Newman (John Henry) (suite)
De 1833 à 1841 parurent les Tracts for the Times, écrits en grande partie par Newman. Ils traitaient de la doctrine des Pères de l’Église, de la recherche de l’esprit originel du christianisme, mais l’aspect le plus original en était déjà le souci de montrer l’importance de l’histoire dans l’évolution du christianisme. Les tractariens étaient, en ce domaine, les héritiers de la tradition de deux théologiens anglicans, Richard Hooker (1554-1600) et Samuel Taylor Coleridge, qui s’étaient penchés sur ces problèmes.
À cette époque, Newman n’envisageait nullement de se rallier à l’Église catholique ; au contraire, il élaborait la théorie de la troisième voie, selon laquelle l’Église anglicane occupait une via media entre une Église catholique trop statique et des églises protestantes trop éloignées de la tradition des Pères.
Ses prédications à Saint Mary’s d’Oxford, les Parochial and Plain Sermons (1834-1842), ses Esquisses patristiques (1833-1836) et ses Lectures on Justification (1838), qui développent ces théories, firent de lui le théologien le plus célèbre d’Angleterre. En 1841, cependant, son Tract 90, dans lequel il se rapprochait des positions de l’Église romaine au sujet de l’anglicanisme, suscita une vive opposition. En pleine crise religieuse, doutant du bien-fondé de sa doctrine de la via media, Newman se retira dans la solitude de Littlemore, près d’Oxford.
Le fruit de ses réflexions, ce sera en 1845 l’Essay on the Development of Christian Doctrine, qui démontre que l’Église catholique est la seule véritable héritière de l’Église primitive. Grâce à son sens de la tradition, elle aurait su, à travers l’histoire, conserver intacte le dépôt originel tout en le développant et en l’insérant dans le continuum historique.
Le 9 octobre 1845, Newman abjurait l’anglicanisme et faisait sa profession de foi entre les mains d’un prêtre catholique. Sa conversion l’éloigna de ses amis d’Oxford, et Newman entreprit un voyage à Rome, au cours duquel il fut ordonné prêtre le 30 mai 1847 ; quelque temps après, il entrait à la congrégation de l’Oratoire. En 1848, après son retour en Angleterre, il fondait à Birmingham la première maison oratorienne de Grande-Bretagne.
Après cinq années de rectorat à la tête de l’université catholique irlandaise de Dublin (1851-1856), il se consacra entièrement aux recherches théologiques. En 1870, son livre Grammar of Assent (la Grammaire de l’assentiment) dressa contre lui les théologiens catholiques traditionalistes, dont le cardinal Manning, un converti, lui aussi.
L’opposition de Newman, au premier concile du Vatican, à la proclamation du dogme de l’infaillibilité pontificale, dont Manning était l’ardent champion, n’était pas faite pour désarmer les critiques acerbes des intégristes britanniques. Il ne fallut rien moins que son élévation au cardinalat par le pape Léon XIII en 1879 pour faire cesser les attaques dont il était l’objet.
Newman avait également publié en 1864 son autobiographie, Apologia pro vita sua, un admirable récit teinté d’humour, et en 1873 un traité d’éducation chrétienne, Idea of a University Defined. Il est également l’auteur de romans religieux : Perte et gain, Callista, etc.
Lorsqu’il mourut à Edgbaston, près de Birmingham, le 11 août 1890, les vieilles querelles étaient oubliées, et c’est le cardinal Manning lui-même qui tint à prononcer son oraison funèbre.
C. J.-N.
H. Bremond, Newman (Bloud et Gay, 1905-06 ; 3 vol.). / D. Gorce, Introduction à Newman (Desclée De Brouwer, 1924). / J. Guitton, la Philosophie de Newman (Boivin, 1933). / L. Bouyer, Newman. Sa vie, sa spiritualité (Éd. du Cerf, 1952). / L. Cognet, Newman ou la Recherche de la vérité (Desclée De Brouwer, 1967).