Au Japon, le gouvernement a décidé d'employer des arguments frappants : un an de prison aux responsables des usines empoisonnant l'atmosphère. Il est vrai que, dans les grandes villes de ce pays, on a oublié depuis longtemps la couleur d'un vrai ciel bleu.

Rivières et fleuves-égouts

La pollution du Rhin continue à inquiéter les pays riverains. Les 25 et 26 octobre 1972, une conférence réunit, à La Haye, les ministres de l'Environnement de l'Allemagne occidentale, de France, du Luxembourg, des Pays-Bas et de Suisse.

La France accepte de réduire le déversement dans le Rhin du sel des potasses d'Alsace ; les rejets de certains produits chimiques toxiques seront interdits, la pollution thermique, due aux centrales nucléaires, sera limitée ; enfin, une étude de la pollution par les métaux lourds sera entreprise.

À la fin de décembre, les habitants du lotissement de Dingsheim, près de Strasbourg, se retrouvent sans chauffage. Le fuel qui alimentait leurs pavillons avait disparu. Une partie réapparut dans le cours d'un ruisseau, où toute vie avait été tuée. Mais des milliers de litres de mazout s'étaient infiltrés dans le sol, où il fut sans doute retenu par la couche imperméable de lœss. Il ne constituait pas moins une menace pour la nappe phréatique où Strasbourg puise son eau potable : aussi est-il décidé, en janvier, de mettre cette nappe sous surveillance.

Poursuites

Dans les Vosges, en avril 1973, une papeterie ferme ses portes. Elle rejetait dans la Vologne des fibres de cellulose et de l'amidon qui détruisaient la flore de ce torrent. La méthode d'épuration proposée par l'agence financière du bassin Rhin-Meuse revenant trop cher, la direction de l'usine préfère mettre fin à son activité. Du moins est-ce là la version officielle, car la concurrence des papeteries étrangères joue peut-être son rôle dans cette décision.

Dans la vallée de la Saône, au nord de Lyon, six industriels, PDG de sociétés, sont inculpés en janvier 1973 : leurs usines étaient responsables de pollutions qui avaient anéanti plusieurs dizaines de tonnes de poissons.

En Italie, plus de cent industriels milanais seront traduits en justice pour avoir pollué les eaux de trois rivières, et trente-neuf notabilités de Varèse sont poursuivies pour avoir pollué le lac.

Aux États-Unis, une loi de 1965 tolérait les rejets de déchets dans les cours d'eau, dans des limites fixées par chaque État. Au début de 1973, le congrès américain vote une loi bien plus draconienne : interdiction de tous rejets dans les cours d'eau. En fait, ce texte ne prendra vraiment effet qu'en 1985, qui devrait être l'année du rejet zéro. Pour qu'un tel objectif soit atteint, il faut que chaque usine mette au point un recyclage lui permettant de purifier ses eaux.

Plages

Au cours de l'été 1972, alors que les baigneurs se pressent sur les plages, des informations peu engageantes parviennent de deux points du littoral français particulièrement fréquentés.

Les analyses de l'eau rejetée par les égouts d'Hyères, en Provence, révèlent, au début d'août, la présence de 24 millions de colibacilles au litre. Le 2 août, toutes les baignades sont interdites sur les 4,5 km de la plage de l'Almanarre. La municipalité de la ville d'Hyères dépose une plainte contre la société qui a construit l'usine d'assainissement des eaux, son rendement paraissant défectueux. Cette station d'épuration a été depuis perfectionnée, et d'autres installations sont projetées.

Quelques jours après cette alerte, une affaire identique éclate sur la côte atlantique. La société pour l'étude, la protection et l'aménagement de la nature dans le Sud-Ouest (SEPANSO) dénonce la pollution du bassin d'Arcachon. Ses eaux recèleraient 10 000 streptocoques au litre à Arcachon même, et 20 000 colibacilles au litre en un autre point du bassin. Le maire d'Arcachon accuse la SEPANSO de se livrer à une opération politique, et décide d'engager des poursuites.

Dangers sur la Méditerranée

Une affaire de pollution mobilise la Corse pendant des mois et finit par entraîner de violentes manifestations. Durant l'hiver 1972-73, les riverains de la Méditerranée ont un autre motif d'inquiétude : plusieurs compagnies pétrolières demandent des permis de recherches entre la Corse et le continent, à plus de 2 000 m de profondeur. La présence de dômes de sel laisse penser qu'il y existe des gisements de pétrole. Mais les risques sont énormes. Si une tempête provoquait la rupture de l'appareil de forage à une telle profondeur, il serait impossible d'empêcher le pétrole de se répandre dans la mer : un tel accident s'est déjà produit sur la côte de Californie. La possibilité d'un séisme accroît le danger. C'est tout le problème de la pollution de la Méditerranée qui se trouve posé : selon le professeur G. Ferraiolo, de l'université de Gênes, 12 milliards sont nécessaires pour une lutte efficace.

Poissons et coquillages

Le drame de Minamata, au Japon, révélait brusquement, en 1953, les effets inquiétants de la pollution marine. Des poissons empoisonnés par du mercure avaient intoxiqué des centaines de personnes et fait de nombreuses victimes.