Il est significatif que dans toutes les rencontres dont on vient de faire état reviennent les mêmes préoccupations :
– le désir de voir s'établir une véritable tolérance et même, dans certains cas, une collaboration entre les deux religions ;
– la défense des valeurs religieuses devant l'offensive de l'indifférentisme, du matérialisme et de l'athéisme.

Peut-être faut-il voir là des raisons qui amènent les intellectuels musulmans croyants à chercher le dialogue avec les chrétiens au moment même où, dans le nouveau rapport des forces mondiales, dû notamment à la décolonisation puis à la crise du pétrole, ils ont l'impression de pouvoir parler d'égal à égal. Ils ne font d'ailleurs que retrouver là une des traditions de l'Islam qui, dans son âge d'or, n'a pas compté seulement les combattants farouches de la Djihad, la guerre sainte, mais aussi (on l'oublie trop) une pléiade de grands esprits humanistes en quête de dialogue et de fraternité universelle.

Israélites

Une suite ininterrompue de défis et de combats au plan politique ; une remarquable moisson au plan des idées et de la création littéraire ; une spectaculaire évolution des rapports judéo-chrétiens : telles sont les caractéristiques essentielles de la vie des communautés juives dans le monde, qu'un recensement, opéré au début de l'année 1975, estime à 14,5 millions d'âmes.

Conflits

La défense de l'État d'Israël reste au premier plan des préoccupations des Juifs dans le monde. La solidarité croissante d'Israël et de la diaspora s'est affirmée de manière spectaculaire lors d'une tournée effectuée en France par les deux grands rabbins d'Israël, Chelomoh Goren (Ashkenaze) et Obadia Yossef (Sepharade).

La décision prise par l'UNESCO de n'inclure l'État d'Israël dans aucune région provoque une levée de boucliers qui dépasse largement le cadre de la communauté juive. Une importante manifestation, à laquelle participent plusieurs prix Nobel, réunit à Paris, en mars 1975, de nombreux intellectuels venus du monde entier et qui stigmatisent l'action de l'UNESCO.

Il devient de plus en plus difficile de faire le partage entre antisionisme et antisémitisme. Le boycott arabe se développe d'abord contre Israël, exclu de nombreuses manifestations internationales, notamment en matière de sport (Jeux asiatiques) ; mais il vise également des sociétés juives, en particulier des banques juives aux USA, en Angleterre et en France, où le CRIF (Comité représentatif des israélites de France) demande des explications au gouvernement français. Air France va même jusqu'à publier une carte de ses lignes aériennes vers le Proche-Orient où Israël ne figure pas.

Des formes d'antisémitisme plus classiques subsistent sporadiquement. On compte à nouveau des Juifs assassinés en Syrie ; les Juifs de Ferrare reçoivent des lettres de menaces ; en France, la synagogue de Savigny-sur-Orge est profanée, tout comme les cimetières de Mommenheim et Fegersheim en Alsace. Dans plusieurs pays d'Amérique du Sud, l'antisémitisme devient quasi officiel. Il n'épargne pas les États-Unis, où périodiquement le soutien du lobby juif à Israël est dénoncé par ceux qui, de toute évidence, ne sont guère éloignés du lobby arabe.

Beate Klarsfeld poursuit sa courageuse campagne contre les nazis. Arrêtée à Dachau et libérée après trois semaines de détention, elle est condamnée par le tribunal de Cologne.

Le combat pour la liberté des Juifs d'URSS se poursuit comme chaque année avec son cortège d'arrestations, de pressions, de manifestations et quelquefois de réussites. Il fut plusieurs fois à la pointe de l'actualité internationale en devenant la pierre d'achoppement des relations commerciales entre l'URSS et les USA. En octobre 1974, le sénateur Henry Jackson obtient que l'octroi à l'URSS de la « clause de la nation la plus favorisée » soit lié à la libre émigration des Juifs russes (dans un échange de lettres avec Henry Kissinger).

Mais les garanties que ce dernier avait cru pouvoir donner sont dénoncées au début de l'année 1975 par le Kremlin. Une série d'affaires : Polsky, Feldman, Zalmanson, Panov ; un appel d'intellectuels juifs soviétiques à l'opinion internationale ; une conférence nationale à Paris et la création d'un comité de lutte, telles sont les principales séquences de ce drame aux cent actes divers.

Dialogue

Alors que les communautés juives ne cessent de manifester leur mécontentement devant les prises de position politiques du Vatican à l'égard d'Israël (c'est ainsi que le pape Paul VI remit à l'UNESCO le prix Jean-XXIII), on assiste, en prolongement de la déclaration de l'épiscopat français sur le judaïsme, à un très important pas en avant du Vatican au plan de la théologie : la publication d'une déclaration qui demande aux chrétiens de rejeter les stéréotypes de l'antijudaïsme religieux rend hommage à la piété juive, recommande l'étude de la religion et de la religiosité juives, souhaite des actions et même des prières communes.