Parmi les festivals organisés en province, seul celui d'Orléans aura eu le mérite de révéler des compositeurs peu connus, tels le Portugais J. Pexinho, l'Espagnol T. Marco et le Cubain Léo Brouwer.

À Paris, les concerts de musique contemporaine n'ont pas eu cette année l'éclat des saisons passées. Le Domaine musical reste orienté vers des compositeurs de référence, passés ou présents : Xenakis, avec la création de Aroura pour douze cordes solistes, d'une étrange beauté par l'aridité de sa matière, voisinant avec Edgar Varèse (en décembre) ; Boucourechliev, avec Anarchipel pour six instruments, qui clôt, malheureusement avec incertitude, le cycle de ses Archipels ; enfin Gilbert Amy, avec Jeux et formes, une œuvre de transition (janvier). Le dernier concert offre plus d'intérêt, notamment par l'audition de Schichten II, de Carlos Roque Alsina, pour cinq groupes instrumentaux, raffiné jusque dans ses excès.

La série des concerts de l'ORTF, Musique du XXe siècle, pour laquelle des œuvres d'orchestre ont été commandées à de jeunes compositeurs, a permis de découvrir une partition originale de Michel Decoust, Si... et si... seulement.

La saison des grands concerts, sans changer véritablement de physionomie, se fait l'écho des préoccupations nouvelles qui peu à peu se font jour en Europe et aux États-Unis, plus précisément du désir de modifier le système de diffusion et d'écoute de la musique.

Contre-culture

À New York, Pierre Boulez, directeur de l'Orchestre philharmonique, lance une nouvelle formule d'auditions-débats et de pré-concerts consacrés à des œuvres de musique de chambre d'auteurs inscrits au programme de la soirée. Le Domaine musical, pour sa saison 1971-72, s'inspirera de ce principe. En France, des associations — telle Promotion musicale, réunissant un groupe d'étudiants — organisent des concerts en marge des circuits professionnels et font appel à des interprètes jeunes ou méconnus. À Aix-en-Provence, pendant que se déroule le festival officiel, des concerts gratuits ont lieu chaque jour, dans la rue, dans des cours ou des églises, donnés avec le concours de jeunes instrumentistes. Ces manifestations, dans l'ensemble de grande qualité, attirent un public important (3 000 personnes sur le cours Mirabeau pour l'Histoire du soldat de Stravinsky, interprétée par l'ensemble Musique vivante de Diego Masson).

Aussi épisodiques qu'en soient les signes, un tel mouvement — baptisé contre-culture par les animateurs — ne reste pas sans effet sur la vie musicale traditionnelle.

L'Orchestre de Paris, dont Georg Solti prend la direction en janvier, modifie sensiblement ses programmes, notamment en y inscrivant des œuvres contemporaines. Au Théâtre des Champs-Élysées, en novembre, un concert Ligeti-Varèse-Constant se donne devant une salle clairsemée ; en février, la Sinfonia de Bério est accueillie par des huées ; les compositeurs français (Jolivet, Rivier, Charpentier...), en revanche, font bonne figure. Le savoir-vivre et l'absence de curiosité des abonnés des grandes salles ne facilitent guère la tâche des directeurs musicaux.

Solistes et chefs réputés se succèdent au fil de la saison de l'Orchestre de Paris : P. Klecki, G. Rojdestvensky et le violoniste V. Tretiakov, Z. Mehta, S. Osawa et I. Stern. Le violoncelliste russe M. Rostropovitch, après un récital en novembre, donne à Paris la première audition du Concerto de H. Dutilleux qu'il avait créé l'an passé à Aix-en-Provence.

Décentralisation

La politique de décentralisation, définie dans le plan décennal du service de la musique au ministère des Affaires culturelles, conduit l'orchestre en banlieue et quelquefois en province. Des municipalités (Courbevoie, Gennevilliers) offrent gratuitement ces concerts à leurs administrés.

Les orchestres de l'ORTF, qui, selon les vœux de Jacques Sallebert, nouveau directeur de la Radio, devraient être prochainement réformés, offrent quant à eux une saison sans histoire. On retiendra toutefois une excellente interprétation de la 14e symphonie de Chostakovitch, donnée en première audition en France par l'Orchestre national sous la direction de Jean Martinon (décembre), un festival Brahms sous la direction d'Eugène Ormandy, avec en soliste Isaac Stern, violon, et Léonard Rose, violoncelle (également avec l'Orchestre national en janvier), ainsi qu'un festival Mozart par l'orchestre de chambre dirigé par Alexandre Schneider.