Cette mesure a provoqué une certaine surprise. Entre-temps — en 1962 —, il était décidé que tous les enfants devaient être scolarisés dans les nouveaux établissements de premier cycle, les collèges d'enseignement secondaire (CES).

Il fallait donc, pour appliquer les nouveaux textes, que les CES soient suffisamment nombreux pour pouvoir accueillir tous les élèves jusqu'à 16 ans — ce qui, au rythme des constructions, ne semblait pas possible avant 1972. Des mesures particulières ont donc été prévues pour respecter l'ordonnance de 1959.

Les enfants de 14 ans ont eu le choix entre cinq solutions :
– redoubler la classe de fin d'études primaires ;
– entrer dans des classes terminales pratiques de CES ;
– entrer dans un collège d'enseignement technique (CET), pour préparer en trois ans un certificat d'aptitude professionnelle ;
– entrer dans une section d'éducation professionnelle (SEP) nouvellement créée ;
– demander une dérogation permettant d'entrer, malgré tout, en apprentissage.

Cette dernière clause, théoriquement exceptionnelle, indique que, pour l'année 1967-68 du moins, la scolarité obligatoire ne devait pas être tout à fait... obligatoire pour tous.

La grande innovation, au niveau de ce premier cycle, aura été la création des sections d'éducation professionnelle. Leur principe est de mêler un enseignement général donné dans un établissement scolaire (12 heures au moins par semaine) et une formation pratique dans une entreprise (28 heures).

Permettre l'orientation

L'enseignement général doit être axé sur le développement des moyens d'expression, l'habileté manuelle et le sens de l'observation. Il peut être assuré dans un établissement scolaire public ou privé ou dans des cours professionnels ou post-scolaires gérés par les municipalités, les chambres de commerce et d'industrie, les chambres de métiers, les syndicats, les entreprises, etc.

Quant à la partie pratique, qui peut se faire dans une entreprise industrielle, commerciale, agricole ou artisanale, elle ne doit pas consister en un apprentissage à un poste de travail déterminé, mais avoir une caractère pédagogique, de façon à permettre l'orientation et la formation ultérieures des enfants. La liaison entre l'enseignement général et la formation pratique est contrôlée par un inspecteur de l'enseignement technique.

Ce système implique la passation de conventions entre les organisations patronales et l'Education nationale. C'est ce qui a été fait, notamment, avec les chambres de métiers, les chambres de commerce et d'industrie, les fédérations patronales du bâtiment et des travaux publics et le comité central de coordination de l'apprentissage.

Vive opposition

Quel sera l'avenir des sections d'éducation professionnelle ? Conçues comme un palliatif, vont-elles s'imposer et concurrencer les sections terminales pratiques des CES, qui donnent un enseignement pré-professionnel, mais à plein temps, dans des établissements scolaires ?

Dans ses déclarations, le ministre de l'Education nationale a souligné qu'il s'agissait là d'une « formule d'avenir » et non d'un simple expédient. La plupart des organisations syndicales de travailleurs et d'enseignants y sont toutefois vivement opposées, estimant que cela reviendrait à assurer au patronat une main-d'œuvre juvénile à bon marché.

Le problème, qui se trouve posé du point de vue pédagogique, est de savoir si un système d'éducation à mi-temps, en prise sur la vie, peut contribuer à séduire des enfants rebelles à la vie scolaire sous sa forme actuelle, sans pour autant trop sacrifier au pratique. Tout dépendra sans doute de l'équilibre que les SEP sauront ou non maintenir entre l'éducation et le professionnel.

« L'orientation », une nouvelle pierre à l'édifice de la réforme du secondaire

Le nouveau visage de l'enseignement secondaire prend forme. Les lignes générales de l'édifice avaient été fixées par la réforme de 1959. D'autres dispositions, prises en 1965 et 1967 (Journal de l'année 66-67), sont venues compléter ou retoucher les principes initiaux.