Arts

L'année 1968-69 n'est pas de celles que l'on marque volontiers d'une pierre blanche. Le 150e anniversaire de la naissance de Courbet, le 100e anniversaire de celle de Matisse, le 50e anniversaire de la mort de Renoir auraient dû nous valoir trois grandes expositions. Nous ne les avons pas eues. Mis à part l'exposition de Baudelaire, il n'y eut guère de manifestations qui feront date.
Quant à l'art contemporain, il continue toujours de vivre en proie à de vives convulsions. Rien ne permet de discerner une tendance, un courant viable qui dominerait les autres. On manque, en fait, de personnalités, mais comment s'en étonner ?
Les uns, persuadés qu'il faut à tout prix faire du neuf, se lancent dans des élucubrations où ni la forme ni la matière n'ont plus rien de commun avec la peinture traditionnelle, et, de ce fait, échappent à une saine critique. Les autres, conscients des dangers où risquent de les mener les premiers, et souvent incapables de se renouveler, retombent dans les poncifs de leurs aines.
Quant aux amateurs, ils hésitent eux aussi à s'engager. Certains cherchent davantage, il faut bien l'admettre, à réaliser un éventuel profit plutôt qu'à donner libre cours à leur instinct du beau. Ce véritable chassé-croisé se traduit par la crise actuelle de la peinture.

Les musées de Paris

Les musées parisiens ont proposé de nombreux ensembles, dont certains d'un grand intérêt. Le Louvre a présenté l'essentiel de la donation Louis de Clercq, fort riche en pièces anciennes du Moyen-Orient, et a regroupé le legs du Dr Lacaze à l'occasion du centenaire de sa mort. Le Cabinet des dessins a montré une centaine de pages magistrales avec les Maîtres du blanc et noir au xixe siècle.

Audacieux, le musée des Arts décoratifs a réuni une rétrospective Yves Klein, dont les toiles firent scandale de son vivant. Puis il a rappelé le souvenir de l'expressionniste norvégien E. Munch.

Le musée national d'Art moderne s'est attaché à faire mieux connaître l'expressionniste allemand Beckmann en lui dédiant une très abondante rétrospective. Hommages rendus aux vivants, le musée national d'Art moderne a résumé le travail de Sima et celui de Hans Hartung, qui réinventa fort jeune l'art abstrait.

Au musée d'Art moderne de la Ville de Paris, l'active (et d'avant-garde) section Animation-Recherche-Confrontation réalisa la première grande exposition consacrée à l'Américain Rauschenberg, un des promoteurs du pop'art. Elle accueillit ensuite les environnements que De Soto avait montrés précédemment à Amsterdam. Non moins téméraire, le très officiel Centre national d'action culturelle présenta les toiles blanches, juste ornées d'une bordure peinte, de Sam Francis, considéré aux États-Unis comme un des maîtres de l'art vivant.

Le musée Galliera rappela le souvenir de trois artistes bien différents : Bernard Pomey, Jean Aujame et Fernand Léger, lithographe. Le musée de la Monnaie a abrité une rétrospective Adam. Le musée Jacquemart-André recevait les sanguines d'Hubert Robert du musée de Valence (les sauvant ainsi de l'incendie qui détruisit en partie le bâtiment qui les abrite d'ordinaire). La Conciergerie conviait les visiteurs à la découverte de l'art médiéval finlandais, et la Bibliothèque nationale inaugurait une série de présentations annuelles de gravures entrées chaque année au Cabinet des estampes.

Le musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye a exposé les chefs-d'œuvre de l'art paléolithique. Le Grand Palais, après avoir reçu un échantillonnage de l'avant-garde américaine sous le titre tout à fait injustifié du Réel dans l'art, s'est consacré à Napoléon. Les sculpteurs Archipenko, Zwobada et Mestrovic, le plus grand des sculpteurs yougoslaves, furent reçus au musée Rodin. Le musée de la Marine présenta une passionnante exposition du graveur Charles Méryon.

Steinlen (Cabinet des dessins du Louvre, Paris, 1er juillet - 6 novembre 1968)

Donation faite au Louvre par la fille de l'artiste, Mme Roger Désormière, les pièces de cette exposition mettaient essentiellement l'accent sur Steinlen dessinateur. Soixante-dix feuilles permettaient de prendre une plus juste mesure d'une œuvre que l'on ne connaît, en fait, que par fragments.