Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Montevideo (suite)

L’atmosphère de prospérité et de stabilité politique de l’Uruguay entre 1945 et 1950 a alors conféré un rôle bancaire international à Montevideo, devenue le lieu de placement des capitaux sud-américains, menacés par l’instabilité politique des autres pays. Ce rôle a été remis en question depuis les années 1955-1960, par le début de la crise économique. Les difficultés se traduisent particulièrement par un marasme industriel, un grand chômage et un retard dans la modernisation du port. L’espace urbain porte les marques de la crise : à partir du port et dans la direction de l’ouest, la zone industrielle et les quartiers ouvriers installés dans le deuxième quart du xxe s. offrent un aspect très dégradé, avec même de véritables taudis. À cette partie s’opposent le centre des affaires, partiellement rénové en raison de l’ampleur des fonctions tertiaires, et les quartiers résidentiels autour des plages, formés pour l’essentiel de maisons individuelles entourées de leurs jardins. Toutefois, quelques immeubles en hauteur ont surgi au centre pour abriter des bureaux ou constituer les premiers éléments d’une zone d’immeubles à appartements. Au-delà de la ville proprement dite, les quartiers riches poursuivent leur extension le long des plages, tandis que, vers l’intérieur, entre des zones loties de petites villas plus modestes, l’espace devient progressivement rural. Le réseau de transports des voyageurs est très symbolique de la primauté de Montevideo : les dix-huit autres villes les plus importantes sont reliées à Montevideo par des trains et par des autobus directs. Métropole unique d’un espace national qu’elle organise, mais dont, en retour, elle dépend, la ville a largement profité de l’essor économique uruguayen, mais subit démesurément aujourd’hui les conséquences sensibles de son déclin.

M. R.

 A. Bride et M. Rochefort, l’Organisation de l’espace et problèmes de mise en valeur en Uruguay (la Documentation française, « Notes et études documentaires », 1970).

Montgomery of Alamein (Bernard Law Montgomery, Ier vicomte)

Maréchal britannique (Kennington, Londres, 1887 - Alton, Hampshire, 1976).


Quatrième d’une famille de neuf enfants, dont le père, pasteur, fut longtemps évêque de Tasmanie, Bernard, qui se qualifie lui-même d’« élève déplorable », entre en 1907 à Sandhurst, à une époque où « l’armée britannique n’attirait pas les meilleurs cerveaux du pays ». À la fin de 1908, il part pour les Indes, à Peshāwar, avec le premier bataillon de son régiment et se donne entièrement à son métier, tout en jugeant sévèrement l’armée des Indes, qu’il estime sclérosée. Revenu en Grande-Bretagne en 1913, il est promu capitaine. Deux fois blessé sur le front français, il termine la Première Guerre mondiale comme lieutenant-colonel chef d’état-major de la 47e division et se déclare « épouvanté par les pertes terrifiantes du conflit » et par « l’indifférence des états-majors à l’égard des conditions dans lesquelles la troupe devait vivre, combattre et mourir ». En 1920, il entre à l’École d’état-major (Staff College) de Camberley, puis participe à la lutte contre le Sinn Féin en Irlande, qui le révolte, car « elle fait perdre aux soldats tout esprit chevaleresque ». Nommé ensuite instructeur de l’École d’état-major et inspecteur de l’École d’infanterie de Canterbury, il y affirme sa personnalité : austère, d’un caractère entier et peu conformiste, animé d’un haut idéal religieux et patriotique, il est très soucieux de l’état moral et matériel de sa troupe. Colonel en 1934, il a le malheur, en 1937, de perdre son épouse après dix ans de mariage et se donne de plus en plus exclusivement à sa vocation d’officier. Promu général la même année, il commande la 9e brigade d’infanterie à Portsmouth, puis en 1938 la 8e division à Haïfa, où il doit réprimer la rébellion arabe dans le nord de la Palestine. Mais il sent monter l’orage en Europe et constate que l’armée britannique va affronter cette épreuve « avec une organisation et un équipement datant de 1918 ».

Mis en 1939 à la tête de la 3e division en France, il réussit à la rembarquer à Dunkerque en 1940. Chargé, l’année suivante, de la défense du secteur de Brighton, il conquiert au cours de ses inspections l’amitié de Churchill, qui consacrera son surnom de Monty. En août 1942, le Premier ministre l’envoie en Égypte à la tête de la VIIIe armée, qui, sur la position d’El-Alamein, défend contre les assauts de Rommel la route d’Alexandrie. Après une minutieuse préparation, Montgomery passe le 23 octobre à la contre-offensive et bouscule son adversaire, qu’il refoule en Libye, sur Tripoli (atteint en janvier 1943), puis jusqu’à Tunis (mai). Après avoir débarqué dans le sud-est de la Sicile (10 juill.), la VIIIe armée britannique prend pied en septembre dans le sud de l’Italie, où elle progressera le long de la mer Tyrrhénienne, puis prendra place à la droite de la Ve armée américaine.

En janvier 1944, Montgomery est rappelé à Londres pour préparer, aux côtés d’Eisenhower, le débarquement allié en France, où, du 6 juin au 1er septembre, il assure le commandement en chef de l’ensemble des forces alliées engagées en Normandie. Promu maréchal le 31 août et mis à la tête du 21e groupe d’armées britannique, il libère le nord de la France et la Belgique, livre la difficile bataille d’Arnhem, puis entraîne ses troupes en Westphalie et au Hanovre. Le 4 mai 1945, à son quartier général de Lüneburg, il reçoit la reddition des forces allemandes du nord-ouest de l’Europe.

Au lendemain de la victoire, il commande les forces britanniques d’occupation en Allemagne, mais il est rappelé un an plus tard à Londres comme chef de l’état-major impérial, où il prend conscience des menaces qu’une paix difficile fait encore peser sur le monde. Aussi, refusant de s’en remettre à l’hégémonie américaine, qu’il a toujours difficilement supportée (ses désaccords furent nombreux en 1944-45 avec Eisenhower), il s’emploie à sauver du déclin l’armée britannique et notamment à maintenir le service militaire obligatoire. Mais sa notoriété parmi les Alliés est telle qu’après les signatures des accords de Bruxelles (1948) et du traité de l’Atlantique Nord (1949) il est nommé à Fontainebleau président du Comité militaire des commandants en chef des forces d’Europe occidentale (1948), puis adjoint, en 1951, du général Eisenhower, commandant suprême des forces alliées en Europe. Monty servira ainsi au SHAPE (Supreme Headquarters Allied Powers Europe) sous les ordres successifs de quatre commandants en chef américains et militera au cours de ses nombreux voyages et inspections pour l’unité du monde occidental.