Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

nitriles (suite)

Les nitriles sont généralement liquides ; HCN bout à 28 °C ; il est miscible à l’eau en toutes proportions ; la solubilité dans l’eau des autres nitriles diminue lorsque la masse molaire augmente ; Φ—CN y est pratiquement insoluble. Les nitriles possèdent une odeur forte ; ils sont toxiques, mais moins que l’acide cyanhydrique. En infrarouge, la fonction nitrile est caractérisée par une bande forte vers 2 200 cm–1 (domaine des liaisons triples).

La liaison triple carbone-azote est fortement polarisée :

Cela fait prévoir des additions orientées, l’électrophile, pratiquement l’hydrogène ou un métal, s’additionnant à l’azote, tandis que le nucléophile s’unit au carbone ; ces additions peuvent se répéter dans le même sens :

L’hydrogénation, catalytique ou chimique, conduit facilement à l’amine primaire R—CH2—NH2 ; toutefois, on passe par l’intermédiaire de l’imine R—CH=NH, qui peut être captée si l’on opère en milieu complexant (SnCl4) ; par hydrolyse de cette imine, on aboutit à l’aldéhyde R—CHO (réaction de Stéphan).

Les hydracides conduisent à des produits d’addition :

Ces chlorhydrates de chlorimines sont les intermédiaires probables d’autres additions réalisées en présence de HCl.

L’hydrolyse se passe en deux phases :

Lente en milieu neutre, elle est rapide en milieu acide, comme en milieu alcalin ; elle ne s’arrête au stade amide que si celui-ci est stériquement encombré.

À 0 °C, les alcools primaires engendrent des chlorhydrates d’iminoéthers, hydrolysables en esters :

À température plus élevée, il se forme des orthoéthers :

Les aminés non tertiaires conduisent à des amidines :

Les hydrogènes liés au carbone, mais particulièrement actifs, s’unissent à l’azote ; avec le phénol :

à l’hydrolyse, on recueille NH4Cl et une cétone-phénol.

Les organomagnésiens conduisent à des imidures, hydrolysables en cétones :

Mais l’hydrogène en α de —CN, s’il en existe, possède une certaine acidité ; d’où la réaction parasite

À l’hydrolyse, on trouve R″H et le nitrile de départ.

Les nitriles sont polymérisables ; s’il existe des hydrogènes en α de—CN, cette polymérisation est indéfinie et conduit à des résines ; dans le cas contraire, on observe une trimérisation irréversible :

C. P.

Ni Tsan

En pinyin Ni Zan ; nom social : Yuan Zhen (Yuan Tchen, « le très tranquille ») ; surnom : Yunlin. Poète, calligraphe et peintre chinois (1301-1374).


Ni Zan, avec son ami et contemporain Wang Meng (Wang Mong*), appartient à la jeune génération des grands peintres de l’époque Yuan*. La cohérence exemplaire de sa vie, de sa personnalité et de son œuvre, qui incarne toutes les recherches de la « peinture des lettrés », a contribué, auprès de la postérité, à faire de lui une figure de légende, l’idéal même de l’homme libre, détaché de toute ambition.

Né dans une famille de grands propriétaires terriens de Wuxi (Wou-si), au Jiangsu (Kiang-sou), Ni Zan mène, dans sa jeunesse, la vie facile d’un connaisseur fortuné, passionné de questions esthétiques. Dans son jardin planté de pins, de fleurs et de bambous, agrémenté de rochers aux formes étranges, il fait construire un pavillon pour abriter ses collections de livres rares, de bronzes, d’autographes et de peintures anciennes. Là, volontairement à l’écart de la vie politique, entouré d’un cercle restreint d’amis — moines, poètes, artistes — capables de partager les raffinements de son goût et de sa sensibilité, il s’adonne à la poésie, à la calligraphie et à la peinture. Comme chez Mi Fu (Mi Fou*), dont il admirait le comportement, la manie de la propreté reflète une recherche de la pureté, poussée à l’extrême.

Vers l’âge de trente ans, la mort de ceux qui s’étaient chargés de son éducation — un demi-frère plus âgé et l’épouse légitime de son père — lui cause une affliction profonde. Ni Zan devient plus solitaire et montre un intérêt accru pour les pratiques méditatives du bouddhisme et du taoïsme. En outre, il est tourmenté par des difficultés financières. À partir de 1341, il doit vendre progressivement ses terres ; puis les premiers soulèvements populaires dans la région du Bas-Yangzi (Bas-Yang-tseu), vers la fin de la dynastie mongole, le conduisent à se réfugier à plusieurs reprises, avec sa femme, sur les rives du lac Taihu (T’ai-hou). En 1356, après avoir été arrêté pour dette, Ni Zan décide d’abandonner sa maison et ses biens. Dès lors, il mène une vie errante et austère, voyageant dans une petite maison flottante sur les rivières et les lacs du sud-est du Jiangsu (Kiang-sou). L’année de sa mort, il retourne dans son village natal, car un certain calme s’est rétabli dans le Sud après l’installation des Ming.

La plupart de ses peintures durent être exécutées au cours des randonnées de la fin de sa vie. Ses paysages, généralement de petit format, peints sur papier sans adjonction de couleurs, mais complétés par la calligraphie d’un poème, se limitent à des compositions simples : un premier plan rocheux planté de quelques arbres graciles et peu feuillus, puis le vide immense d’une étendue d’eau, fermé à l’horizon par des collines basses. Toute figure humaine est bannie de cet univers de silence ; seul un pavillon évoque parfois la présence effacée de quelque solitaire. Ni Zan cherche à traduire les « libres élans de son cœur », sans souci de ressemblance avec les paysages du Sud, qui lui sont pourtant familiers. Ne disait-il pas de ses peintures de bambous : « Les spectateurs les prennent qui pour du chanvre, qui pour des roseaux ; pour ma part, je ne saurais forcer personne à y reconnaître des bambous » ?