Un travail analogue est actuellement très avancé pour 36 autres nucleus.

M. Brézillon a analysé de son côté l'ensemble de l'outillage de pierre. Il a pu remonter un grand nombre d'outils et, comme pour le nucleus, raconter ainsi leur vie.

Ces biographies d'outils reconstitués sont nouvelles en préhistoire. Elles amènent quelques surprises.

Certains outils paraissent avoir eu plusieurs usages au cours de leur vie, en fonction de leurs accidents et des réaffûtages (on constate jusqu'à trois réaffûtages pour certains d'entre eux). Les outils appelés burins ont ainsi été façonnés souvent sur des pièces qui avaient rempli une autre fonction auparavant ; les traces d'utilisation, de minuscules écaillures, en témoignent. Inversement, on constate que des outils de forme très différente ont été utilisés de la même façon.

Groupement d'outils

Les tailleurs de silex magdaléniens ont sans doute travaillé de façon beaucoup plus libre que ne le laissent penser les multiples catégories de la typologie.

C'est surtout l'étude de la répartition des vestiges dans l'habitation qui a donné lieu à un progrès sensible dans la recherche. Chacune des principales catégories de vestiges a donné lieu à une carte de répartition particulière. Des différences significatives sont ainsi apparues.

Premières différences : dans les couches de répartition des restes osseux et des silex, les os révèlent une certaine attirance pour le foyer I et l'espace compris entre les foyers I et II. Les silex se groupent surtout autour des foyers II et III. Comme le foyer I est, d'autre part, celui qui contenait le plus de suie, on peut voir en lui le centre principal des activités culinaires. Le travail du silex, ou à l'aide du silex, aurait été centré sur les deux autres foyers.

À l'intérieur des silex, on note d'autres différences. Deux catégories d'outils se retrouvent surtout à proximité immédiate des foyers : ce sont les burins et les truelles à bord abattu. Deux autres apparaissent beaucoup plus dispersées : les grattoirs et les lames tranchantes. Ces différences sont d'autant plus surprenantes que burins et grattoirs sont considérés en général comme des outils complémentaires et associés. Certaines pièces font burin d'un côté et grattoir de l'autre.

L'attitude au travail

L'analyse a été poussée au point de pouvoir retrouver la position des magdaléniens au cours de tel ou tel travail : assis sur les blocs trouvés près des foyers, par exemple, ils s'asseyaient face au foyer pour en ôter les pierres et rallumer le feu (peut-être chaque jour), ou bien assis le dos au foyer, face à la lumière, pour le travail du silex.

Il a même été possible d'avancer l'aspect qu'a pu avoir l'habitation et de supposer la façon dont elle avait été construite : trois armatures de longues perches se rejoignant par le sommet, et formant trois cônes décentrés. Le tout pouvait être recouvert d'écorces ou de fourrures.

Les datations au carbone 14 ont fourni une date acceptable de 9 130 ans avant notre ère. Et l'examen des restes de jeunes rennes, en révélant la saison de leur mort, a montré que les hommes avaient habité cette triple tente vers la fin du printemps et dans le courant de l'automne.

Terra Amata : les plus anciennes habitations du monde

Les résultats des fouilles d'urgence entreprises à Terra Amata, au-dessus du port de Nice, et terminées en juillet 1966, ont été connus au début de 1967.

Dirigées par H. de Lumley, ces fouilles, conduites en quelques mois sur un chantier de construction, ont permis de découvrir les restes des habitations les plus anciennes que l'on connaisse actuellement.

Ces restes se trouvent à la partie inférieure d'un dépôt quaternaire épais d'une dizaine de mètres, à des niveaux datant sans doute d'une période de climat tempéré (un interstade) vers la fin de la glaciation de Mindel, ou seconde glaciation du quaternaire.

Outils et huttes

Situé aujourd'hui à 23 m au-dessus de la Méditerranée, l'endroit se trouvait alors au niveau de la mer. Les fouilles ont permis de découvrir là vingt et un niveaux d'habitat sur le sol d'anciennes plages ou dunes, d'anciens cordons littoraux.