Les 2 804 chercheurs, ingénieurs, techniciens et administratifs de l'INSERM se répartissent, en 1974, dans 74 unités de recherches, qui dépendent de l'Institut, et 55 groupes de recherches installés dans les bâtiments universitaires et hospitaliers. Les ressources budgétaires de l'Institut (248 millions de F en 1974) proviennent, pour leur plus grande part, du ministère de la Santé publique, et, pour le reste, de la Sécurité sociale et de divers organismes publics ou privés, avec lesquels l'INSERM entretient parfois des rapports de travail particuliers.

Succès

Dans le concert de la recherche médicale mondiale, peut-on apprécier la partie jouée depuis dix ans par l'INSERM ? Les résultats obtenus sont-ils à la mesure des souhaits exprimés ?

Compte tenu de la modicité des crédits, par comparaison avec ceux dont dispose, par exemple, l'Institut américain pour la santé, les équipes de l'INSERM ont apporté des contributions très importantes aux découvertes effectuées depuis dix ans, notamment en néphrologie, neurologie, biologie du développement, endocrinologie et gastro-entérologie.

Certaines de ses réussites rivalisent avec celles des meilleures équipes américaines ou britanniques, quand elles ne les devancent pas : les travaux de Michel Jouvet sur le sommeil, de Jacques Glowinski sur les neuromédiateurs, d'Étienne-Émile Baulieu sur les hormones stéroïdes, d'André Boue sur les troubles du développement, de Georges Mathé sur l'immunologie du cancer, de N. K. Man sur le rein artificiel, pour ne citer que ces quelques exemples, ont été à l'avant-garde des progrès réalisés.

En sera-t-il de même à l'avenir et l'INSERM continuera-t-il d'être le fer de lance de la recherche médicale française ? On peut l'espérer, dans la mesure où tout nouveau succès remporté, grâce à la recherche, sur la prévention et le traitement d'une maladie, sert à la fois les malades et la société tout entière. Mais les difficultés financières présentes ne permettent guère d'envisager le futur avec un optimisme débordant.

Euthanasie : à nouveau des controverses

Six faits d'inégale importance raniment dans le monde le grand débat (ou la grande querelle) de l'euthanasie.

Juin 1974 : cinq prix Nobel, dont le professeur Monod, directeur de l'Institut Pasteur, signent un appel où on lit que « l'euthanasie est un bien, seulement si elle se solde par une mort rapide et non douloureuse, et si cet acte, dans son ensemble, est bénéfique à celui qui le reçoit ».

Août : le jury de l'État de New York acquitte un médecin convaincu d'avoir pratiqué sur un malade atteint d'un cancer inguérissable, une injection mortelle. La sentence soulève une vague de passion si puissante en faveur de l'euthanasie que l'État du Massachusetts confie à des juristes le soin d'élaborer une loi permettant aux malades atteints d'une affection incurable de demander qu'on les délivre de leurs douleurs et de la vie.

Septembre : le médecin-chef de l'hôpital de Lule (Suède) déclare publiquement que, plusieurs fois par an, il procure à des malades une mort douce, avec le plein accord de leur famille, quand ces malades sont considérés comme mourants.

Novembre : le médecin britannique George Mair annonce, à la veille de la publication de ses Mémoires, qu'au cours de sa carrière il a tué – le docteur Mair se sert de ce mot – un grand nombre de malades incurables.

Décembre : l'euthanasie passionne l'opinion suisse avec la découverte d'une affaire de mort douce dans une clinique de Zurich.

Enfin, le 7 janvier 1975, à Paris, l'Académie de médecine, émue par certaines prises de position récentes en faveur de l'euthanasie, affirme, à l'unanimité, que le médecin ne peut en aucun cas supprimer la vie, qu'il a mission de protéger.

Morale

Le problème de l'euthanasie est, certes, l'un des plus difficiles qui se posent à la conscience humaine, et de façon plus dramatique encore que celui de l'avortement. Hormis de très rares exceptions (l'URSS et la Suède, notamment) où les auteurs de ce « crime de charité », comme le définissent les partisans de l'euthanasie, ne sont pas poursuivis devant les tribunaux, la loi punit l'euthanasie dans la quasi-totalité des nations du monde.