Après avoir habitué Sarah à une transaction simple (don, par exemple, d'une tranche de banane), le morceau de fruit était posé à côté d'un bout de plastique jaune. Plus tard, Sarah devait écrire en plastique pour recevoir la banane désirée – et ainsi, de proche en proche, jusqu'à l'introduction du mot « donner » qui, très vite, n'était plus confondu avec un autre.

Sarah a de cette manière appris le nom de l'expérimentateur, celui de plusieurs chimpanzés, enfin le sens d'un signe d'interrogation à partir de concepts d'égalité et de différences. L'apprentissage direct des substantifs faisait l'objet d'une autre étape du programme : exposition de l'objet en compagnie de son symbole, puis assimilation des adjectifs de forme et de couleur.

L'animal résout maintenant des problèmes tels que : « Le brun est la couleur du chocolat. Prend le disque de couleur brune. » Le fait que Sarah soit capable d'associer le nom de « Mary » avec une photographie de la personne désignée suggère bien qu'elle peut penser en symboles.

Critiques

Le reproche le plus communément adressé aux psychologues qui ont obtenu ces résultats est d'avoir réalisé des conditionnements chez leurs chimpanzés en se servant des récompenses (nourriture, distraction, etc.).

Cette critique est cependant discutable, en ce sens qu'à la limite on peut affirmer que, chez l'adulte ou l'enfant humain, les motivations qui président à un quelconque apprentissage ne sont ni purement abstraites ni totalement désintéressées.

Des chercheurs américains tentent néanmoins de tourner la difficulté. Ils entraînent à l'heure actuelle des chimpanzés à l'acquisition d'un langage uniquement visuel (images), l'expérimentateur étant remplacé par un ordinateur, dans une langue qui n'est pas spécifiquement humaine, le yerkish, né à l'université d'Emery, à Atlanta (York).

On espère ainsi obtenir des sujets qui, après avoir assimilé un certain nombre de symboles, seront capables de les associer de manière parfaitement originale, sans intervention de la moindre récompense de la part d'une quelconque personne.

De nombreuses années sont nécessaires pour approfondir ces études, étonnantes il faut bien le dire. Il sera notamment intéressant de voir si Washoe ou Sarah enseigneront d'elles-mêmes à leurs enfants le langage qu'elles ont si bien su assimiler.

Codes

Quoi qu'il en soit, il est d'ores et déjà au moins prouvé que d'autres cerveaux que le nôtre peuvent servir à l'expression d'un langage symbolique complexe. En fait, le langage existe à tous les niveaux d'organisation des systèmes vivants – et dans ce cadre le nôtre ne serait qu'une forme particulièrement perfectionnée d'un langage général. Son enseignement à d'autres espèces que la nôtre devrait permettre d'éclairer de nombreux et subtils mécanismes mentaux, aussi de mieux connaître la spécificité du langage humain.

Une application plus immédiate sera vraisemblablement la mise au point de codes capables de rétablir la communication entre un malade, victime par exemple de troubles de la parole à la suite d'un traumatisme, et son entourage. Un autre champ d'expérience conduira à vérifier si l'homme n'a pas toujours eu des préjugés trop favorables pour son espèce, notamment en s'exagérant la valeur de ses performances.

La rage avance vers l'Ouest

La rage poursuit son inquiétante progression (10 à 20 km par an) vers l'ouest de la France (Journal de l'année 1968-69 et 1972-73). Les autorités ont dû prendre des mesures (jugées trop draconiennes par certains) contre les renards, principaux vecteurs de la maladie, et les chiens errants. En 1973, 1 823 cas sont dénombrés chez des animaux sauvages et 262 chez des espèces domestiques. La région parisienne et la Picardie sont atteintes ; des cas sont signalés en Côte-d'Or et dans les Hautes-Pyrénées, à Tarbes notamment. Pour lutter contre la rage, cinq ministères sont mobilisés : Agriculture, Santé, Environnement, Armées (les militaires ont pour mission de chasser les renards), ainsi que les Postes et télécommunications qui, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, doivent expédier des échantillons en vue de diagnostic.