Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Archimède (suite)

En dépit des conseils de Hiéron, qui l’engageait à orienter son activité vers les applications, Archimède, comme les autres savants grecs, s’intéressa surtout à la recherche fondamentale. Mais, à l’inverse de ses confrères, pour qui la valeur d’une théorie se mesurait selon des critères d’esthétique, il fut le premier à faire un constant appel au contrôle de l’expérience.

« De tous les grands hommes de l’Antiquité, disait d’Alembert, Archimède est celui qui mérite le plus d’être placé à côté d’Homère. » Et Leibniz : « Ceux qui sont en état de comprendre Archimède admirent moins les découvertes des plus grands hommes modernes. »

R. T.

 J. Babini, Arquimedes (Buenos Aires, 1948). / E. Dijksterhuis, Archimedes (Copenhague, 1956). / Archimède, Œuvres complètes (P. Ver-Eecke, 1960).

Archipenko (Alexander)

Sculpteur américain d’origine russe (Kiev 1887 - New York 1964).



De Byzance au cubisme

La première influence artistique, Archipenko la reçoit de son grand-père paternel, peintre d’icônes. De là viendront sans doute, dans son œuvre, la persistance du thème de la mère à l’enfant, le goût des couleurs vives, qui le portera à réinstaurer la sculpture polychrome, et enfin, par le rapport qui s’établit dans certaines icônes entre des éléments en léger relief et le fond coloré, la création des sculpto-peintures. Cependant, fils d’ingénieur et de bonne heure frappé, grâce à sa découverte de l’œuvre de Léonard de Vinci, par les relations entre l’art et la science, Archipenko appartient à cette génération d’artistes et de poètes que la machine va fasciner : là réside certainement une des sources du dynamisme qui le caractérise. On en trouverait une autre dans les affinités qu’entretiennent quelques-unes de ses premières sculptures avec l’art des steppes*. Pour l’une et l’autre raison se découvre chez Archipenko un ressort de nature expressionniste qui l’apparente infiniment plus au futurisme* ou au vorticisme* qu’au cubisme*, dans les rangs duquel on l’a souvent confondu, ne serait-ce qu’en raison de son installation à Paris en 1908. En effet, renvoyé de l’école d’art de Kiev, dont il a critiqué les professeurs, et ne trouvant pas en Russie une atmosphère créatrice qui ne s’y développera qu’un peu plus tard, il succombe à l’attraction de Paris, où il élaborera jusqu’à la Première Guerre mondiale ses œuvres les plus révolutionnaires.


Des solutions neuves

Il semble que, dès son arrivée à Paris, le jeune sculpteur ait été particulièrement marqué par la sophistication systématique du Polonais Elie Nadelman (1885-1946), dont l’exposition, en 1909, suggère à André Gide des réflexions comme « Nadelman dessine au compas et sculpte en assemblant des rhombes » (Journal), ce qui conviendrait assez aux œuvres qu’Archipenko va bientôt créer. Il est sollicité par des dominantes contradictoires : d’un côté par l’élongation, à la Nadelman, de la silhouette ; d’un autre côté (comme Brâncuşi* dans le Baiser) par la masse compacte de la sculpture, prolongeant ainsi une interrogation esquissée par Rodin* et Medardo Rosso (1858-1928). À la Femme au chat, illustrant la seconde tentation, s’oppose en 1910 Silhouette, par quoi la première s’infléchit vers une abstraction à laquelle, pourtant, Archipenko ne cédera jamais complètement. Au cours des années suivantes, cette dualité se maintient entre des sculptures d’un seul bloc taillées en facettes géométriques, qui vont influencer les sculpteurs cubistes, et des œuvres arbitrairement élancées. En 1912, deux innovations remarquables interviennent. Danse, sorte de ruban sculpté, fait à l’espace un sort essentiel, puisque celui-ci devient le cœur même de l’œuvre, solution que développeront plus tard, mais dans l’abstraction, Naoum Gabo et Antoine Pevsner* ; les premières sculpto-peintures, ou reliefs colorés, introduisent la polychromie et facilitent en outre le passage aux constructions en matériaux divers. Les trouées jouent désormais un rôle important dans la sculpture (le visage et le torse de La femme marchant [1912] sont des trous), ainsi que les formes concaves : on sait l’importance que les unes et les autres revêtiront plus tard pour Barbara Hepworth* et Henry Moore*. Les constructions, où le contre-plaqué, le métal, le verre se combinent avec une insolente liberté, représentent vraisemblablement le sommet du génie d’Archipenko. Mais s’il reste une œuvre comme Médrano (1914) pour nous permettre d’en juger, les plus sensationnelles, comme Femme au miroir, n’existent plus. Les bronzes Carrousel Pierrot (1913), la Boxe et le Gondolier (1914) montrent qu’alors, en tout cas, Archipenko pousse chacune de ses solutions plastiques à son efficacité maximale.


Une sculpture de l’harmonie

Après la Première Guerre mondiale, Archipenko s’installe à Berlin, qu’il quitte en 1923 pour les États-Unis (il deviendra citoyen américain en 1928). Sa renommée est mondiale : il apparaît comme le leader de la révolution sculpturale. Pourtant, si l’on excepte sa très singulière invention de peinture animée, l’Archipentura (1924), grâce à laquelle il mérite une place parmi les pionniers de l’art cinétique, son activité n’est désormais que le développement paisible de quelques-unes de ses initiatives spectaculaires de 1912-1914. Certes, si elle n’était pas d’Archipenko, on s’étonnerait de la variété formelle qu’elle continue jusqu’au bout de proposer, une variété dans la grâce constante. Car, ainsi que l’écrivait en 1912 Guillaume Apollinaire : « Sauf dans quelques œuvres très mouvementées et troublantes, la sculpture n’a été jusqu’à présent qu’une mélodie. Les œuvres d’Archipenko sont une harmonie, les premiers accords. »

J. P.

 A. Archipenko, Archipenko : Fifty Creative Years 1908-1958 (New York, 1960). / Ouvrage collectif, Archipenko, visionnaire international, accompagnant une tournée d’expositions organisée par la Smithsonian Institution (Washington, 1969).