Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
N

Nervi (Pier Luigi) (suite)

Pour d’autres types de construction n’exigeant pas de grands espaces couverts sans supports intermédiaires, Nervi s’engagera dans des recherches qui font beaucoup penser à Robert Maillart (1872-1940), où l’élément préfabriqué est non plus une poutre, mais un panneau, nervé et cintré, dont les possibilités d’assemblage dessinent un nouveau réseau de structures : c’est le cas de l’usine de filature Gatti à Rome (1953), dont les planchers-champignons sont très célèbres, et de la manufacture des tabacs à Bologne (1952).

Les dernières œuvres de Nervi marquent d’autres préoccupations, dans des directions très diverses. Le palais de l’Unesco à Paris, édifié entre 1952 et 1958 en collaboration avec Marcel Breuer* et Bernard Zehrfuss (né en 1911), est une recherche sur les structures en voiles minces, formées par la combinaison de poutres creuses et de voiles sinusoïdaux. Le gratte-ciel Pirelli à Milan* (1958, avec l’architecte Gio Pond [né en 1891]) exploite le domaine de la précontrainte, associant des voiles raidisseurs en tête et, au milieu, des couples de poteaux qui vont s’effilant et s’espaçant vers le haut. Quant au Palais du travail de Turin (1961), c’est une gigantesque salle hypostyle, hors d’échelle, dont les seize piliers palmés sont composés d’un poteau en béton et d’une enrayure en métal : ce système combiné est l’extension du principe des planchers-champignons de l’usine Gatti, mais on peut déplorer le caractère un peu théâtral de cet espace surdimensionné, qui n’a ni l’ampleur ni la légèreté des grandes coupoles et des voûtes du palais des Sports de Rome ou du hall des Expositions de Turin. De même pour la papeterie Burgo de Mantoue (1964), gigantesque pont de 285 m de long et de 31 m de large suspendu à un double portique incliné qui retient 495 t de couverture : même justifiée par les nécessités d’une chaîne en continu sur une si grande longueur, cette énorme construction apparaît quelque peu démesurée par rapport aux besoins réels de l’usine.

Le pathétisme marque ainsi les dernières œuvres de Nervi et justifie partiellement l’accusation de formalisme portée contre lui — encore qu’il ne faille pas négliger l’importance que les œuvres de sa maturité ont pu avoir dans l’histoire de l’architecture au milieu du xxe s.

F. L.

➙ Bétonnage [l’architecture en béton].

 ÉCRITS DE NERVI : Scienza o arte del costruire ? (Rome, 1945) ; Costruire correttamente (Milan, 1954 ; 2e éd., 1965).
G. C. Argan, Pier-Luigi Nervi (Milan, 1954). / P. L. Nervi, Nuove strutture (Milan, 1957 ; trad. fr. Structures nouvelles, Vincent et Fréal, 1963). / P. L. Nervi, E. R. Rogers et J. Joedicke, Pier Luigi Nervi (Milan, 1957 ; trad. fr. Pier-Luigi Nervi, ingénieur, architecte. Constructions et projets, Vincent et Fréal, 1958). / A. L. Huxtable, Pier-Luigi Nervi (New York, 1960).

nestorianisme

Hérésie christologique professée au ve s. par Nestorius, patriarche de Constantinople (428-431).



Nestorius

Nestorius (Germanica Cesarea, auj. Maras, v. 380 - Kharguèh 451) enseignait que la Vierge Marie n’avait pu engendrer le Fils de Dieu, mais seulement l’homme dans lequel s’était incarnée ensuite la deuxième personne de la Trinité ; en conséquence, Marie n’était plus que la Christotokos (« mère du Christ »), et le titre de « mère de Dieu » (Theotokos) lui était refusé.

Ainsi, l’union des deux natures n’était plus que morale ou volontaire, mais non plus essentielle et hypostatique ; de plus, en refusant à la Vierge le titre de mère de Dieu, qui était très populaire, Nestorius allait déchaîner contre lui la colère des théologiens comme des simples fidèles.

Cette dualité des natures, en effet, remettait en question la valeur de l’action rédemptrice du Christ, qui ne pouvait être complète, accomplie par un homme qui ne possédait la nature divine que par accident.

Aussi, dès Pâques 429, un Alexandrin, le propre évêque d’Alexandrie, Cyrille, s’oppose-t-il aux idées de Nestorius et affirme-t-il que la Vierge a bien droit au titre de Theotokos. À Constantinople, Nestorius, fort de l’appui de l’empereur Théodose II, refuse de se rétracter. Cyrille en appelle alors au pape Célestin Ier (422-432), qui condamne Nestorius en août 430.

La querelle reprend de plus belle lorsque d’autres théologiens de l’école d’Antioche, comme Théodoret de Cyr (v. 393-v. 460) et André de Samosate, accusent à leur tour Cyrille d’Alexandrie de verser dans l’hérésie monophysite, c’est-à-dire de nier la dualité des natures humaine et divine.

Pour trancher le débat, les deux partis en appellent à un concile, que l’empereur Théodose II (408-450) réunit à Éphèse en 431 ; le pape est représenté par ses légats, mais Nestorius n’y paraît pas. L’assemblée, dominée par Cyrille, n’attend pas l’arrivée des Antiochiens et condamne Nestorius, puis elle fait acclamer la Theotokos par le peuple d’Éphèse.

Pour l’évêque d’Alexandrie, il n’y a dans le Christ qu’une seule personne, le Verbe incarné, à laquelle les actions, qui procèdent soit de la divinité, soit de l’humanité, doivent être indifféremment attribuées. C’est bien le Fils de Dieu qui est né, qui a grandi, qui a souffert et est mort sur la croix, et la Vierge doit être légitimement considérée comme sa mère, comme la Theotokos.

Mais les théologiens d’Antioche continuant à reprocher à Cyrille de renouveler l’hérésie apollinariste, ce dernier, pour se laver de tout soupçon, accepte de renoncer à certaines de ses formules et peut ainsi conclure une entente avec les Antiochiens. Dans cet édit d’Union de 433, il est affirmé qu’il y a dans le Christ deux natures unies dans une seule personne divine et que la Vierge est la mère de Dieu.

L’école d’Alexandrie triomphe ; l’empereur se rallie à ses thèses et, en 435, il exile Nestorius dans la Grande Oasis ; ce dernier mourra en 451 sans avoir jamais renoncé à ses vues, qu’il a résumées dans un ouvrage, le Livre d’Héraclide de Damas, retrouvé au début du xxe s. Mais une Église — dite « nestorienne » — se réclamera de lui.

P. R.