se poursuit et, compte tenu de la masse des encours ou prêts, les intérêts que les agriculteurs français ont à rembourser augmentent de 30,8 % en 1974.

La masse des salaires versés par les exploitants à leurs ouvriers augmente de 15 % par rapport à 1973.

L'interprofession

Pour promouvoir l'organisation de la production agricole et l'organisation de la mise en marché des produits de l'agriculture, le gouvernement, après s'être assuré la collaboration des représentants de l'agriculture, a présenté un projet de loi-cadre relatif à l'interprofession. Le Parlement devait se prononcer sur ce texte avant la fin de la session de printemps.

L'organisation interprofessionnelle, suivant le texte de cette loi-cadre, est ainsi définie : « Les organismes constitués par les organisations professionnelles les plus représentatives de la production agricole et, selon le cas, de la transformation, du négoce et de la distribution, représentant les divers intérêts en présence, peuvent être reconnus en qualité d'organisations interprofessionnelles par arrêté conjoint du ministre de l'Agriculture et du ministre de l'Économie et des Finances. » Deux décrets d'application de cette loi-cadre sur l'interprofession portent sur la nouvelle organisation du FORMA (Fonds d'orientation et de régularisation des marchés agricoles), qui voit ses comités consultatifs remplacés par des comités de gestion (première étape vers la constitution d'un office par produit). La viande, les céréales, le sucre et les oléagineux demeurent en dehors de cette organisation, ces produits étant déjà gérés par des organismes interprofessionnels.

Le second décret porte création d'un Conseil supérieur d'orientation des productions. Ce Conseil, qui siégera au ministère de l'Agriculture, aura pour mission d'assister le ministre de l'Agriculture par des avis relatifs à la production, à la transformation et à la commercialisation des produits agricoles.

Agitation

Toutes ces pressions sont, au cours de l'été 1974, ressenties comme de plus en plus insupportables par les agriculteurs. Ils demandent une révision des prix agricoles communautaires : un ajustement qui tiendrait compte du renchérissement des coûts de production. Ils vont se battre pour obtenir cette révision. Les éleveurs, plus éprouvés que d'autres, donnent l'exemple. Dans les grandes régions d'élevage, des actions de commandos se multiplient. Peu de régions touristiques échappent aux manifestations de la colère paysanne. Les routes sont coupées par des barrages, des trains arrêtés, des préfectures sont assiégées, lapidées, arrosées de purin. On brûle des pneumatiques, des bottes de foin ; on égorge des animaux que l'on exhibe ; on procède à des ventes sauvages de viande pour protester contre les cours très bas à la production et les prix élevés en boucherie ; ni les biens des particuliers ni les individus ne sont à l'abri de cette violence qu'encouragent implicitement les responsables agricoles nationaux en donnant carte blanche aux responsables locaux et les pouvoirs publics en retardant l'intervention des forces de police.

Ces moyens de revendication, pour condamnables qu'ils soient, se révèlent payants pour les agriculteurs.

Les organisations agricoles obtiennent des pouvoirs publics une série de mesures destinées à soutenir le revenu agricole en 1974 et à compenser les pertes subies du fait de la dégradation des marchés et de la hausse des coûts de production.