Journal de l'année Édition 1968 1968Éd. 1968

Abba Eban répond, le jour même, que « la reconnaissance du droit d'Israël à l'existence n'est pas une concession politique, mais une constatation d'évidence ».

Entre-temps, les consultations allaient bon train aux Nations unies, où les amis des parties en conflit ne parvenaient pas à s'entendre sur une formule qui favoriserait un règlement. Certes, des résolutions ont pu être adoptées concernant le stationnement d'observateurs de l'ONU sur les berges du canal de Suez (10 juillet 1967) ou la condamnation de l'annexion du secteur jordanien de Jérusalem par Israël (4 et 14 juillet 1967). Mais les projets de résolution condamnant « l'agression israélienne » étaient rejetés tout autant que les textes pro-israéliens.

Le cercle vicieux est rompu par le représentant de la Grande-Bretagne aux Nations unies, qui, après d'intenses et laborieuses tractations avec toutes les parties en cause, Arabes et Israéliens, Soviétiques et Américains, est parvenu à faire adopter (22 novembre 1967) par le Conseil de sécurité un texte de compromis. La résolution no 242 souligne « l'inadmissibilité de l'acquisition de territoires par la guerre et la nécessité d'œuvrer pour une paix juste et durable permettant à chaque État de la région de vivre en sécurité ».

La résolution du 22 novembre affirme, en outre, la nécessité de garantir la liberté de navigation, « de réaliser un juste règlement du problème des réfugiés » et de créer des zones démilitarisées. Elle recommande, enfin, la désignation d'un représentant spécial au Moyen-Orient « en vue de favoriser un accord et de seconder les efforts tendant à aboutir à un règlement pacifique conforme aux dispositions et aux principes de la présente solution ».

Après avoir exprimé certaines réserves, la RAU, comme la Jordanie, a accepté d'appliquer dans son intégralité la résolution no 242, en renonçant à exiger l'évacuation préalable des territoires occupés. L'Égypte a demandé à G. Jarring, le représentant spécial de l'ONU, le 9 mai 1968, d'établir lui-même le calendrier d'exécution des mesures prévues.

Bataille inéluctable

Israël, pour sa part, a fait savoir que la paix prévue par l'organisation internationale ne saurait être réalisée que par le truchement de négociations directes débouchant sur des traités en bonne et due forme. Selon le gouvernement Eshkol, la résolution impliquerait l'annexion du secteur jordanien de Jérusalem et d'autres territoires « nécessaires à la sécurité d'Israël ».

La manière avec laquelle Israël entend exécuter la résolution du 22 novembre suscite de violentes réactions dans les pays arabes, où l'on accuse l'État juif « d'expansionnisme » et de « mauvaise foi ». Le président Nasser hausse le ton. Le 9 avril, il déclare « qu'une négociation avec Israël signifierait une capitulation », ajoutant, le 29 mai, que le « cours des événements montre que la bataille avec Israël est inéluctable ».

Les interprétations contradictoires du texte du Conseil de sécurité ont conduit G. Jarring dans l'impasse. En mai, cependant, il réussit à convaincre ses interlocuteurs de poursuivre leurs conversations indirectes, par son entremise, à New York, où il élit domicile. La nouvelle formule a le mérite d'accélérer les échanges de vues dans des conditions qui garantissent mieux la discrétion des conversations. D'aucuns espèrent à ce propos que les représentants arabes se laisseront aller à des contacts directs avec les diplomates israéliens, en la présence de G. Jarring.

Toutefois, fin juin, les positions des parties antagonistes, sur le fond du problème, demeurent inchangées. Entre la paix de jure et la paix de facto, la marge de désaccord n'est peut-être ni importante ni fondamentale. Mais l'obstacle majeur demeure : le sort des territoires conquis en juin 1967.

Rhodésie

La rupture semble définitive avec le Commonwealth

L'exécution à Salisbury, en mars 1968, de trois Africains coupables de meurtre, graciés quelques jours plus tôt par la reine Elisabeth II, place à nouveau la Rhodésie au premier plan de l'actualité internationale.