La proposition de loi est adoptée par 521 voix contre 55. La loi traite de la provocation à l'avortement et de la propagande anticonceptionnelle. L'article 3, qui concerne la propagande anticonceptionnelle, condamne, s'il est appliqué stricto sensu, toute politique de limitation des naissances. Il est ainsi libellé : « Sera puni d'un mois à six mois de prison et d'une amende de 100 F à 5 000 F quiconque, dans un but de propagande anticonceptionnelle, aura [...] décrit ou divulgué, ou offert de révéler des procédés propres à prévenir la grossesse, ou encore facilité l'usage de ces procédés. Les mêmes peines seront applicables à quiconque, par l'un des moyens énoncés à l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881, se sera livré à une propagande anticonceptionnelle ou contre la natalité. »

Quant à la législation sur l'avortement, elle sera plusieurs fois modifiée (en 1923, 1939, sous le régime de Vichy) et toujours dans le sens d'une répression plus sévère. Sous Vichy, les auteurs, coauteurs ou complices d'avortements deviendront coupables « d'actes, de menées ou d'activités de nature à nuire au peuple français [...] et passibles comme tels d'être déférés au tribunal d'État ».

La proposition Neuwirth

Après François Mitterrand, Lucien Neuwirth traduit la pression de l'opinion, qui n'accepte plus que la fécondité naturelle règle la descendance des familles et qui ressent la contraception comme une liberté à conquérir.

Auparavant, le gouvernement avait chargé la Commission de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale d'étudier non pas les conséquences de mesures libérales en faveur de la limitation des naissances, mais les conséquences éventuelles, sur la santé, de l'absorption des produits anticonceptionnels.

Cette mission restreinte était la conclusion inévitable d'une propagande qui, depuis près de deux ans maintenant, identifie imprudemment pilule contraceptive et contraception, à telle enseigne que toute critique de la première est ressentie comme une attaque contre la seconde.

L'identification entre l'une et l'autre a été poussée si avant, que les partisans de la liberté de conception jouent actuellement leur va-tout sur la pilule. Cette attitude interdit toute considération objective à propos de la pilule, de telle sorte que le rapport dit « du comité des Sages » a fait l'objet d'interprétations qui déforment la vérité médicale. La pilule (on ne devrait d'ailleurs en parler qu'au pluriel, puisqu'en réalité ce singulier couvre un ensemble de compositions différentes, à base d'œstrogènes — hormones féminines — et de progestatifs — hormones de la nidation — synthétiques supprimant l'ovulation, la fécondation ou la nidation) n'a pas été acquittée. Au contraire.

Le projet Neuwirth

C'est le 1er décembre 1966 que Lucien Neuwirth, député UNR de la Loire, a déposé à l'Assemblée nationale un texte de proposition de loi destiné à remplacer la loi de 1920.

Cette nouvelle législation aurait surtout pour effet d'admettre légalement le principe de la réglementation des naissances. La commission l'adopte à l'unanimité moins deux abstentions, dont celle de F. Mitterrand, qui juge que le texte ne va pas assez loin, mais que, néanmoins, il constitue un progrès, en conséquence, il ne peut voter contre.

Le projet Neuwirth prévoit la création « d'un institut d'études et de recherches biologiques et médicales sur la conception et d'un office national d'information et d'éducation familiale ».

La publicité concernant l'utilisation de produits ou objets anticonceptionnels reste interdite, sauf dans les publications réservées aux médecins et aux pharmaciens.

La vente des contraceptifs est autorisée exclusivement en pharmacie et sur ordonnance médicale. Pour les mineurs de moins de 18 ans, le médecin devra recueillir l'avis du représentant légal, sauf en cas d'indication thérapeutique.

Le rapport des Sages

Le texte officiel du rapport du comité, tel qu'il a été publié dans le Moniteur des pharmacies et des laboratoires, débute par une réserve importante : « Les connaissances, écrivent les rapporteurs, même sur les seuls produits actuels, sont encore récentes, incomplètes et, sur bien des points importants, incertaines... De plus, le temps d'observation en médecine humaine est court, trop court notamment pour qu'une action cancérigène puisse être éliminée de façon formelle. » Les rapporteurs reconnaissent que les œstrogènes paraissent produire des cancers chez les animaux et que cette propriété est favorisée par les progestatifs.