Les Soviétiques, de leur côté, lanceront l'opération Mer Noire : un habitacle pour quatre hommes, qui reposera par 10 m de fond, d'abord, puis par 50 et 100 m dans les années à venir.

Une autre solution consiste à faire vivre les plongeurs, pendant les périodes qui séparent leur travail sous-marin réel, dans des habitacles sous pression, placés non plus ou fond, mais à la surface, sur le pont du navire accompagnateur, par exemple.

L'avantage de ce système est d'accroître la sécurité (l'habitacle des plongeurs est plus accessible, en cas d'incident) et de réduire le prix de revient.

Caissons en surface

Le procédé est baptisé Cachalot par les Américains et Ludion par les techniciens de la Compagnie maritime d'expertises de Marseille, la Comex, qui furent les premiers à l'utiliser en Europe. En août 1967, dans le golfe du Mexique, deux plongeurs de la société Esso ont battu un record en restant pendant 48 heures à la pression correspondant à 190 m, profondeur à laquelle ils travaillèrent réellement pendant 2 heures, à trois reprises successives, pour réparer une tête de puits de pétrole.

La Comex utilise une tourelle de plongée prévue pour descendre deux hommes à 180 m. Sur les lieux de travail, ils sortent à tour de rôle pour travailler, l'autre gardant le contact avec le monde extérieur. Les plongeurs peuvent travailler 40 minutes à 180 m avant de se reposer.

Nouveaux records

Déjà, les plongeurs rêvent d'aller plus loin. Le travail entre 200 et 300 m et même au-delà est l'objectif des prochaines expériences que l'on prépare en France et aux États-Unis, les deux pays en tête dans ce domaine. Pour cela, on devra utiliser les nouveaux engins de plongée en cours d'essais.

La France a ouvert le chemin avec les célèbres soucoupes plongeantes de Cousteau, construites à Marseille par l'Office français de recherches sous-marines. La première est descendue plus de 500 fois entre 300 et 350 m, dans toutes les mers du globe. Les puces de mer monoplaces, mises en service cette année, descendent à 500 m.

Les dernières-nées de la série sont la SP 800, en cours d'étude, qui descendra à 800 m, avec trois hommes à bord, et la soucoupe 3 000, qui sera prête cette année et descendra à 3 000 m, comme l'indique son nom, avec trois passagers.

C'est aux États-Unis que se sont récemment multipliés les plus étonnants engins sous-marins. L'un des plus perfectionnés est le Deep-Quest, qui a effectué en février 1968 sa première plongée profonde expérimentale, atteignant 2 350 m — ce qui constitue le record pour engin sous-marin autonome, seuls les bathyscaphes ayant réussi des plongées plus profondes.

À moins 335 m

Pesant 50 t et long de 12 m, le Deep-Quest peut emporter quatre passagers, en deux compartiments. Le premier, qui reste constamment au sec, est celui du pilote. Le second est formé d'un caisson, où des plongeurs peuvent être maintenus à la pression correspondant à la profondeur atteinte, et d'où ils peuvent sortir pour travailler au fond, puis revenir se reposer ou accomplir leurs formalités de décompression.

Un autre crache-plongeurs, en service depuis 1967, est le Deep-Diver, construit par Link, l'un des pionniers de la plongée profonde de longue durée. Le Deep-Diver peut descendre à 500 m. Lui aussi dispose d'un compartiment arrière qui se transforme en maison sous la mer ou en chambre de décompression. En mars 1968, deux plongeurs sont sortis du Deep-Diver à la profondeur de 210 m. Les deux hommes, remontés sous pression sur le pont du navire accompagnateur, ont dû rester 35 heures dans le caisson avant de revenir à la pression normale.

Deux plongeurs marseillais, René Veyrunes et Alain Julien, ont atteint 335 m en mars 1968, dans un caisson de la Comex, battant ainsi le record précédent, établi aux USA, un mois plus tôt, avec 312 m.

Il semble que, pour l'instant, l'utilisation de mélanges respiratoires gazeux autorise la plongée humaine jusqu'à une limite d'environ 500 m. Des essais faits à Marseille, sur des chèvres et des moutons, montrent que ces animaux supportent fort bien, en caisson, des plongées fictives à de telles profondeurs.

Recherches d'avenir

Si l'homme veut aller plus loin, peut-être devra-t-il respirer un liquide suroxygéné. Cette technique a permis au docteur Kylstra, un médecin d'origine hollandaise qui travaille aux États-Unis, de faire respirer pendant plus d'une demi-heure à des souris et à des chiens de l'eau salée suroxygénée. Plusieurs animaux ont survécu à cette étrange expérience.

La plupart des spécialistes de la plongée profonde estiment que c'est la seule solution qui permette à l'homme de franchir le cap des 1 000 m. Les liquides éviteraient les inconvénients des gaz et les longues remontées en paliers. Mais personne n'a encore osé soumettre un homme à une telle expérience.