Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
O

Orléanais (suite)

Dès la fin du Moyen Âge, cependant, le rôle principal est passé à l’art profane, essentiellement représenté par des châteaux, dont la plupart prennent place dans le groupe fameux du Val de Loire. On reconnaît l’héritage de la féodalité dans les donjons du xie et du xiie s. — quadrangulaires à Beaugency, Montrichard et Lavardin, celui de Châteaudun se distinguant par sa forme cylindrique —, dans les enceintes à tours qui leur sont généralement postérieures ou dans le grand logis fortifié de Sully-sur-Loire (xive s.). La guerre de Cent Ans terminée, un nouvel art de vivre fait adopter un style plus aimable, qui emprunte ses motifs au répertoire flamboyant et tend à transformer la forteresse en demeure. Fougères (Loir-et-Cher) illustre bien, par ses deux campagnes de construction (à partir de 1470), le passage d’une conception encore militaire à l’architecture d’agrément, qui inspire les arcades en anse de panier de sa cour. À Châteaudun, les travaux entrepris par Dunois en 1451 ont donné la sainte chapelle, écrin d’un magnifique ensemble de statues ; ensuite vinrent la sévère aile occidentale, puis le début de l’aile nord, avec le riche décor flamboyant qui habille sur la cour la cage d’escalier carrée où s’inscrit une vis plus traditionnelle. L’aile ouest de Chaumont-sur-Loire, commencée en 1465, contraste par la puissance de son appareil défensif avec le style plus accueillant des ailes sud et est (1498-1510). À Blois, des arcades s’ouvrent au bas de l’aile Louis-XII, élevée en brique et en pierre de 1498 à 1503. L’assemblage des briques en dessins décoratifs donne une grâce colorée au château du Moulin, en Sologne (1480-1501), et à celui de Gien (1494). Talcy (Loir-et-Cher) est le témoin attardé de ce style de transition, qui caractérise aussi des hôtels et des maisons à Blois, à Beaugency, à Vendôme, etc., ainsi que l’ancien hôtel de ville d’Orléans (1503-1513), cadre des riches collections du musée d’art de la ville.

Introduite par le roi et quelques grands seigneurs, la Renaissance s’est d’abord manifestée par l’application de motifs ornementaux d’origine italienne sur des constructions d’esprit traditionnel. Reprise en 1511, l’aile nord de Châteaudun déploie une décoration encore hybride, dont le morceau de bravoure est le frontispice ajouré d’un second pavillon d’escalier. Une recherche de symétrie inspirait le plan de Bury (Loir-et-Cher), élevé de 1514 à 1524 pour Florimond Robertet. À Blois, l’aile François Ier (1515-1524) témoigne d’un italianisme discret du côté de la cour, plus insistant, mais inexpérimenté dans les loggias superposées de l’extérieur. Chambord*, entrepris en 1519, traduit une conception plus neuve et plus grandiose. Les deux ailes en équerre de Saint-Aignan accusent aussi le style de la première Renaissance, comme les hôtels de ville de Vendôme et de Beaugency ainsi que diverses demeures urbaines.

Revenu de captivité en 1526, François Ier délaissera le Val de Loire pour l’Île-de-France, où le nouveau style évoluera vers une maturité classique dont il y a peu d’exemples en Orléanais. À Beauregard (Loir-et-Cher), la Renaissance a laissé le cabinet dit « des Grelots », aux panneaux peints de belles natures mortes ; la galerie aménagée sous Louis XIII est peut-être la plus typique de cette époque en France, avec ses portraits assemblés en trois registres au-dessus d’un lambris orné de natures mortes et de grotesques. Cheverny, élevé vers 1635, a l’aspect alors usuel d’un seul corps de logis formé de cinq pavillons accolés, l’escalier occupant celui du centre ; le somptueux décor intérieur est en partie l’œuvre du peintre Jean Mosnier de Blois (1601-1656).

Le réveil artistique du xviie s. en Orléanais a d’autres témoins : l’aile Gaston-d’Orléans, apport du génie de François Mansart* au château de Blois ; Ménars (Loir-et-Cher), bâti vers 1640 dans un style vigoureux et sobre ; Saint-Fargeau (Yonne), remanié par François Le Vau* ; les évêchés de Chartres, d’Orléans et de Blois ; des hôtels à Orléans. La part du xviiie s., en revanche, est modeste, à deux exceptions près : Orléans, où Jean-Hupeau (1710-1763) a conçu et entrepris en 1751 l’ensemble d’urbanisme (reconstitué depuis la Seconde Guerre mondiale) que forment la place du Martroi, la rue Royale et le pont sur la Loire ; Ménars, grâce aux développements apportés à partir de 1760, sur l’ordre de Mme de Pompadour, par Gabriel* et Soufflot*.

B. de M.

➙ Blois / Centre (Région) / Chambord / Chartres / Eure-et-Loir (départ. d’) / Loiret (départ. du) / Loir-et-Cher (départ. du) / Orléans.

 G. Chenesseau, Orléans et ses environs (Arthaud, 1942). / Y. Babonaux, Villes et régions de la Loire moyenne (Touraine, Blésois, Orléanais). Fondements et perspectives géographiques (S. A. B. R. I., 1966). / E. Bruley et R. Crozet, Visages de l’Orléanais (Horizons de France, 1951). / Val de Loire roman (Braun, 1956). / F. Lebrun (sous la dir. de), Histoire des pays de la Loire (Privat, Toulouse, 1972).

Orléans

Ch.-l. du départ. du Loiret et capit. de la Région Centre, sur la Loire ; 109 956 hab. (Orléanais). L’agglomération compte environ 215 000 habitants.



La situation

Orléans occupe sur la Loire l’une des meilleures positions intérieures du territoire français. Au point où elle reçoit sur le fleuve la circulation du nord (Paris, Flandres), elle commande deux relations maîtresses : Paris-Toulouse par la Sologne, le Berry et le Limousin ; Paris-Bordeaux par le Val de Loire et le seuil du Poitou. Une batellerie active anima son port, à la jonction de lucratifs échanges atlantiques et, par la liaison rhodanienne, méditerranéens. Le site lui-même se prêtait à une bonne mise en valeur de la situation. La lente montée en glacis vers le nord, sur la rive droite de la Loire, du plateau de Beauce offrait à l’homme une sécurité d’installations hors d’atteinte de l’eau ; au sud, le resserrement de 7 à 3 km de la plaine inondable facilitait le passage du Val. Née au point de rupture de charge de la voie d’eau et du roulage sur Paris, Orléans entretint longtemps une fonction d’entrepôt, soulignée dès le ier s. de notre ère (Strabon). Elle figure au ive s. sur la carte de Peutinger parmi les grandes croisées de la Gaule romaine.