Présentant ce plan naval de quinze ans, Michel Debré, ministre d'État chargé de la Défense nationale, n'a pas précisé le montant des dépenses qui seront engagées, mais il a reconnu que la part des crédits alloués à la marine, au sein du budget militaire, devra être augmentée (elle est de 17 % environ pour 1972).

Les questions financières ont d'ailleurs été l'une des préoccupations fondamentales du ministre de la Défense et, pourtant, le budget militaire pour 1972 est en nette augmentation par rapport à celui de 1971. Avec un total de 31 205 millions de francs en crédits de paiement, les dépenses des armées en 1972 se sont accrues de plus de 8 %. Les autorisations de programme attribuées au titre V de la loi de finances, c'est-à-dire les investissements consentis pour la mise au point et la production des armements, se sont élevées à 18 273 millions de francs, en augmentation de 14,3 % sur celles de 1971. À elles seules, les forces nucléaires représentent 5 029 millions de francs pour l'armement stratégique et 658 millions pour l'arsenal tactique.

Répartition des crédits

La comparaison de toutes ces évaluations pour 1972 permet à Michel Debré de dire que le budget de la Défense reproduit assez fidèlement les perspectives tracées par la troisième loi-programme des équipements militaires — l'équivalent du VIe Plan pour les années 1971 à 1975 — dans le domaine des investissements. Les militaires ont obtenu en fin de compte l'enveloppe financière qui avait été envisagée initialement. D'une manière générale, cette observation se révèle exacte, à ceci près que, pour respecter son contrat, le ministère de la Défense a dû sensiblement modifier — par rapport aux prévisions — la répartition des autorisations de programme et des crédits de paiement selon les différents secteurs.

En particulier, l'armée de l'air devra, par mesure d'économie, fermer plusieurs bases : les escales de Bangui, en République centrafricaine, et de Bou-Sfer, près de Mers el-Kébir, en Algérie, seront supprimées. En France, dès juillet 1972, la base de Pau est fermée, et l'armée de l'air abandonne les bâtiments qu'elle détient à Dijon-ville. De surcroît, au terme d'un accord franco-israélien, le 15 février 1972, l'armée de l'air française doit racheter les cinquante avions Mirage-5 placés sous embargo depuis la guerre des Six-Jours, en 1967, et qui sont remboursés à Jérusalem.

Une telle situation a donc contraint le ministre de la Défense à prendre l'initiative d'une révision financière de la loi-programme d'équipement à long terme. Un an après son adoption par le Parlement, ce texte, qui couvre les dépenses des armées pour cinq ans, a été réexaminé dans le sens d'une augmentation des crédits inscrits, soit 168 milliards de francs pour l'ensemble des frais de fonctionnement et des investissements. Cette réévaluation tient essentiellement à la hausse des prix industriels, qui a remis en cause l'exécution de ce plan d'équipement militaire à long terme, le troisième depuis 1960.

Le coût des matériels militaires, en 1971, a progressé de 8,5 % pour les études et de 7,5 % pour la fabrication proprement dite, alors que les experts avaient annoncé une augmentation moyenne de 5 % pour toute l'année. En outre, l'entretien des matériels, de plus en plus complexes, la rénovation des casernements, les réparations et la consommation de carburants entraînent des dépenses supplémentaires si l'on veut éviter de trop limiter l'instruction des unités et du contingent.

Le 8 juin 1972, Michel Debré a décidé de relever la solde mensuelle des appelés du contingent (80 F au lieu de 40 pour les hommes du rang, 150 F au lieu de 55 pour les sergents, et 300 F au lieu de 150 pour les aspirants).

Cette politique, le ministre de la Défense a voulu la confirmer en faisant approuver, le 2 février 1972, par le conseil des ministres, un projet de loi portant statut général des militaires. Préparé depuis deux ans environ, ce texte gouvernemental était attendu depuis très longtemps, puisque, dès janvier 1959, le général de Gaulle, alors président du Conseil, avait souhaité la parution d'une loi spéciale sur les garanties fondamentales des militaires de carrière et sur les principes de leur statut.