En revanche, il déclenche une violente campagne contre le gouvernement libanais, accusé de complicité avec les monopoles pétroliers et l'impérialisme. Bagdad reproche à Beyrouth d'avoir adopté à son égard une attitude inamicale lors de son conflit avec l'IPC et d'avoir nationalisé les oléoducs du consortium que le gouvernement irakien souhaitait acquérir pour assurer l'écoulement de son pétrole nationalisé. En guise de représailles, le général Bakr décrète, le 12 mars, le boycottage de tous les produits libanais.

Pour s'affirmer davantage sur la scène arabe, l'Irak joue la carte palestinienne, à un moment où la plupart des autres pays frères sont en conflit avec les fedayin ou paraissent s'en désintéresser. On apprenait, en septembre 1972, de source bien informée, que l'Irak avait mis à la disposition des organisations de commandos ses aérodromes et ses ports pour la réception d'armement envoyé notamment de l'URSS. Il octroie, le 7 février, un don de 3 millions de dollars à l'Organisation de libération de la Palestine, et, un mois plus tard, verse au gouvernement du Caire quelque 6 millions de dollars en guise de contribution à l'effort de guerre.

Moscou

L'Union soviétique – dont le traité d'amitié signé avec Bagdad le 9 avril 1972 est entré en vigueur le 20 juillet – favorise discrètement les desseins du régime baasiste. Moscou, rapporte-t-on, intervient auprès des dirigeants kurdes, exerce même des pressions amicales afin de les amener à modérer leurs revendications et d'éviter tout conflit armé avec le gouvernement central. La diplomatie soviétique déploie des efforts soutenus pour normaliser les rapports entre l'Irak et l'Iran, avec lesquels l'URSS tient à poursuivre une fructueuse coopération.

On ignore le rôle joué par Moscou dans le conflit irako-koweitien, mais la plupart des observateurs estiment que les visées territoriales de Bagdad bénéficient de toute la sympathie des dirigeants soviétiques, qui comptent sur l'Irak pour faire obstacle à la pénétration de l'Iran et de l'Arabie Saoudite, soutenus par les Anglo-Américains, dans les émirats du golfe Persique. L'Irak – encore plus que la Syrie – paraît occuper une place de choix dans la stratégie du Kremlin.

C'est d'ailleurs de Bagdad que partent la plupart des appels à la nationalisation des compagnies concessionnaires, dans leur majorité contrôlées par Londres et Washington, et à la lutte contre les intérêts américains. Bien que le régime baasiste admette, en juillet 1972, la désignation d'un représentant officieux de Washington à Bagdad, il persiste à ne pas vouloir rétablir les relations diplomatiques avec les États-Unis.

Il n'est pas étonnant dès lors que les relations entre Moscou et Bagdad se consolident et se développent. Le général Bakr est le premier chef de l'État irakien qui entreprend une visite officielle en URSS (14/19 sept. 1972).

Il est même question, en septembre, de l'adhésion de l'Irak au Comecon. Le 21 septembre, l'URSS accepte que Bagdad règle les dettes contractées jusqu'en 1980 sous forme de pétrole brut. D'autres pays communistes suivent l'exemple de l'Union soviétique pour soulager la trésorerie de l'Irak et lui faciliter l'écoulement du pétrole nationalisé.

France

Cependant le régime baasiste n'entend pas être cantonné dans un tête-à-tête avec le monde communiste. Il s'efforce de développer ses relations avec l'Europe occidentale, en particulier avec la France, en raison de « l'attitude impartiale » adoptée par celle-ci dans le conflit du Proche-Orient. Avant la liquidation du contentieux qui oppose l'Irak à l'IPC (convention du 28 février), la Compagnie française des pétroles signe, le 5 février, un contrat qui lui assure la livraison, pendant dix ans, du brut irakien à des conditions avantageuses et qui couvrira plus de 10 % des besoins énergétiques de la France. Début mai, le gouvernement de Bagdad et l'ERAP parviennent à un compromis qui permet à la société nationale française de reprendre l'exploitation des champs pétrolifères qui lui avaient été attribués en 1968.